L’intelligence artificielle, entre menaces et opportunités

2 février 2023

La technologie est l'un des rares domaines à connaître une croissance exponentielle. Au fur et à mesure qu'une technologie se développe, le coût de sa création diminue tandis que ses performances augmentent généralement (1, 2). L'intelligence artificielle (IA) fait partie du groupe des technologies qui possèdent ce taux de croissance rapide. Comme l'IA dépend de la puissance de calcul, ses capacités augmentent avec le développement de la puissance de calcul (1).

Une autre caractéristique importante d'une technologie telle que l'IA est sa nature perturbatrice. La technologie du présent est rapidement remplacée et dépassée par les cycles rapides de développement technologique. Parmi les exemples de telles perturbations, on peut citer l'entreprise Kodak qui n'a pas su profiter de la croissance exponentielle du développement des appareils photo, et qui a finalement dû se déclarer en faillite alors que des entreprises, comme Instagram ont profité de cette "nouvelle technologie". La loi de Moore développée par le fondateur d'Intel explique également ce phénomène, en démontrant comment le nombre de transistors sur une puce est censé doubler tous les 2 ans (1), justifiant la capacité perturbatrice que possède la technologie.

La loi de Moore [4]

L'IA n'est pas différente dans le sens où elle est en développement constant. Il existe une IA qui joue aux échecs, illustrant ainsi la capacité des programmes à atteindre un objectif en fonction d'un ensemble de règles strictes. Des programmes tels que Deep Blue d'IBM ont battu l'ancien champion du monde Garry Kasparov en 1997 lors d'un match de six parties (1), laissant entrevoir la puissance et les connaissances que possède un tel programme.

Depuis cette défaite historique, l'IA d'échecs n'a fait que devenir plus forte et plus rapide dans l'analyse des scénarios, avec des programmes tels que AlphaZero AI battant Deep Blue d'IBM et d'autres IA d'échecs de manière convaincante (5) La simplicité du jeu d'échecs démontre l'amélioration rapide de la technologie d'apprentissage automatique pour traiter les données et prendre une décision éclairée. IBM a également développé Watson, une IA capable de comprendre et de fournir des réponses à des "questions en langage naturel" (1). Bien que Watson ait été capable de gagner dans une partie de Jeopardy contre deux des plus grands joueurs humains, ce type d'IA est appliqué dans une grande partie de la vie quotidienne.

La controverse autour de l'IA

Tous les assistants virtuels d'aujourd'hui, tels que Siri, Alexa, Cortana, Google et bien d'autres encore, utilisent l'IA pour comprendre les questions que les gens peuvent poser et y apporter une réponse appropriée. Il en va de même pour l'Amazon Echo ou le Google Home, qui sont des assistants capables d'effectuer des recherches dans une vaste base de données pour fournir aux utilisateurs des réponses à des questions de base. Ces technologies peuvent être synchronisées avec des lampes, des thermostats et d'autres appareils électroniques, ce qui permet à l'IA d'effectuer des tâches simples sur simple demande verbale de l'utilisateur. Toutefois, si les programmes d'IA sont aussi courants que les assistants virtuels des téléphones portables modernes, quelles sont les implications d'une mauvaise utilisation d'une technologie aussi puissante?

Si la controverse continue d'entourer cette technologie, il est évident que l'intégration de l'IA dans la vie quotidienne est inévitable. Sachant que la technologie ne fera que se développer plus rapidement, il sera essentiel de s'assurer de l'impact de l'IA pour maximiser la croissance économique et sociétale associée à cette technologie. La croissance du marché de l'IA devrait s'élever à 18,4 milliards USD d'ici 2026 rien qu'aux États-Unis ; beaucoup plus important par rapport à la valeur de 6,8 milliards en 2021 [6]. Pour les entreprises, l'adoption de l'IA dans leurs activités est essentielle pour la croissance économique future. Celles qui mettent en œuvre l'IA connaîtront une grande croissance économique, tandis que les non-adoptants seront laissés pour compte, ce qui creusera les écarts économiques entre les entreprises. Le McKinsey Global Institute prévoit que d'ici à 2030, les entreprises qui adopteront rapidement l'IA pourraient connaître une augmentation de 122 % de leurs flux de trésorerie, tandis que les entreprises qui n'adopteront pas l'IA pourraient subir une chute de chiffres d’affaires atteignant -23 % (7).

Les polémiques potentielles autour de l'emploi

De nouveaux emplois vont apparaître pour les personnes qui ont des compétences dans l'utilisation et le développement de l'IA. Si l'on peut encore se demander si la mise en œuvre de l'IA entraînera un gain ou une perte nette d'emplois, une conclusion s'impose : ceux qui n'ont pas les compétences appropriées pour travailler avec des dispositifs autonomes devront probablement s'adapter pour survivre dans un environnement en mutation rapide (7, 8).

Les tâches quotidiennes répétitives deviendront très probablement complètement autonomes, ce qui poussera les gens à développer des compétences numériques pour trouver du travail (7-9). Nous pouvons constater cet effet même dans le monde d'aujourd'hui. Selon un article du Massachusetts Institute of Technology (MIT), dans l'industrie de la construction automobile, un seul robot automatisé remplace environ 3,3 emplois aux États-Unis et, dans les villes à forte densité de robots comme Détroit, 6,6 emplois par robot (10). Il est important de considérer également le coût de la mise en œuvre de l'IA dans une entreprise ou une société, car l'intégration de l'IA peut présenter certains défis initiaux. Si l'IA peut apporter des avantages considérables aux entreprises, le coût des programmes d'IA peut être assez élevé, en fonction des services requis. Par exemple, nous allons examiner un programme d'analyse de données de base. Les systèmes d'analyse de données personnalisés commencent à environ 35 000 $ US (11), mais les prix peuvent augmenter considérablement en fonction du calibre du système requis. Par conséquent, l'investissement initial peut être coûteux, en particulier pour les petites entreprises qui cherchent à mettre en œuvre l'IA dans leurs systèmes de données. Il existe certainement la possibilité d'acheter des programmes tiers déjà réalisés pour les chatbots et les systèmes d'analyse de données, ce qui permet de réduire les coûts (11). Pour une entreprise qui souhaite mettre en œuvre l'IA, de multiples évaluations sont nécessaires pour créer un modèle commercial optimisé qui offre le plus grand avantage économique en travaillant avec des systèmes automatisés. Cependant, ce qui est clair, c'est que ceux qui y parviendront connaîtront les avantages économiques dans un avenir relativement proche.

Les nombreux risques associés à la mise en œuvre de l'IA

Le but de l'IA est d'analyser une structure de données et, compte tenu d'un ensemble de paramètres, elle doit atteindre un certain objectif. Comme le décrit John McCarthy de l'université de Stanford : "L'IA n'a pas à se limiter aux méthodes qui sont biologiquement observables" (12). Cela signifie que pour qu'un programme d'IA aille d'un point A à un point B, il trouvera le moyen le plus simple et le plus efficace d'atteindre cet objectif tout en respectant les règles exactes mises en place par les auteurs du programme. Ces règles ou commandes exactes sont en fait ce qui rend l'IA si dangereuse (13). Lors de la programmation d'une technologie d'apprentissage automatique, tout doit être pris en compte, car de légers oublis peuvent facilement entraîner des résultats biaisés, des préjugés, voire des dommages humains. Une étape supplémentaire concerne la géopolitique entourant les futures "superpuissances de l'IA" (14) et les préoccupations liées à la façon dont les nations choisissent de réglementer ce qui constitue une utilisation équitable de cette technologie.

D'un point de vue global, la plupart des directives concernant la technologie de l'IA sont créées par les pays plus développés. L'étude d'Anna Jobin sur les principes et les lignes directrices éthiques entourant l'IA a révélé que "les pays d'Afrique et d'Amérique du Sud ne sont pas représentés de manière indépendante dans les organisations internationales ou supranationales" (15), ce qui a essentiellement prédéterminé leur faible candidature pour devenir un futur leader dans la technologie de l'IA. La puissance géopolitique d'une nation à l'avenir sera très probablement directement corrélée à son développement technologique, et plus particulièrement aux logiciels d'IA. Dans le monde actuel, les États-Unis et la Chine sont des leaders mondiaux à cet égard et des candidats prometteurs pour détenir ce pouvoir à l'avenir (16). Une révolution de l'IA obligera de nombreux pays en développement à s'engager dans des options alternatives lorsqu'il s'agira d'acheter des technologies d'IA aux puissances économiques. Ces options alternatives peuvent inclure la formation d'alliances mondiales pour recevoir et acheter la technologie des leaders mondiaux.

L'émergence d'une problématique de dépendance, donc de guerre économique

Avec les alliances vient également la discussion de traités et de règlements mondiaux sur l'intelligence artificielle, propulsant les perspectives de ces puissances économiques à l'échelle mondiale. Comme le dit le Dr Kai-Fu Lee, PDG de Sinovation Ventures, " [les pays] seront obligés de négocier avec le pays qui leur fournit la plupart de leurs logiciels d'intelligence artificielle" (16), exprimant ainsi la dépendance et les alliances économiques potentielles formées par cette technologie révolutionnaire. Ces alliances ont le pouvoir d'influencer les décisions mondiales uniquement en fonction du maintien de l'approvisionnement technologique de ces pays dépendants. Le pouvoir de ces relations économiques s'est déjà manifesté lors d'événements tels que le sommet des dirigeants du G20 à Osaka (17). Les pays en développement, dont l'Inde, l'Indonésie et l'Afrique du Sud, ont boycotté la réunion dans le but d'empêcher les dirigeants économiques mondiaux d'utiliser ces pays pour "l'industrialisation numérique" (17). Les nations leaders dans le développement de l'IA comprennent l'importance d'avoir le contrôle de cette technologie. Il existe une grande concurrence économique concernant le contrôle national de cette technologie, les États-Unis, la Chine et la Russie étant en tête de cette course numérique (18). Ce contrôle peut être observé aujourd'hui avec les politiques de réglementation numérique de la Chine qui ont influencé celles du Nigeria et de la Tanzanie (19). La cybersécurité dans ces pays en développement reflète fortement celle de Pékin (19), ce qui démontre l'influence mondiale de la Chine sur la technologie de l'IA. Le déséquilibre du pouvoir détenu par un très petit nombre de pays laisse les petites nations en rade dans la discussion des intérêts économiques.

Le désir de ce contrôle sur l'IA amène les nations à former des alliances qui font de la recherche et du développement individuels sur cette technologie, ce qui a un impact considérable sur la "mondialisation de la technologie de l'IA" (18). Cette concurrence géopolitique va au-delà du simple gain économique, les nations souhaitant fortement que l'IA ait des implications dans le domaine militaire. En tant que technologie du futur, l'intelligence artificielle est déterminée à être le facteur décisif pour les armées sur le champ de bataille (18, 20). Les élections peuvent être un autre domaine où l'IA peut causer une consternation mondiale. Les bots sociaux peuvent être perçus comme des armes politiques, perturbant les algorithmes des médias pour promouvoir de fausses informations ou contribuer à la campagne d'un candidat (21). De telles tactiques ont été révélées après des élections récentes telles que l'élection américaine de 2016 et le Brexit de 2021. Les répercussions de l'utilisation de l'IA contrôlent essentiellement, sans le vouloir, la liberté d'expression des sociétés, ce qui permet aux nations et aux dirigeants politiques d'imposer subtilement un contrôle sur la liberté d'une population.

La posture offensive des entreprises nord-américaines

Ces qualités perturbatrices de l'IA ont été observées même dans des problèmes mondiaux récents. L'invasion de la Russie en Ukraine a incité de nombreuses puissances économiques mondiales à imposer des sanctions économiques. Toutefois, on peut affirmer que les sanctions imposées par des entreprises technologiques de premier plan comme Apple, Meta, IBM et d'autres (22) n'étaient pas moins, sinon plus, dommageables sur le plan économique. De même, Elon Musk et SpaceX ont envoyé des kits de satellites Starlink pour aider l'Ukraine dans le domaine de l'internet et des communications (23). Cela soulève la question de savoir qui détient le pouvoir de décision d'un point de vue mondial.

Les leaders souverains du futur ne seront peut-être pas nécessairement une nation, mais une entreprise dont les avancées technologiques lui ont permis de tirer pleinement parti d'une technologie à croissance exponentielle. Ces types d'entreprises détiennent ce que l'on appelle le "pouvoir de la plate-forme" (24). Leur potentiel économique est énorme, comme en témoignent les États-Unis, où les cinq premières entreprises en termes de bénéfices selon le S&P 500 sont toutes des entreprises technologiques (24).

Des entreprises telles qu'Apple et Microsoft sont des entreprises de consommation, elles ont donc une influence sociale directe sur une population par le biais de la publicité et des produits. Cela donne une portée massive à ces entreprises mondiales géantes qui, à leur tour, permettent une grande influence sur une population sans l'intégration des gouvernements. Cet effet est encore amplifié par les algorithmes qui peuvent faire de la publicité et disperser des informations de manière incontrôlable.

Ces affirmations audacieuses concernant l'impact de l'IA sur notre société découlent d'une transition importante qui se produit actuellement dans notre monde. Le stockage en nuage et les autoroutes de données commencent à remplacer les modèles économiques conventionnels de conteneurs d'expédition et de stockage en entrepôt pour les ressources clés (20). Les données sont devenues la ressource la plus recherchée de toutes, et la connaissance associée aux données s'accompagne certainement d'un nouveau pouvoir.

Une autre perspective de la puissance de l'IA peut être observée avec la technologie de reconnaissance faciale de la Chine. La technologie de surveillance de précision en Chine a la capacité de surveiller et d'identifier les citoyens qui, avec de mauvaises intentions, peuvent être utilisés comme une "arme de guerre" (25). Cette nouvelle technologie a également fait de la Chine la capitale économique des nouvelles technologies de surveillance, avec une valeur de marché de 6,4 milliards USD en 2016 (26). Bien que ce pouvoir autoritaire puisse être exagéré par rapport à la capacité réelle actuelle de cette technologie de surveillance, le potentiel d'un tel développement suscite la crainte d'une future surveillance mondiale et certainement d'une utilisation non éthique.

Les véhicules autonomes sont un autre sujet largement abordé lors des discussions sur les risques de l'IA. À l'ère du piratage, la complexité d'un système est directement liée au "désordre social qu'il est possible de créer" [27]. L'arsenalisation de ces véhicules offre la possibilité de contrôler complètement un seul véhicule ou une flotte de véhicules automatisés dans le but de causer des dommages humains, matériels et autres. Du point de vue des fabricants, la responsabilité associée à la création d'une technologie qui a le potentiel de causer des dommages en raison d'erreurs de programmation ou d'intentions malveillantes augmente encore le risque pour ces entreprises en raison d'une perte de confiance et de réputation de la société (27). Bien que le gain économique des véhicules autonomes soit positif et que les coûts du matériel devraient diminuer au début des années 2030 [28], les préoccupations actuelles concernant la cybersécurité, les questions juridiques et les polices d'assurance doivent être abordées avant de prendre de nouvelles mesures.

La nécessité d'une éthique mais ses limites selon les secteurs d'emploi

La création d'une éthique et de lignes directrices concrètes pour la technologie de l'IA est essentielle pour implanter pleinement cette technologie dans la vie quotidienne. Bien que nous ayons abordé les nombreuses préoccupations que suscite cette technologie, les avantages économiques et technologiques sont certainement souhaitables. Les soins de santé offrent de nombreuses possibilités de mise en œuvre de l'IA et, bien que les tests n'en soient encore qu'à leurs débuts, les premiers résultats ont montré que l'IA a de grandes chances de prospérer dans ce domaine. Incontestablement, pour un domaine fortement axé sur les soins aux patients et la confidentialité, ces directives et réglementations doivent être mises en place avant un engagement global en faveur d'un système de soins de santé assisté par l'IA.

La mise en œuvre de l'intelligence artificielle dans les soins de santé révèle les complexités économiques qui peuvent être associées à cette technologie. En général, l'IA dans le secteur de la santé peut être perçue comme un avantage économique étant donné que le coût du logiciel est essentiellement nul (29, 30). Les ramifications découlent des coûts associés au fonctionnement de l'intelligence artificielle aux côtés ou indépendamment des cliniciens (29), (31). Les applications récentes de l'IA dans le secteur des soins de santé comprennent la chirurgie, l'imagerie clinique, le jugement clinique assisté et la prédiction de l'échec des essais cliniques (32). L'IA mise en œuvre dans ces pratiques a démontré une sensibilité suffisante pour être considérée comme pratique dans un environnement réaliste (31). À partir d'un échantillon de données, le logiciel peut analyser efficacement et présenter des étapes cliniques logiques pour aider les patients à répondre à leurs besoins médicaux. Ces applications créent également de nouveaux emplois liés à la maintenance et au support du logiciel d'IA et de tout matériel supplémentaire.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) prévoit que les emplois créés dans le secteur de la santé seront d'environ 40 millions d'ici à 2030 pour aider les populations vieillissantes et combattre les maladies non transmissibles (32, 33). Le rôle de l'IA pourrait très bien être d'aider les travailleurs de la santé dans leurs tâches quotidiennes, réduisant ainsi la charge de travail et permettant un meilleur retour sur investissement pour la prospérité économique et la santé. Une grande préoccupation concernant l'IA dans les soins de santé est la question éthique de la vie privée [34]. La sécurité des données à l'ère de l'internet est fortement menacée par l'introduction de l'IA. Les antécédents médicaux et les tests quotidiens sont des données typiques qui aident les logiciels d'IA à créer un plan d'action médical impartial. Plus les données fournies pour l'analyse sont nombreuses, plus le programme peut élaborer des solutions rapidement et efficacement.

Cette distribution de données sur les patients est une information très sensible qui rend nécessaire l'élaboration de lignes directrices sur la manière dont l'IA doit être utilisée dans le secteur de la santé. L'ajout de l'IA entraîne également de nombreux coûts indirects. Si les solutions peuvent être produites à un rythme plus soutenu, cela signifie que davantage de ressources seront utilisées. En outre, il y aura certainement encore des faux positifs, des surdiagnostics ou des découvertes fortuites que le logiciel pourra fournir, et ce à un rythme accru. Il en résulterait une augmentation des coûts pour les patients, ce qui aurait un impact considérable sur les pays à revenu faible ou moyen inférieur.

Ces pays peuvent déjà être désavantagés sur le plan économique lors de la mise en œuvre de l'IA dans le secteur des soins de santé en raison des coûts matériels associés nécessaires pour intégrer l'IA dans leurs hôpitaux et cliniques. L'IA dans le secteur des soins de santé n'en est qu'à ses débuts et la compréhension de la multitude de variables associées à son impact économique nécessite une analyse très complète [29-31]. Bien qu'il existe de nombreux avantages économiques et sanitaires potentiels associés à la mise en œuvre de l'IA, les préoccupations politiques, sociales et technologiques actuelles de ce logiciel l'emportent sur les gains potentiels [32]. Si l'inclusion future de l'IA dans le secteur de la santé est souhaitée, des cadres éthiques et des directives de collecte de données doivent être créés pour superviser l'utilisation de ce logiciel [34, 35].

Mais ce qui est maîtrisable en termes d’éthique quand on parle de la santé ne l’est pas forcément dans d’autres domaines où les possibilités de manipulation de la connaissance sont beaucoup plus difficiles à cadrer en termes d’éthique. Prenons le cas des sciences humaines et des polémiques qui existent dès à présent sur la manière de présenter l’histoire de tel ou tel pays. La question du génocide des peuples indiens par les colons dépend de la manière dont la connaissance va être corrélée à l’usage de l’intelligence artificielle. Or il est évident que ce point très sensible de l’histoire américaine est très peu documenté aux États-Unis. L’histoire du XXe siècle et du début XXI démontrent que l’establishment n’a aucune envie de voir figurer ce point de repère cognitif dans le narratif de l’Histoire de leur pays. La démarche de Watson d’IBM a déjà mis en exergue la manière dont on charge la connaissance et quelle connaissance… Le chatGPT s’inscrit dans la même problématique.

La puissance de l'IA ne fera que croître à l'avenir. Le gain potentiel de cette technologie devrait stimuler la croissance économique mondiale et améliorer la qualité de vie générale. Grâce à une intégration adéquate de l'IA, les nations désireuses d'appliquer cette technologie bénéficieront des avantages associés à l'intelligence artificielle dans un avenir proche. Cependant, nous devons reconnaître les clivages politiques et sociaux qui peuvent survenir avec le développement de la technologie. Il est nécessaire de comprendre les répercussions de l'exposition d'une technologie révolutionnaire à des millions de personnes, de gouvernements et d'armées pour s'assurer que cette technologie est utilisée pour améliorer la vie des gens.

Said Serrah auditeur de la 40ème promotion MSIE de l'EGE

Notes