Avant 2010, le chinois Xiaomi n’existait pas. En moins de dix ans, la marque a grimpé au rang de géant du numérique, rivalisant avec les GAFAM.
Comment cette entreprise a-t-elle réussi à grandir aussi rapidement ?
Cette étude établit une grille de lecture sur l’entreprise Xiaomi à travers ses activités et sa stratégie depuis sa création, prenant en compte le contexte dans lequel l’entreprise a évolué, ainsi que ses connexions avec le Parti Communiste Chinois (PCC) et les autres géants du numérique.
Dès la création du groupe, le fondateur Lei Jun avait développé le modèle économique du « triathlon », intégrant logiciel, matériel et services internet, avec l’intention d’avoir un effet disruptif sur le marché. En recrutant des personnes compétentes dans les meilleures entreprises de leurs domaines respectifs, Xiaomi s’est donné les capacités d’optimiser son organisation et développer des smartphones de haute qualité pour des coûts faibles en production et logistique à tous les niveaux de la chaîne d’approvisionnement. En gardant une marge faible sur les produits (±5%), ils purent les vendre à des prix compétitivement bas. Cela permis une pénétration rapide et conséquente du marché chinois avant de s’étendre à l’international, devenant notamment le premier distributeur en Inde.
Xiaomi s’est ensuite rapidement diversifié en commençant à vendre des objets connectés tels que les wearables dès 2013. Cette diversification, qui correspond à la stratégie de « l’Océan Bleu », vise à créer un nouvel espace sur le marché et le noyer avec des produits à bas prix, rendant la compétition impuissante et créant une dépendance. Bien qu’elle soit au troisème rang mondial en termes de ventes de téléphones, l’entreprise détient la première place sur de nombreux marchés d’objets connectés, dont les filtres à air et les smartwatches.
La construction d'une logique de dépendance
L’écosystème Mi fut développé en parallèle, consolidant non seulement sa position sur les marchés établis, mais aussi en créant indirectement une situation de dépendance centrée autour des logiciels Mi, piégeant tout aussi bien les consommateurs que les fabricants. Il s’agirait ici d’une étape de la stratégie d’encerclement cognitif que Xiaomi applique depuis des années. La pénétration sur le marché des téléphones n’aurait représenté que la première de nombreuses étapes.
Il existe un lien important entre l’entreprise et le PCC allant au-delà de ses obligations à obtempérer aux réglementations gouvernementales. Lei Jun est vice-président de la Fédération Nationale de l’Industrie et du Commerce de Chine (FNICC) en plus d’être élu député à la 13e assemblée populaire nationale, ce qui lui confère le pouvoir de proposer des lois à l’assemblée populaire chinoise. Mais bien que sa stratégie de développement corresponde aux ambitions du parti en termes de numérique et le projet « Made in China 2025 », l’entreprise doit entretenir une relation forte avec le PCC pour éviter de subir les mêmes sanctions anti-monopole que celles imposées à Alibaba le géant de la vente en ligne.
Le lien avec la gouvernance communiste
Ce lien entre Xiaomi et l’État a été confirmé par les multiples failles et backdoors découvertes dans ses smartphones au fil des années. En 2014, il fut révélé que les téléphones Redmi envoyaient les photos et messages au China Internet Network Information Center (CNNIC), une agence gouvernementale chinoise. En 2019, une faille vraisemblablement volontaire fut identifiée uniquement dans les téléphones destinés au marché international (et non chinois). Plus récemment, il a été signalé que le navigateur mobile Xiaomi transfère les données privées d’utilisateurs à un serveur Alibaba loué par le groupe. L’entreprise semble néanmoins indifférente à ces accusations, qui se sont avérées pour la plupart, et continue à grandir.
Entre force de résilience, soutien régalien et pragmatisme il est plus que probable que Xiaomi continuera à jouer un rôle important parmi les géants américains et chinois du numérique dans les années à venir.
B. Bourges, E. Burgat, J. Grolleau, L. Grecq, M. Rey, M-A Tarantino, P. Martin, T. Machin, A. Mailler
Auditeurs des 3ème et 4ème Promotions RIE, de la 3ème Promotion RSIC, de la 24ème Promotion SIE
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