Le nécessaire encadrement de la sûreté des collaborateurs européens au Sahel

Les risques au Sahel sont corrélés les uns aux autres, notamment quand il s’agit de politique et de sécurité. Les populations sont les principales victimes de ce contexte instable, ce qui entraine indéniablement des facteurs de risques sociaux et économiques comme la famine ou la chute du marché extérieur. Les entreprises étrangères implantées dans l’arc de crise sahélienne sont donc également directement impactées, et plus particulièrement leurs collaborateurs. Ces derniers doivent suivre un règlement strict pour assurer leur sécurité, notamment un contexte de moins en moins favorable à une présence occidentale sur le territoire.

Les collaborateurs de grands groupes ont donc la particularité favorable d’avoir un protocole d’entreprise, et parfois même une escorte armée là où d’autres métiers sont plus à risques comme le journalisme ou les actions humanitaires.

Il est désormais impératif de pouvoir protéger les collaborateurs des enlèvements et des attaques, notamment les ressortissants n’appartenant pas à une multinationale ou une ONG de taille, qui sont des cibles faciles pour obtention d’une rançon.

Le paiement d’une rançon est l’un des seuls moyens d’obtenir la libération d’otages mais pose dans certains cas une question d’éthique, comme à Séoul où le gouvernement a admis à demi-mot avoir versé une somme d’argent aux talibans à la suite de l’enlèvement de 19 ressortissants sud-coréens en 2007. Cet argent aura servi à l’achat d’armes et au financement d’attaques suicides d’après un chef taliban.

Une insécurité croissante pour les collaborateurs occidentaux au Sahel

L’accumulation des différentes crises sahéliennes oriente la région vers des problématiques d’avantage humanitaires et politiques. Les pertes humaines sont nombreuses dans le conflit, ce qui entraîne des flux migratoires importants vers les pays les « moins touchés » de la zone. Ces flux migratoires compliquent le développement économique du pays les accueillant du fait de la difficulté à anticiper les flux et à maintenir, malgré cela, une activité économique normale dans le pays.

Étant donnée la situation sécuritaire volatile dans les pays de la zone Sahélienne, les entreprises occidentales doivent faire face à des risques sécuritaires et politiques grandissant et imprévisible. De plus, l’entreprise doit prendre en compte l’éventuelle risque réputationnel que ce soit dans la région ou en Occident ; il est important que les agissements de ladite entreprise ne nuisent pas à son image.

Il touche principalement les populations locales ainsi que les forces armées impuissantes, face à la situation sécuritaire du pays. De plus, les entreprises occidentales sont également impactées dans leur business en raison de ces différents conflits.

Face à l’instabilité politique, les entreprises doivent parvenir à capter les signaux faibles pouvant alerter un potentiel risque de dégradation de la situation pouvant nuire à leurs activités. Les fluctuations politiques de la région peuvent avoir des impacts sur la sécurité et la sûreté des collaborateurs occidentaux présent dans le pays, leur activité ainsi que sur la réputation de l’entreprise. Le risque politique est néanmoins multiforme et difficile à anticiper : un coup d’État, l’instauration d’une junte militaire ou encore le résultat d’une élection sont autant de possibilités de déstabilisation politique. Le risque politique peut parfois être lié à une question de perception ; par exemple, l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient connaissent à la fin des années 2000 une brutale chute du sentiment de bien-être des populations, alors même que les indicateurs macro-économiques étaient positifs[i].

L’apparition de nouveaux conflits opposant les différents État de la zone Sahélienne à des groupes terroristes entraine de nouveaux risques pour les entreprises qui doivent continuer de protéger leurs opérations en assurant la sécurité de leurs collaborateurs. Il est nécessaire d’ajouter à cela la prise en compte de la dimension géopolitique des confits.

Parmi les 21 pays les plus pauvres au monde (en PIB/habitant en 2022), tous sont issus du continent africain, et trois d’entre eux (Niger, Tchad et Burkina Faso) font partie de la zone sahélienne[ii].
Dans les pays les plus pauvres, en raison de la difficulté à vivre avec les très faibles revenus perçut, les risques de soulèvements populaires peuvent entrainer de graves crises politiques. Ces soulèvements populaires peuvent avoir, par exemple, pour conséquence un arrêt partiel ou total des activités d’une entreprise pendant des mois. Le ralentissement de l’activité économique ainsi que de la production impacte alors les exportations et les rendements. Cette instabilité rend plus difficile le fait d’attirer des investissements étrangers et donc, de développer l’industrie dans les pays de la région du Sahel. 

La perception du risque politique par les entreprises occidentales devient alors une composante essentielle avant toute décision de départ à l’étranger. Il est de plus en plus compliqué pour les entreprises d’assurer ls dates prévues dans les contrats, ce qui, à terme, entraine des pertes pour l’entreprise. De plus, dans un contexte de soulèvement populaire, pouvant dégénérer très rapidement, il est de plus en plus difficile pour les entreprises de mettre en place des stratégies de sûreté et de sécurité suffisante pour les collaborateurs ainsi que pour les biens de l’entreprise.

Parallèlement, aux risques politiques, les risques sécuritaires se répéter avec une occurrence de plus en plus rapprochée.

La fragilité des démocraties sahéliennes, le contexte politique instable, se caractérise par des coups d’États menant régulièrement le pays à être dirigé par une junte militaire. Cette instabilité en termes de sécurité, se fait majoritairement ressentir dans les régions éloignées du pouvoir central (la capitale du pays). Ces régions vivent principalement de l’exploitation minière, première économie dans la majorité des pays sahéliens. L’instabilité menant à l’insécurité, cette situation a contraint certains acteurs économiques à renforcer leur sécurité liée aux sites et aux effectifs rendant ainsi l’exploitation plus contraignante et moins rentable voire au retrait de l’entreprise du site d’exploitation, comme l’entreprise indienne Balaji qui arrête l’exploitation du gisement d’or d’Inata au Burkina Faso en 2019.

Les cibles des sites miniers

Cibles privilégiées des groupes armés djihadistes, les sites miniers (particulièrement ceux du Burkina Faso) connaissent une hausse d’attaques terroristes, dû à leur isolement géographique, ainsi qu’aux nombreux déplacements sur site entraînant une plus grande vulnérabilité à la menace terroriste.

Cinq incidents majeurs ont été recensé entre avril 2015 et janvier 2019 en lien avec des sites miniers : l’enlèvement d’un employé roumain en avril 2015 par Al-Mourabitoun[iii] à Tambao (Burkina Faso) ; le kidnapping de trois collaborateurs indien, sud-africain et burkinabé près de la mine d’or d’Inata (Burkina Faso) en 2018 ainsi que l’attaque du poste de sécurité du même site ; l’attaque de la mine de Tiabongou (Burkina Faso) suivi de l’enlèvement et de l’homicide d’un ressortissant canadien en janvier 2019 par l’État Islamique dans le Grand Sahara (EIGS).

Mais c’est l’assaut contre le convoi de la SEMAFO[iv] en novembre 2019 dans l’est du Burkina Faso à Boungou qui a confirmé cette vulnérabilité et le ciblage des acteurs du secteur minier[v]. Cette embuscade a fait une quarantaine de morts parmi les employés de l’entreprise canadienne. En conséquence de cette attaque, la SEMAFO a pris la décision de suspendre ses activités sur le site, jusqu’à ce qu’elle trouve des options de sécurisation des axes routiers utilisés pour les déplacements des travailleurs. Bien que la réouverture du site ait pu se faire progressivement à partir de janvier 2020, l’entreprise Canadienne a décidé de réduire ses activités, d’acheminer une partie de ses extractions et de ses salariés par voie aérienne afin de limiter les risques liés aux transports routiers. En effet, en raison de la pauvreté, des trafics illicites, et du djihadisme, les pays de la zone Sahélienne sont de plus en plus enclins aux attaques durant les déplacements routiers. Ces derniers peuvent prendre différentes formes, barrage de routes, racket, attaques terroristes…

Le fossé s’élargit entre les autorités et les populations

L’instabilité générale des pays du Sahel est peu propice aux échanges sur les marchés économiques. Au Mali par exemple, les tensions et mobilisations politiques de juin 2020 ont creusé le fossé entre le pouvoir exécutif et la population conduisant ainsi au coup d’État militaire d’aout 2020.

Ce revirement politique n’a pas été sans conséquence pour les acteurs économiques opérant dans la zone, puisque s’en sont suivies des sanctions de la CEDEAO à l’encontre du Mali menant à la fermeture des frontières terrestres et aériennes pendant près d’une semaine ; seuls les produits de première nécessité ont pu transiter.

Le groupe Bolloré Transport & Logistics a, par exemple, subi de plein fouet les conséquences des évènements maliens : des frais supplémentaires de stockage des marchandises dans les ports aux frais du transporteur et des retards de livraisons.

L’instabilité politique, économique et sécuritaire favorise grandement l’évolution de l’économie informelle. En raison des différents conflits dans la zone, le passage des frontières ou le dédouanement des marchandises sont possibles, grâce à des pots de vins. Cependant, toute entreprise française étant soumise à la loi Sapin 2 dans le cadre de la lutte anti-corruption, n’a légalement pas le droit d’utiliser ce genre de pratique sous peine d’être sanctionner par la justice. L’économie souterraine est vectrice de corruption, de risque sécuritaire, ce qui pousse alors le pays concerné à rentrer dans un cercle vicieux dont il est difficile de sortir[vi]. La fragilité des démocraties locales ainsi que la « culture du pot de vin », est compliquée à faire disparaitre des traditions locales.

La volonté des différents pays du Sahel à sortir de la corruption s’est souvent traduit par des manifestations violentes. Pendant ces manifestations, un sentiment anti-occidental et plus particulièrement anti-français grandissant a pu se faire ressentir. En réponse à ce climat d’insécurité et au risque pour les collaborateurs occidentaux d’être pris à parti par des manifestants, les entreprises implantées dans les pays concernés ont dû prendre des mesures de sécurité pour leur employé. Ces mesures se sont traduites par un aménagement du temps de travail pendant la période des manifestations et, dans les cas le plus extrêmes, les entreprises sont pu faire le choix de faire sortir les collaborateurs du pays.

Le risque réputationnel d’une entreprise est également important. En effet, c’est cette réputation qui permettra aux entreprises d’être plus ou moins visées lors des manifestations anti-occidentales. Ces contestations civiles à l’encontre d’entreprises sont finalement des actions purement politiques à visées économiques, sociales et/ou en réaction à la politique extérieure de certains états. 

L’étude des manifestations au Mali, au Niger et au Burkina Faso démontre une récurrence de celles-ci entre janvier 2013 et décembre 2020. Sur les quatorze grèves et mobilisations recensées contre des opérateurs économiques, onze ont eu lieu au Niger et neuf ont ciblé directement l’entreprise française Areva entre 2013 et 2015. Cette hausse d’évènements est due au contexte de renégociation des contrats entre Areva et l’État nigérien.

La stigmatisation anti-française

Les discours anti-français se multiplient lors des manifestations : « A bas la France ! », « France dégage » sont des slogans qu’il n’est plus rare d’entendre. Au Mali par exemple, ce revirement de situation face à l’Occident, est dû à la colère du peuple face au soutien de la France aux gouvernements en place avant le coup d’État, jugé inefficace par cette même population : « Le président ne peut pas être clair, tous les présidents africains, c'est la France qui les élit, ils sont à la merci de la France » dénonce un manifestant[vii].

La présence des militaires français était autrefois appréciée comme en 2013, lors de l’opération SERVAL avait repoussé les djihadistes pour protéger la capitale malienne. Aujourd’hui, la population reproche à l’Occident de ne pas réussir à vaincre les djihadistes, mais aussi, de ne s’être concentré que sur les enjeux sécuritaires liés au djihadisme et non sur les violences ethniques internes au pays.

Les manifestations anti-français sont souvent violentes, des véhicules sont brulés, des bâtiments dégradés et représentent un risque majeur pour la sécurité des collaborateurs. Le témoignage d’une expatriée française au Mali en est la preuve : « Ça fait un an et demi que je suis au Mali, c'est la première fois que j'ai senti les gens hostiles à mon égard » ; elle expliquera aussi avoir été suivie et insultée en sortant de l’ambassade et affirme ne pas être la seule collaboratrice dans cette situation qui pourrait s’aggraver en violence physique[viii] si l’entreprise de laquelle elle dépend ne met pas en place plus de mesures sécuritaires.

Malgré ce sentiment anti-occidental, Mohammed Bazoum, le président du Niger appelle à un engagement « massif et plus résolu » des forces françaises et européennes contre les terroristes djihadistes[ix].

Dans un contexte encore plus instable suite au retrait du Mali du G5 Sahel et la fin de l’opération BARKHANE au Mali, cette déclaration ne fait que nourrir des violences qui s’insèrent dans la guerre informationnelle en cours. Cette guerre informationnelle, positionne la présence militaire française au Mali comme quelque chose de néfaste pour le pays. Ce fut le cas par exemple lorsque l’État Malien accusa la France du massacre de Gossi, ce à quoi la France répondit par une vidéo montrant ce qu’il semble être des miliciens russes en train d’enterrer des corps. Suite à cette publication filmée par un drone français, le Mali accusa la France d’espionnage et de violation de l’espace aérien malien. La mission des Nations Unies (MINUSMA) demanda alors, en vain, de pouvoir se rendre sur place afin de pouvoir enquêter et faire toute la lumière sur ce qui s’est réellement passé[x].

La menace anti-occidental est plus précisément anti-française, est aujourd’hui un risque majeur pour la sûreté des collaborateurs dans ces pays : elle est étroitement liée aux risques politiques et sociaux, aux risques sécuritaires et aux risques liés aux transports. Comme évoqué précédemment, la fragilité des régimes politiques locaux, l’extrême pauvreté de la zone, les institutions sécuritaires dégradées ainsi que les enjeux économiques, sont autant de risques à prendre en compte lors de la décision de départ en mission pour un collaborateur. En effet, des entreprises occidentales bien implantées ont été victimes de dégradations massives (Eiffage ou Total par exemple). Il est donc impératif que les collaborateurs concernés se réfèrent aux consignes données par leur entreprise, ainsi qu’aux recommandations de l’ambassade dont ils dépendant pour ainsi limiter au maximum les risques encourus durant leur mission.

Une menace hétéroclite dans le développement des arcs de crise

Le contexte global dans la zone sahélienne a légitimé l’intervention d’une aide humanitaire mondiale afin d’aider les populations locales dans leur développement. Les nombreuses interventions militaires extérieures comme BARKHANE pour la France ou les Opérations de Maintien de la Paix de l’ONU ont également appuyé la présence de journalistes au Sahel.

Le Bureau de Coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) s’inquiète du nombre grandissant d’incidents dans la zone des trois frontières. La zone des trois frontières est la zone frontalière entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Zone tenue par des djihadistes ou des combats ainsi que de nombreux trafics illicites se déroulent. Début 2021, les organismes humanitaires avaient recensé au moins 292 incidents ayant causé la mort de 650 personnes ; selon l’OCHA, cette violence a de « graves répercussions sur les moyens de subsistance fragiles et la capacité des personnes à subvenir à leurs besoins »[xi].

Afin d’aider les services étatiques locaux, des ONG sont présentes au Sahel et essayent d’apporter une aide humanitaire conséquente.

Cette aide est malheureusement soumise aux aléas sécuritaires de la région sahélienne et il est de plus en plus fréquent que des humanitaires soient kidnappés.

Début 2017, le Sahel recensait 4 enlèvements d’humanitaire en moins d’un an[xii].

Le cas particulier de Béatrice Sockly :

Béatrice Stockly est une Suisse installée dans la région de Tombouctou depuis plusieurs années. Cet enlèvement de l’humanitaire avait marqué les esprits du monde occidental puisqu’il s’agissait d’un premier enlèvement d’Occidental au Mali depuis celui des journalistes Ghislaine Dupont et Claude Verlon de la radio RFI en 2013 à Kidal.

Béatrice Stockly avait déjà été kidnappée en 2012 dans la même région par des djihadistes et avait été libérée peu de temps après grâce à une médiation du Burkina Faso. Certaines sources affirment également le versement d’une rançon pour sa libération, ce qu’un médiateur burkinabé avait démenti.

Très bien intégrée, l’enlèvement avait soulevé la colère de la population locale qui reprochait à leur force de sécurité de ne pas assez agir et de manquer à leur devoir de protection des biens et des personnes : « Tout est fait dans l’à-peu-près. Les patrouilles et même les opérations d’escorte ne sont que du tape à l’œil. Mais nous ne sommes pas dupes » témoigne Askia Mohamed, un ancien guide touristique[xiii].

Cette déclaration remet en cause le système d’escorte de sécurité très souvent utilisé pour les collaborateurs dans les zones à risques. Les entreprises ont le choix de signer un contrat avec les forces ou entreprises locales ou alors de faire appel à des entreprises étrangères.

Les humanitaires, des cibles « faciles » :

« Ce sont des cibles faciles » se désole un diplomate à Ouagadougou. Pour les groupes criminels, et djihadistes, les humanitaires sont vulnérables et constituent une aubaine.

« La montée en puissance d'Aqmi, en 2012, au Mali, est liée en grande partie à l'accumulation des rançons »
Yvan Guichaoua[xiv]

Les systèmes de rançon constituent un réel business pour les djihadistes et aurait même permis au groupe AQMI d’accumuler des dizaines de millions d’euros et de pouvoir ainsi s’imposer face à d’autres groupes armés.

D’après Yvan Guichaoua, les terroristes se rabattent sur les profils humanitaires puisqu’ils n’ont plus le cadre de grandes multinationales (comme en 2010 avec Areva) puisque toute entreprise qui contractualise leurs relations avec des expatriés a renforcé leurs dispositifs de sécurité. Les grosses ONG, elles, déploient des stratégies sécuritaires sur lesquelles elles restent très discrètes. Elles essayent d’avoir un dialogue régulier avec tous les acteurs du conflit pour expliquer leurs objectifs ; une source humanitaire au Niger confirme : « Notre sécurité est en grande partie basée sur notre "acceptabilité", autrement dit notre capacité à nous faire accepter par les porteurs d'armes qui contrôlent une zone donnée comme une organisation neutre et impartiale ». Yvan Guichaoua ajoute que la pêche aux informations des humanitaires se fait de manière totalement volontaire et que, grâce à des intermédiaires, elles vont réussir à parler à de grandes figures du djihadisme : « Si elles veulent faire leur boulot, elles sont obligées d'avoir des accords explicites ».

La libération d’otages peut se faire sur un temps très long, il faut s’assurer que l’otage est bien un ressortissant de notre pays, qu’il est vivant, puis les services de renseignements et les armées se mettent d’accord avec le pays dont dépend le ressortissant sur la marche à suivre. Il est important de bien prendre en compte que tous les États ne s’engagent pas dans la libération de leurs otages. La France, quanta elle, tentent systématiquement de libérer ses otages.

Après la mort de deux journalistes espagnols au Burkina Faso et l’enlèvement d’Olivier Dubois, journaliste français spécialiste du sahel, exercer la profession devient de plus en plus risqué. Soumis aux pressions, à l’intimidation, à l’impossibilité d’accéder à certains territoires ou certaines sources, les journalistes sont constamment sous tension et sur leurs gardes.

C’est un métier à haut risque, souvent exercé « la peur au ventre » d’après nombre d’entre eux. Ils parlent également des manques de moyens, des pressions et intimidations parfois même du gouvernement, qu’il est donc de plus en plus dur d’informer les populations sur la situation sahélienne[xv].

La dangerosité du métier de journaliste

Le journaliste Olivier Dubois, âgé de 46 ans et spécialiste du Sahel qui y travaille depuis 2015 est apparu en mai 2021 dans une vidéo où il dit avoir été enlevé début avril par un groupe affilié à Al-Qaida dans le Nord-Est du Mali, à Gao. Il avait rendez-vous avec Abdallah Ag Albakaye, commandant d’un groupe djihadiste de la région.

Les différents enlèvements et homicides rappellent aux journalistes présents sur place combien leur métier est exposé aux risques de la région mais que cela « n’entame pas leur volonté de couvrir l’actualité » confie Salif Zangre, un journaliste reporter d’images (JRI) burkinabé. Le témoignage anonyme d’un journaliste burkinabé du Nord en poste à la frontière malienne affirme qu’il est désormais presque impossible de faire du terrain au-delà des villages environnants.

Tout comme les humanitaires, les journalistes sont des cibles de choix.

D’après Reporters Sans Frontières (RSF), le Burkina Faso statue à la 37e place au classement mondial de la liberté de la presse en 2021 là où le Mali figure à la 99e position. RSF salue la position du Burkina Faso la qualifie même de réussite du continent. Malgré cette fierté, RSF souligne également les vicissitudes de la presse dans les pays sahéliens comme les restrictions de mouvements et sanctions imposées par les autorités au nom de la lutte contre les djihadistes et autres tours justifiés par la pandémie de Covid19.

Les journalistes étrangers, comme les humanitaires sont des cibles faciles pour ce qu’ils représentent et leur valeur d’échange bien que les locaux soient aussi exposés.

« La vie d'un journaliste au Sahel n'est pas toujours gaie, même à Bamako : barbelés autour de la maison, précautions à prendre dehors »
Serge Daniel, correspondant à Bamako de RFI et de l'AFP

Au-delà des risques encourus, les locaux et journalistes étrangers évoquent un sentiment de menace permanente. Organisé par CFI (l’agence française de développement des médias) et financé par l’AFD, le programme Média Sahel tient une formation sur le journalisme sensible au genre et au conflit en zone à risques. C’est lors de ce programme qu’Abert Nagreogo a évoqué différents sujets comme les enjeux des conflits armés au Sahel mais aussi la mise en place d’un système de protection des journalistes[xvi].

La protection des journalistes s’inscrit dans un contexte où certains d’entre eux expriment leur refus de signer un article ou un documentaire par peur des représailles, témoignent Bréhima Sogoba, le rédacteur en chef de la télévision privée malienne RenouveauTV ; un sentiment partagé par le responsable d’une radio communautaire malienne : « il vaut mieux tourner mille fois sa langue avant de parler ». Il ajoute « le métier est désormais à très haut risque. Les jihadistes et autres bandits écoutent très bien nos émissions » et précisent que les radios ont maintenant l’habitude de recevoir des menaces demandant aux radios de « faire attention ».

Un journaliste de la même région confie qu’il redoute surtout l’enlèvement et que sa radio n’organise plus de débat pour faute de manque de participants ; la rediffusion d’anciennes émissions est alors pour lui une autre solution.

Continuer à informer le monde sur la situation sahélienne, telle est l’envie des journalistes aujourd’hui, certains sont même prêts à risquer leur vie pour l’information.
Dans un tel contexte, rapporter l’actualité est un réel défi ; pour Bréhima Sogoba, il faut maitriser le terrain et les enjeux avant de se lancer[xvii].

« Le bon journaliste, c'est quand même celui qui vit »
Bréhima Sogoba

Des recommandations communes adoptées pour assurer la sûreté de leurs collaborateurs

Pour les entreprises, protéger leur collaborateur est un devoir mais aussi une source de tension. Envoyer un employé dans une zone à risques n’est pas sans conséquence et c’est pour cela que des recommandations communes sont adoptées pour assurer la sureté de ses collaborateurs. En effet, aujourd’hui, notre environnement économique est bercé par des échanges internationaux. Malgré les différents risques présents dans les pays (terrorisme, coups d’État, crise sanitaire…), les voyages d’affaires sont indispensables à la croissance des entreprises. Cette instabilité croissante force les pays et les entreprises à mettre en place des procédures de sécurité pour assurer la protection des collaborateurs à l’étranger. En droit positif[xviii], selon le Code du travail, certaines conventions collectives et diverses jurisprudences émanant des juridictions administratives et judiciaires, le devoir de protection des salariés est une obligation légale qui fait pression sur les employeurs[xix].

Aussi, la norme ISO 45001 mis en place en 2018, précise les exigences d'un système de gestion de la santé et de la sécurité au travail[xx]. Cependant, beaucoup d’entreprises laissent un trop grand espace entre la prise de conscience des risques et la mise en place de leurs actions. Les entreprises françaises sont habituées à s’informer à travers les médias occidentaux, ce qui les réduit à une simple vision occidentale des problèmes. Ils n’ont donc pas de vision locale et par conséquent, pas de bonne conscience du risque et pas les bonnes informations pour considérer ce risque correctement. Cela impacte leur capacité de réaction.

Par exemple, quand les manifestations anti-français ont éclaté, la France n’a pas eu conscience que la situation allait prendre une si grande ampleur et a donc mis trop de temps à réagir, laissant des Français sur place. 

Depuis 2014, le CDSE (Club des Directeurs de Sécurité des Entreprises) crée un « Baromètre de la sécurité des collaborateurs à l’international ». A peu près 300 dirigeants d’entreprises françaises sont interrogés sur la sûreté/sécurité de leurs salariés à l’étranger. En 2018, 20% des dirigeants d’entreprises françaises considéraient que l’entreprise était exposée à des risques à l’international. En 2020, nous sommes passé à 27% et 73% pensent que cette insécurité internationale représente une menace pour la France. En 2018, ils étaient 61%[xxi]. Fin 2021, c’est le risque sanitaire (59%) qui prime sur le risque accidents (27%) qui ne se retrouve qu’en seconde position devant les vols/escroqueries (16%). Pour la première fois, le risque terroriste ne se place qu’en quatrième position (14%)[xxii].

Par exemple, en 2019, les accidents de transports arrivent en tête (40%) devant le terrorisme (17%), or, seulement 5% des entreprises interrogées préparent leurs salariés aux problèmes qui peuvent se trouver sur les routes[xxiii]. Cependant, il arrive souvent que les collaborateurs n’appliquent pas les instructions données par leur entreprise.

Face à cette responsabilité pénale, certaines entreprises ont mis en place depuis une dizaine d'années des politiques internationales de sécurité. Dans la plupart des entreprises, la surveillance et l'analyse s'appuient en partie sur les types de risques généraux - y compris les risques géopolitiques, criminels, terroristes, naturels, industriels, sanitaires - ainsi que sur ceux liés aux activités de l'entreprise (agroalimentaire, bancaire, etc…). Ces politiques se transforment selon les différents risques et intérêts de l’entreprise.

Les diverses menaces peuvent aussi agir sur le moyen de transport utilisé mais aussi le choix de l’hébergement qui varie souvent en fonction de la durée du séjour. Toutes ces informations peuvent être complexes pour le collaborateur. Cela entraîne la direction sûreté à donner des supports d’informations comme des fiches réflexes des listes de recommandations ou des guides sécurité pour aider les voyageurs à mieux comprendre et éviter les différents problèmes lors de leur voyage. L’entreprise doit aussi prendre en compte que des dispositions différentes doivent être prises pour les femmes qui sont plus à risque dans les pays sensibles. En effet, « 71% des voyageuses d’affaires estiment qu’elles courent plus de risques que leurs homologues masculins »[1].

L’adaptation des mesures aux risques

Chaque destination est différente mais le Sahel fait partie des zones où la menace reste élevée et où la majeure partie des territoires sont « formellement déconseillés »[xxiv]. Il faut donc ajuster les moyens et soutiens à déployer. Tout d’abord il faut prendre en compte le but et la nature du déplacement (séminaire, mission…) et dans certains cas le caractère impératif ou non de la mission puis identifier les personnes concernées. Après validation de l’ordre de mission par le ou les supérieurs hiérarchiques, le processus de sureté peut être enclenché. Si le manageur approuve la demande de départ en mission, le collaborateur recevra un ordre de mission lui permettant de continuer le processus.

Après la réception de cet ordre de mission approuvé, le collaborateur reçoit différentes informations liées à son pays de destination. Selon l’entreprise, il peut recevoir par exemple une demande d’inscription sur Ariane, le téléchargement d’une application de tracking de mission ou l’inscription sur un site ayant le même objectif, de remplir un formulaire relatif à son déplacement (hébergement, vols, trajet sur place, personne rencontrée…) mais également une fiche pays et ou une fiche de bonne pratique. Une fois que tous les documents sont revenus complétés à la direction sureté, elle évalue en collaboration avec ses partenaires (prestataires sécuritaires) s’il est nécessaire ou non de mettre en place un support sécuritaire. Pour ce faire, une analyse est fournie par le prestataire sécuritaire à l’entreprise avec des propositions d’accompagnement relatives au déplacement. Une fois l’analyse de risque reçut le choix d’accepter ou non la proposition du prestataire revient à l’entreprise. Les prestataires peuvent récupérer les collaborateurs à la sortie de l’avion (accueil VIP) ou alors à la sortie de l’aéroport.

Un support sécuritaire peut être composé de différentes manières :

  • Un véhicule avec chauffeur formé à la conduite défensive
  • Un véhicule avec chauffeur et garde non armé
  • Un véhicule avec chauffeur et garde armé
  • Une voiture blindée avec garde armé
  • Un convoi de plusieurs voitures (en cas de panne dans une zone sensible) …

 

De plus, en fonction de la nature du client dans le pays visité (entreprises public, état ou ministère), l’armée locale peut se proposer pour assurer la sécurité des collaborateurs. Le choix d’accepter ou non est à la discrétion de l’entreprise. Selon la dangerosité ou la situation du pays, il peut être demandé aux collaborateurs d’être en contact avec son manageur à intervalles donné. Si l’entreprise est munie d’un logiciel de tracking mission, d’envoyer sa position à la demande de son manageur ou de la direction sureté. Par la suite, pour assurer la sécurité des collaborateurs, une standardisation des mesures de protection est réalisée avant le départ. En fonction de la dangerosité du pays, l’analyse sécuritaire peut être faite en termes de zone (la capitale et parfois « plus sécurisée » que le reste du pays)[xxv].

Exemple de tableau de risques :  

 

Risque faible

Risque modéré

Risque élevé

Risque très élevé

Pays interdit

Validation du voyage

N+1

N+1 & Travel Manager

N+1 & Travel Manager & Responsable sûreté/sécurité

A élaborer au cas par cas

L’entreprise ne peut pas assurer la sécurité du collaborateur dans la zone

Hébergement

Localisation à l’intérieur du triangle d’or (ambassade, aéroport, lieu visité…)

Hébergement labellisé par l’entreprise

Vecteur du déplacement

Transport en commun (taxis nationaux)

Compagnies de chauffeurs privés labellisées ou personnel autorisé de l’entité d’accueil

Dispositif de sécurité adéquat en taille et en équipements

 

Moyens de communication

Téléphone professionnel avec application d’alerte

Téléphone professionnel avec application d’alerte & tracking

Nous avons pu nous entretenir avec une personne de la politique des missions en pays sensible d’une entreprise française de grande technologie. Elle nous a expliqué le processus de validation avant le départ d’une mission dans une zone sensible.

La classification du risque pays est faite en cinq catégories :

  • Les pays non sensibles,
  • Les pays non sensibles mais avec une zone sensible (si nous prenons le cas de l’Inde, ce sont les régions du cachemire ainsi que les États du Nord qui sont sensibles mais le reste du pays ne l’est pas).
  • Les pays sensibles, c’est-à-dire les pays où une validation du service chargé de la politique des missions en pays sensible est obligatoire,
  • Les statuts temporaires (ce statut a notamment été utilisé lors des manifestations anti-français ou lors de périodes électorales en Afrique), nécessite la même validation que les pays sensibles mais également celle du responsable du pays en question.
  • Les pays interdits (par exemple les pays en guerre comme le Yémen ou actuellement l’Ukraine).

Le collaborateur devant partir en mission doit s’entretenir avec le chef de projet concerné ainsi que son manageur pour définir l’objectif de la mission. Une fois l’objectif de mission validé, le collaborateur fait une demande de départ sous forme d’ordre de mission qui sera validé par son N+1 et en fonction de la dangerosité, son N+2. Une fois cet ordre de mission approuvée, il pourra faire une demande de billet d’avion et d’hébergement auprès de l’agence de voyages référencé par le groupe. Lorsque les billets d’avion sont émis, la direction sûreté reçoit une notification via son outil de tracking mission. Le collaborateur reçoit automatiquement un e-mail avec des taches à effectuer. Il doit tout d’abord s’inscrire sur Ariane[2], lire la fiche de bonne pratique (comprenant les numéros en cas d’urgence, les informations essentielles sur le pays…) faite par la politique voyage groupe, lire la fiche pays faite par le prestataire sécuritaire et enfin, remplir un formulaire de départ de mission en pays sensible. Ce formulaire doit être rempli au minimum quatre jours avant le départ pour laisser le temps de prévoir un support sécuritaire si nécessaire. Dans ce formulaire, le collaborateur complète des informations liés à son identité (téléphone, mail, seconde nationalité s’il y a …) ainsi que des éléments relatifs à sa mission (objectif du déplacement, personnes rencontrées, lieu de travail sur place, moyen de transport utilisé dans le pays, vols et hébergement couvrant la totalité de sa mission). Une fois le document complété par le voyageur, il est envoyé et sera soumis à l’approbation du service politique voyage. Lors de la réception de ce document, la politique voyage décide alors si un support sécuritaire est nécessaire ou non. Si un support sécuritaire n’est pas nécessaire et que le collaborateur a complété les informations en respectant les règles groupe (par exemple un hôtel référence dans la liste d’hôtels audités ou encore un moyen de transport sur place autorisé par le groupe). Si le support sécuritaire est nécessaire, alors le service de politique voyage en pays sensible rentre en contact avec un de ses prestataires (en fonction du pays) pour élaborer les besoins propres aux déplacements. Le service de politique voyage en pays sensible a également la possibilité de refuser un départ en mission, ce qui entraine l’annulation du voyage. Lors de la discussion avec le prestataire sécuritaire (IRENAS, GEOS, Amarante, Risk&Co…), le prestataire fournit une analyse du pays puis soumet une proposition de devis avec les prestations nécessaires dans le pays. Si le service chargé de la politique des missions en pays sensible est d’accord avec la proposition du prestataire, alors elle met en contact le voyageur et le prestataire. Pour fournir un support sécuritaire, le prestataire a besoin d’échanger des informations avec le collaborateur comme une photocopie du passeport de la personne venant dans le pays. Le prestataire va également fournir au collaborateur les informations nécessaires sur les personnes étant chargées de la sécurité durant sa mission.

La responsabilité des chefs de projet

En fonction de la dangerosité, le chef de projet ou les gestionnaires de mission en pays sensible peuvent demander des contacts réguliers avec les collaborateurs.

Lors de réponses à des appels d’offre, le service chargé de la politique voyage en pays sensible intervient systématiquement. Avant de répondre, il est nécessaire pour l’équipe travaillant sur l’appel d’offre de savoir si l’entreprise les autorise ou non à se déplacer dans les zones où se déroulera le projet. D’un point de vue financier, la sûreté des collaborateurs ayant un coup très élevé dans les pays sensibles, le prix des prestations potentielles pour le projet doit être ajouté au prix du projet. En fonction du pays, le prix de la prestation varie.

Cette variation est liée à différents facteurs :

  • Le risque local est très élevé et oblige donc à avoir un support sécuritaire très présent,
  • La présence de peux de prestataires dans le pays,
  • Ou encore le choix propre à l’entreprise pour la prestation (chef d’équipe local ou occidental).

 

Il est cependant compliqué pour une entreprise française de traiter avec des prestataires non occidentaux car la vision du risque est différente.

Le service chargé de la politique des missions en pays sensible a également sous sa responsabilité tous les VIE[xxvi] et les expatriations en célibataires géographiques ou en famille. Dans les deux cas mentionnés, la préparation au départ est différente. Lors de départs pour de longues périodes, des cessions de sensibilisassions avec un prestataire ou au sein de la direction sûreté sont mis en place pour préparer ces personnes au potentiel risque du pays. Il est également possible qu’un expatrié (au Burkina Faso par exemple), ait un contrat avec un prestataire sécuritaire pour toute la durée de son expatriation.

Les recommandations communes pour les expatriations

En cas de gros incident pendant une mission de longue durée, c’est l’ambassade dont dépend le collaborateur qui mettra en place le processus d’évacuation. Nous avons pu rencontrer un chef d’îlot français au Cameroun qui nous a expliqué le fonctionnement de la sécurité dans un des pays d’Afrique.

Les instructions relatives à la sécurité au Cameroun sont valables pour tous les pays du monde qui possèdent une embrassade ou un consulat français. Pour se rendre dans la zone Sahélienne, il faut impérativement que les entreprises donnent des renseignements à leurs collaborateurs sur le fonctionnement du pays. Sans instructions, la vie du collaborateur est mise en danger. Lors de son arrivée le collaborateur doit s’adresser au consulat, il doit signaler sa présence sur le territoire étranger en donnant ses coordonnées, son nom, sa carte d’identité originale ainsi que son passeport dont ils feront une copie et donner son programme pour le séjour. Si le collaborateur n’est pas dans la ville où se trouve le consulat, il doit quand même signaler sa présence par un moyen électronique ou par téléphone. Il faut donner un maximum de renseignements pour pouvoir effectuer des recherches rapides et efficaces au cas où il y ait un problème et que le collaborateur ne puisse pas se déplacer ou tout simplement répondre lorsque l’on prend contact avec lui. Lors de son enregistrement, le consulat fournira au collaborateur un numéro qui est celui de son chef d’îlot. Celui-ci est à contacter en cas de coup d’État ou d’attentat dans le pays.

Si un coup d’État se déclenche, le collaborateur doit revenir dans son lieu de résidence ou se diriger dans un endroit administratif français comme le consulat ou l’ambassade. Si le collaborateur se trouve dans son lieu de résidence, il doit impérativement appeler son îlotier qui lui donnera les instructions à suivre. Les îlotiers ont toujours des radios VHS pour joindre le consulat ou les autres îlotiers en cas de panne téléphonique. Chaque îlotier a un chef d’îlot qui se charge de communiquer les informations au consulat. Ces radios ont été mises en place en 1991 sous Mitterrand.

Les plans de rapatriement

Il y a donc un plan mondial de rapatriement qui a été mis en place si un coup d’État éclate pour rapatrier les Français. Celui-ci prévoit une évacuation rapide des Français qui vivent dans le pays concerné mais il faut l’accord du président de la République française. Ce rapatriement mobilise l’armée, l’aviation militaire, civile, maritime et engendre une déstabilisation économique mais aussi un bouleversement des intérêts français dans le pays. Tous les jours, des bateaux sillonnent du nord au sud la côte Africaine. Ce plan d’évacuation est composé d’endroits spécifiques permettant à l’armée en charge de l’évacuation d’aller chercher les Français aux endroits indiqués dans la procédure. Ces endroits sont connus et appartiennent à des sociétés françaises ou administratives privées installées dans le pays et permettent donc le regroupement et l’évacuation des Français en toute sécurité. Au Cameroun, il y a l’école française Dominique Savio. Ces lieux sont déterminés par l’ambassade et ils ne changeront pas. Toutes les personnes concernées par ce rapatriement sont au courant de l’emplacement de ces endroits. Ces bâtiments seront protégés par l’armée du pays (avec l’accord des autorités françaises) et par l’armée française qui se trouve dans le pays. Lors d’in attentat, les Français doivent rester chez eux. Ils doivent avoir des provisions d’eau, de nourriture (riz, pâtes…), avoir de quoi vivre une semaine en attendant d’avoir des instructions. Si le coup d’État ou les attentats se compliquent et nécessitent un rapatriement, l’ambassadeur donnera des instructions au consulat qui devra prévenir les chefs d’îlots qui alerteront les Français enregistrés. Il se peut qu’il y ait des Français qui ne soient pas enregistrés auprès du consulat. Ceux-là devront rester auprès des Français enregistrés. S’il n’y a plus de communication, une fréquence radio TFS existe où des instructions seront transmises. L’ambassadeur aura donc des instructions du ministère des affaires étrangères qui aura lui-même des instructions du président de la République française.

 Après avoir pris connaissance de ces instructions, les îlotiers doivent prévenir les Français de la date où ils peuvent se rendre au lieu-dit pour pouvoir bénéficier d’une évacuation. Ils seront accompagnés soit par des militaires locaux ou français installés dans des voitures blindées, soit par des services compétents. S’ils ne peuvent pas se déplacer ou s’ils sont dans des endroits non accessibles par voiture, des hélicoptères sont mis à disposition. Toute cette procédure se fait au bout de plusieurs jours voire plusieurs semaines. Cela ne se déclenche pas en un claquement de doigt, les autorités auront le temps de prendre des précautions et de contacter les personnes concernées.

A partir du moment où l’accord du président français et Camerounais sont donnés, l’évacuation peut commencer. Si l’un des présidents actuels ne peut pas donner son accord, alors les Français attendront l’accord d’une autorité compétente. Si la zone de rapatriement se trouve à côté de la mer, les Français pourront être rapatriés par bateau ou par voitures blindées qui les amènera à l’aéroport. Si elle se trouve dans un autre endroit, ils seront aussi évacués par voiture blindées qui se dirigeront vers l’aéroport le plus proche. Plusieurs endroits peuvent être évacués en même temps.

Lors d’une situation moins complexe comme un séisme, si la France décide de secourir ses ressortissants étrangers, c’est aussi aux îlotiers de s’en occuper. Être îlotier est du bénévolat et tous ressortissants français à l’étranger peut demander une formation. Toute aide est importante[3].

 

Extrait du rapport rédigé par Alexandre Cha, Charlotte Delamotte, Fiona Di Guisto,

Restreint Montana, Aude de Faria, Adèle Ronget, TValentine Tauzin

 

Notes

 

[1] Angelotti, C. (2021, 24 mars). La sûreté des collaboratrices à l’international. Portail de l’IE. https://portail-ie.fr/analysis/2795/la-surete-des-collaboratrices-a-linternationa.l

[2] Connexion – Ariane – France - Diplômatie. (2022, 4 juin). Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. https://pastel.diplomatie.gouv.fr/fildariane/dyn/public/login.html.

[3] Renaldo Di Guisto, chef d’îlot au Cameroun.

 

[iii] « Al-Mourabitoune est un groupe armé et une organisation terroriste d'idéologie salafiste djihadiste, née le 22 août 2013 de la fusion du MUJAO et des Signataires par le sang » Wikipédia.

[iv] SEMAFO : société productrice d’or canadienne.

[vi] M. GERMANANGUE-DEBARE, « Les Pièges de l'économie souterraine », UNESCO, 1996.

[xiv] Chercheur et maître de conférences à la Brussels School of International Studies.

[xvii] F. MARIMOOTOO, « Journaliste, un métier à haut risque au Sahel », AfricaNews, 2021.

[xviii] L’ensemble des règles applicables dans un espace juridique déterminé qu’il s’agisse d’un État unitaire comme la France, ou d’un ensemble d’États comme la Communauté Européenne.

[xix] L. (2020, 13 avril). Le devoir de Protection des collaborateurs à l’étranger et ses impacts Sureté. Ambrelia. https://ambrelia.com/fr/2020/04/13/le-devoir-de-protection-et-ses-impacts-surete/.

[xx] Wikipédia constributors. (2022, 18 mai). ISO 45001. Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/ISO_45001

[xxi] Infos sécuritas. (2020, 9 juillet). La sécurité des collaborateurs à l’international en 2019. Securitas. https://www.infos-securitas.fr/articles/surete/la-securite-des-collaborateurs-a-l-international-en-2019

[xxii] 7ème baromètre CDSE de la sécurité des collaborateurs à l’international- CDSE. (2021, 5 juillet). CDSE. https://www.cdse.fr/7e-barometre-cdse-de-la-securite-des-collaborateurs-a-l-international.

[xxiii] CDSE Paris. (2020, 11 juin). 6ème édition du Baromètre de la sécurité des collaborateurs à l’international CDSE/AXA Partners [Vidéo]. Youtube. https://www.youtube.com/watch?v=J2L5sujFLVU.

[xxiv] Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. (2022, 27 mai). France Diplomatie. https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs/informations-pratiques/article/securite-au-sahel-27-05-2022

[xxv] I. (2019, 20 mai). Gestion des risques à l’étranger : quelles mesures mettre en place ? Iremos. https://www.iremos.fr/blog/la-mobilite-internationale-des-salaries.

[xxvi] Volontariat International en Entreprise.