En droit des affaires, comme dans tous les autres domaines juridiques, avant de saisir les tribunaux, il est toujours préférable de privilégier les voies de recours à l'amiable ou alternatives comme la médiation et la négociation. En cas d'échec de toutes ces voies, il est alors toujours possible de faire appel à un avocat et de saisir la juridiction compétente. Celle-ci dépend du lieu de passation du contrat, mais surtout du fond du contentieux. Le droit des affaires recouvre en effet plusieurs domaines juridiques. C'est cette complexité qui rend le master en intelligence juridique si coté dans le monde des affaires.
Cas d'utilisation des voies de recours en droit des affaires
Selon le domaine juridique concerné par le litige, la juridiction compétente pour le traiter pourra être différente. Par exemple, selon que le fond du litige concerne le droit de la consommation, de la concurrence, des sociétés, ou encore simplement le droit du travail ou, plus souvent, le droit de la propriété intellectuelle. Il est donc important de savoir quelles situations peuvent mener à un recours avant d'entamer des démarches longues et parfois coûteuses.
Dans la majorité des cas, il s'agit en droit des affaires de litiges contractuels. Par exemple, la réception d'une marchandise différente de celle commandée, non conforme, voire défectueuse. Mais aussi les différends concernant tous les points mentionnés au contrat signé entre les parties, comme le délai de livraison par un fournisseur, des factures impayées par un client, la découverte après coup d'une clause abusive...
Le contentieux peut aussi concerner, plus rarement, une concurrence a priori déloyale, définie comme l'utilisation par un concurrent de pratiques illégales, telles que le dénigrement ou la diffusion de fausses informations, voire carrément de la contrefaçon. Ici, après médiation, ce sera l'autorité de la concurrence, voire la direction générale de la répression des fraudes, qui se chargera de connaître du litige.
Le droit des affaires étend aussi ses racines du côté du droit administratif et fiscal, lorsqu'il s'agit de propriétés immobilières, dont un permis de construire est refusé ou retardé, ou lorsqu'un litige oppose l'une des parties au fisc. Un tribunal administratif sera compétent pour trancher ces contentieux, qui opposent bien souvent une partie privée à un organisme gouvernemental ou public (un maire, un préfet, les services des impôts...).
En interne, enfin, de nombreux litiges peuvent naître entre associés et actionnaires dans les cas de non-respect des droits de ces derniers ou de désaccord avec une décision prise par une assemblée générale. Bien souvent, le meilleur moyen reste la négociation et la discussion, mais un recours devant les prud'hommes en cas de licenciement abusif ou devant une assemblée générale exceptionnelle peut aussi intervenir.
Classement des voies de recours extraordinaires
Si aucun recours à l'amiable ou devant la juridiction compétente en premier ressort n'a donné satisfaction, il existe des voies de recours dites extraordinaires. Limitées à certains cas particuliers et s'intéressant plus souvent à la forme qu'au fond, elles permettent de manière exceptionnelle de corriger une erreur de droit à la base du conflit, et ainsi d'annuler ou de changer la décision des juridictions de première instance. Ces voies de recours, si elles ne sont pas nombreuses, couvrent en revanche toutes les situations, de la simple correction d'une erreur matérielle sans conséquence à l'abrogation d'une loi rétroactive aux lourdes répercussions nationales.
Le pourvoi en cassation
La Cour de cassation, plus haute juridiction française dans la hiérarchie, permet à un justiciable dont toutes les voies de recours ont été épuisées de pointer le dysfonctionnement de la procédure ou de la loi elle-même. La Cour de cassation ne juge donc pas les faits du litige, mais permet en droit des affaires de s'assurer que le litige a bien été traité conformément à la loi et que sa procédure légale a bien été respectée.
La Cour de cassation intervient donc après une décision définitive des juridictions compétentes, comme la cour d'appel ou les prud'hommes. Elle doit être motivée par la suspicion d'une erreur de droit, une violation de la procédure légale ou par l'absence pure et simple de base légale, et doit être saisie dans les deux mois suivant la décision attaquée.
En droit des affaires, une cassation peut donc intervenir lorsqu'une entreprise est condamnée par exemple à payer des dommages et intérêts à une autre pour concurrence déloyale, alors que les pratiques jugées déloyales ne correspondent à aucune pratique légalement répréhensible. Dans ce cas, la Cour de cassation n'examinera pas l'existence de telles pratiques qui sont réputées avérées, mais bien leur légalité. Si elle estime qu'elles sont légales, la concurrence déloyale n'existe donc plus rétroactivement.
Dans le cas d'un pourvoi en cassation, il faut cependant savoir que cette procédure intervenant en toute fin de parcours judiciaire, elle peut donc constituer le point final de plusieurs années de bataille juridique. La moyenne actuelle de la durée d'un procès, depuis les juges du fond jusqu'à la cassation, est de six ans.
Tierce opposition
La tierce opposition est une procédure extraordinaire jusque dans son fond et sa forme. Elle permet à une personne extérieure au procès de faire valoir ses droits devant une juridiction. Pour cela, elle doit cependant démontrer qu'elle subit les conséquences de la décision rendue. Il s'agit souvent de procédures concernant des créanciers d'une société condamnée à payer une certaine somme d'argent, ou d'un tiers lié par contrat avec une société condamnée à la nullité de ses contrats. Ces tiers peuvent donc, sans être partie du procès, faire valoir leurs droits par la suite. Les procédures de tierce opposition les plus courantes sont celles qui interviennent après la liquidation judiciaire d'une société.
Pour être recevable devant une juridiction, le tiers opposant devra avoir un intérêt à agir et donc prouver qu'il a subi un préjudice (financier ou moral) du fait de la décision des juges de condamner la société. Le cas échéant, il devra faire appel à un avocat du Conseil d'État ou de la Cour de cassation pour former le recours, dans les deux mois suivant la décision des juges.
Le recours en révision
Le recours en révision interviendra aussi après que les juges de premier ressort aient rendu leur jugement. Mais à la différence de la cassation, c'est de nouveau le fond de l'affaire qui sera examiné, à la lumière de nouveaux éléments. En effet, la procédure de révision permet de demander la réouverture du procès après la découverte de nouveaux éléments qui pourraient, s'ils avaient été produits plus tôt, avoir changé l'issue du procès. En droit des affaires, cette procédure intervient souvent dans les affaires de fraude ou de faux témoignage. Même plusieurs années plus tard, une entreprise injustement condamnée peut donc demander la réouverture du procès si elle a entre les mains la preuve d'une potentielle erreur judiciaire. La demande devra être effectuée devant la juridiction qui a rendu la décision initiale. Si les juges estiment que ces nouveaux éléments sont de nature et d'importance à faire changer le cours du procès, celui-ci sera rouvert et la décision initiale sera annulée de manière rétroactive.
La question prioritaire de constitutionnalité (QPC)
C'est un recours plus exceptionnel qu'extraordinaire, mais dans de rares cas, il peut intervenir en droit des affaires. Notamment sur des questions de propriété privée, de droits de la défense, de principe de non-rétroactivité, et surtout de la liberté d'entreprendre. La QPC permet à un justiciable victime d'une loi qu'il estime contraire à la Constitution de soumettre cette question au Conseil constitutionnel. Par exemple, une société à qui un tribunal imposerait le respect d'une loi très restrictive sur une activité bien spécifique pourrait estimer qu'une telle restriction, injustifiée, limite la liberté d'entreprendre de l'entreprise. Celle-ci étant garantie par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la question devra être menée devant le Conseil.
Cette procédure est très lourde. Elle oblige les juges de première instance à faire une pause dans le procès, pour saisir le Conseil d'État. Il la transmettra à son tour au Conseil constitutionnel, qui tranchera la question. Une fois sa décision rendue, celle-ci est irrévocable, et le procès en pause pourra reprendre. La décision du Conseil peut avoir de lourdes conséquences, notamment lorsqu'une société a été condamnée à verser des sommes d'argent. Si la QPC aboutit à l'abrogation de la loi en question, alors toutes les procédures basées sur cette loi deviennent caduques.
Le recours en rectification d'erreur matérielle
Le recours pour rectification d'erreur matérielle permet enfin de demander la correction d'une erreur dans la procédure, sans que cela ne change en rien la décision finale. Par exemple, une entreprise condamnée à une amende en fonction de son chiffre d'affaires pourra demander la rectification de la somme sur laquelle l'amende est basée, si elle peut démontrer que son chiffre d'affaires est en réalité plus bas.
Dans la majorité des cas, ce recours n'est utilisé que pour des raisons de précision, pour corriger des erreurs de frappe, des dates ou des calculs. En tout état de cause, aucun des changements effectués ne pourra avoir une incidence sur le fond de l'affaire. Pour cela, il faudra faire appel aux voies de recours vues plus haut.