Le 11 mars dernier, la presse se faisait l’écho de la vente par Christie’s d’une œuvre numérique réalisée par l’artiste américain Beeple au prix record de 69,3 millions de dollars cette vente, qui pourrait apparaitre comme anecdotique, est une nouvelle illustration de la puissance de l’art contemporain [1] comme outil d’influence internationale.
Depuis 2000, le marché de l’art contemporain connaît une progression fulgurante et une attractivité toujours plus importante.
L’art contemporain s’impose désormais comme le segment le plus dynamique et le plus profitable de l’ensemble du marché de l’art. Il atteint un chiffre d’affaires annuel de près de 2 milliards de dollars et représente 15% du marché de l’art mondial.
En 20 ans, d’après les chiffres du dernier rapport d’Artprice, il s’est ainsi étoffé et étendu géographiquement passant de 39 à 64 pays actifs aux enchères, le nombre d’artistes a été multiplié par 6 (5.400 en 2000, 32.000 aujourd’hui), le nombre d’œuvres multiplié par 10 (12.000 lots offerts en 2000, 123.000 en 2020), le nombre de maisons de ventes a doublé, les nouveaux collectionneurs se sont multipliés et le prix des ventes des œuvres connaît une croissance vertigineuse.
Cet incroyable essor du marché de l’art contemporain, sa forte médiatisation à chaque vente record ou succès de foires d’art, son pouvoir d’attraction et sa place dans le monde ne sont pas le fruit du hasard mais bien celui de la lutte d’influence à laquelle se livre les puissances étatiques.
Les États-Unis ont très bien et très tôt compris le rôle stratégique de l’art contemporain comme arme d’influence.
L'art contemporain, puissant outil de soft power américain
Très largement dominé par les États-Unis, l’art contemporain a ainsi tour à tour été utilisé comme arme de propagande américaine pendant la guerre froide puis comme outil de soft power après l’effondrement de l’URSS.
La genèse de l’utilisation de l’art contemporain par les États-Unis comme outil d’influence
L'histoire de l'art américain est d'abord celle d'une longue bataille pour affirmer son autonomie par rapport à l’Europe et aux modèles et styles artistiques véhiculés par cette dernière. C’est à partir des années 40 que les États-Unis vont se libérer du carcan européen.
Jusqu’alors, Paris était la capitale des arts et le berceau de l'art moderne [2]. Cependant l’arrivée du nazisme et la Seconde Guerre mondiale furent marquées par la fuite massive d'artistes européens à New York. Parmi eux notamment près de deux mille intellectuels que le réseau Varian Fry a réussi à exfiltrer de la France vaincue dès septembre 1940 dont Zadkine, Mondrian, Lipchitz, Chagall, Tanguy, Masson, Dali, Marcel Duchamp et Calder.
New York devient alors le lieu d’échanges entre artistes européens et américains influencés notamment par le surréalisme. Cette émulation artistique va donner naissance à un nouveau courant avant-gardiste : l'expressionnisme abstrait (ou école de New York), incarné par Jason Pollock, Mark Rothko, Lee Krastner ou encore Willem de Kooning.
La reconnaissance internationale de ce mouvement n’interviendra cependant que grâce à une politique habilement menée par les États-Unis pour imposer ces artistes sur la scène mondiale afin de lutter contre l’attrait exercé par le bloc soviétique sur les artistes et les intellectuels occidentaux et promouvoir le message messianique de l’Amérique « libre ».
Dès 1946, le Département d'État américain monte l'exposition « Advancing American Art », qui voyage pendant 5 ans dans les capitales européennes et d’Amérique latine. Toutefois en 1950, en plein Maccarthysme, le gouvernement, accusé de financer l'exposition d'artistes perçus comme « communistes », est contraint de trouver d'autres solutions pour poursuivre cette politique d’influence.
C’est ainsi qu’à leur insu, de grands noms de l’expressionnisme abstrait ont été exposés aux frais de la CIA pendant plus de vingt ans suivant la politique dite de la « Grande Laisse », consistant à promouvoir ce nouveau mouvement artistique dans une véritable guerre de propagande opposant les États-Unis à l’URSS.
Cette politique a prospéré non seulement grâce au Congrès pour la liberté de la culture, institution créée de toutes pièces en 1950 et financée par la CIA, constituée d’un réseau d’intellectuels européens et américains, présente dans 35 pays, et dont la mission « officieuse » était de combattre le communisme en organisant des festivals et des symposiums ou en créant des revues; mais également, grâce au soutien de millionnaires américains, de fondations et de musées américains dont le Museum of modern art (MoMa) de New York, entièrement consacré à l'art moderne.
S’en est suivie, l’explosion du nombre de galeries à New York, puis la mise en place de l’écosystème permettant, au-delà des attributs symboliques des œuvres, de créer un véritable marché de l’art contemporain international (artistes, galeries, collectionneurs, foires, salles de vente, institutions publiques et privées) et la reconnaissance des œuvres comme des valeurs d’échange assurant leur circulation à travers le monde. C’est à cette époque que New York devient la capitale mondiale du marché de l’art. La valeur économique s’ajoute à la valeur symbolique.
Après l’exploitation de l’expressionnisme abstrait, l’art conceptuel, puis le pop art, servent dès les années 60 la stratégie globale américaine de lutte d'influence.
A la fin de la guerre froide en 1991, les États-Unis, alors leader incontesté du marché de l’art contemporain, entreprirent de maintenir leur influence culturelle en renforçant le marché comme instrument spéculatif et en globalisant l’art contemporain.
La globalisation et le renforcement du soft power américain à la fin de la guerre froide
En 2004, Joseph Nye [3] affinait sa définition du soft power dans son ouvrage « Softpower : The means to success in world politics » en précisant que : « Un pays peut obtenir les résultats qu’il veut dans la politique mondiale parce que d’autres pays–qui admirent ses valeurs, s’inspirent de son exemple, aspirent à son niveau de prospérité et de liberté – veulent le suivre. En ce sens, il est également important d’inspirer les priorités de la politique internationale et d’y rallier d’autres nations, et non simplement de les forcer au changement en les menaçant par la force militaire ou les sanctions économiques. »
Il s’agit là de la doctrine qui sera appliquée par les États-Unis en matière d’art contemporain dès les années 90.
Comme le documente et souligne Aude de Kerros dans son ouvrage « Art contemporain manipulation et géopolitique – Chroniques d’une domination économique et culturelle » [4], depuis la fin de la guerre froide, l’on assiste à la globalisation de la scène artistique, fondée sur des valeurs occidentales, avec une très forte domination américaine.
Pour maintenir leur influence culturelle, les États-Unis ont fait évoluer au fil du temps l’art contemporain. A partir des années 90, ils prônent ainsi un art unique et consensuel, l’art kitsch et divertissant incarné par Jeff Koons. Ils ciblent les intellectuels, artistes, grandes fortunes et personnalités médiatiques d'une société sans frontières pour promouvoir l'art contemporain et maintenir leur hégémonie sur le marché.
Dans le même temps, ils poursuivent leur maillage mondial à travers la création et l’organisation de foires, telle celle de Miami créée en 2012, démultiplient les succursales des galeries, le circuit des musées, les maisons de vente et les réseaux de ports francs.
Cette entreprise d’influence se révèle des plus efficaces, lorsque l’on sait que les grands noms de l’art contemporain attirent les foules dans les musées et légitiment l’aura d’une collection, qu’elle soit publique ou privée. En outre, avec des œuvres valorisées à plusieurs millions de dollars, les signatures des artistes le plus côtés représentent un enjeu colossal pour le marché.
Il est intéressant de relever à cet égard que les trois-quarts du résultat mondial reposent sur 100 artistes seulement, parmi plus de 30.000 soumis à la loi du marché, et comme le rappelle Artprice dans son dernier rapport sur le marché de l’art contemporain, le quatuor de tête – Basquiat, Koons, Hirst, Wool – tous artistes américains - cumule 4,4Mrd$ en 20 ans, soit près de 20% du chiffre d’affaires mondial du marché de l’art contemporain.
Ainsi, la croissance du chiffre d’affaires des États-Unis depuis 2000 sur le marché de l’art contemporain s’élève à +1.023%.
Toutefois, cette puissance économique sur le marché de l’art contemporain doit être nuancée s’agissant du soft power américain car si l’on pouvait dire, il y a encore dix ans, que l’art contemporain était le fruit d’un fort travail d’influence des États-Unis, depuis l’élection de Donald Trump et sa prise de fonction en janvier 2017, ce travail d’influence étatique a marqué le pas.
De nouvelles puissances économiques, comme la Chine, aux ambitions mondiales déclarées, cherchent à concurrencer le monopole américain et, plus largement, occidental. L’art contemporain s’avère être un terrain de jeu pertinent pour ces états au premier chef desquels la Chine qui, après avoir amorcé sa mue sur ce terrain dès les années 70, bouscule désormais les lignes du soft power de l’art contemporain.
La Chine, challenger de l'hégémonie américaine
La Chine, 2ème puissance économique mondiale en passe de devenir 1ère puissance d’ici à 2030 d’après les projections de la Banque mondiale, a repris à son compte les codes américains pour déployer un soft power culturel à travers l’art.
C'est Deng Xiaoping, dirigeant du pays de 1978 à 1989, qui, dans le cadre de la politique de réforme et d’ouverture adoptée en 1978 lors du 11ème Comité central du Parti communiste Chinois, a été le premier à promouvoir l’ouverture, en créant des ateliers d’artistes et des galeries dans des lieux concédés par l’État, comme le complexe culturel 798 à Pékin.
A cette époque, avec l’avancée de la politique de réforme et d’ouverture (politique d’ouverture notamment à l’étranger et au marché), les dimensions matérielle et spirituelle de la culture sont mises en avant et le gouvernement chinois cesse de contrôler directement ce domaine, suivant un modèle moins interventionniste qui ne cherche plus à imposer mais à guider et gérer la politique culturelle.
Cette politique en vigueur dès 1978 signale la reconnaissance par le gouvernement chinois de la valeur économique de la culture.
Au milieu des années 2000, Pékin et Shanghai deviennent les nouveaux « villages de l’industrie culturelle », pour reprendre l’expression consacrée par le gouvernement chinois. Des ateliers d’artistes, des galeries, des musées sont créés et des foires d’art y sont organisées. Les artistes chinois acquièrent le statut de véritables « stars », et leur réussite fait rêver tout un pays.
Reconnu comme un levier politique, le soft power a été officiellement adopté par le gouvernement chinois comme un principe d’action politique en 2007 durant le 17ème Congrès du Parti communiste chinois.
C’est dans le cadre de ce plan d’action politique et en réaction à la crise économique mondiale de 2008, que la Chine décide d’accélérer sa transition économique en misant encore davantage sur les industries culturelles et créatives pour éviter la récession. Cette stratégie n’est pas sans rappeler les circonstances du développement de Hollywood et de Disney dans les années 1930, de l’animation au Japon dans les années 1970 et du cinéma coréen après la crise financière de 1997.
Elle va rapidement porter ses fruits, la Chine devient un nouveau centre névralgique face aux États-Unis qu’elle surpasse notamment en 2010. Tant les collectionneurs que les institutions internationales se précipitent sur les œuvres chinoises. Cai Guo Qiang sera le premier artiste chinois à recevoir le Lion d’Or à la Biennale de Venise en 1999.
Avec l’explosion de l’économie chinoise, de riches entrepreneurs se prennent au jeu de la collection, à l’image de Jack Ma (Président d’Alibaba), tandis que d’autres achètent des œuvres pour diversifier leurs placements. Le business de l’art bat rapidement son plein en Chine avec l’émergence de fonds d’investissements spécialisés.
Des afflux massifs de capitaux se dirigent d’abord sur les artistes chinois, faisant considérablement grimper leurs prix si bien que, en 2011-2012, la Chine vend deux fois plus d’œuvres à plus de 100.000$ que dans toute l’Europe.
Les cotes flambent tant qu’en 2008, les contemporains les plus coûteux sont majoritairement chinois.
Aujourd’hui, l’artiste Zeng Fanzhi est le numéro 5 des contemporains internationaux, derrière Basquiat, Koons, Hirst et Wool. Il est aussi le premier des 32 artistes chinois inscrits dans le Top 100. 32 artistes désormais aussi cotés que les figures tutélaires de l’art européen et américain.
Mieux, ce ratio – un tiers d’artistes chinois dans le top 100 – s’applique aussi au top 1.000, qui rassemble 395 Chinois pour 165 Américains.
En 20 ans, la croissance du chiffre d’affaires chinois est également phénoménale, multiplié par 65. Avec Hong Kong (10%), la Chine représente 33% du Marché (659m$ en 2019) contre 35% pour les États-Unis (695m$). Ensemble, les deux puissances - Chine et États-Unis - génèrent 68% du volume d’affaires mondial.
Le constat est sans appel : la Chine a rattrapé son retard sur l’Occident en un temps record démontrant l’efficacité de sa stratégie de soft power sur le marché de l’art contemporain.
Pour parvenir à de tels résultats, la Chine s’est dotée de toutes les structures idoines (grandes institutions telles Artron, société chinoise d’expertise et de services en matière d’art, maisons de ventes chinoises - Poly International Aunction et China Guardian) permettant d’asseoir sa légitimité sur le marché et assurer son attractivité tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de ses frontières.
A cet égard, l’opération séduction a très bien fonctionné, pour preuve l’installation de la première société de ventes mondiale, Christie’s, en Chine continentale et l’organisation, dès 2013, de ses ventes à Shanghai. Annoncée comme un événement aussi important que son ouverture à New York en 1977, la première vente de Christie’s en Chine a stratégiquement lieu au moment où Shanghai facilite les opérations d’entrées et de sorties temporaires des œuvres sur son territoire (fin septembre 2013), grâce à une nouvelle politique de libre-échange facilitant l’import et l’export d’œuvres d’art (SHFTZ, Shanghai Free Trade Zone).
La politique menée par la Chine a en outre été à l’origine du développement exponentiel des musées, dont le nombre s’élevait à environ 4 000 à la fin de l’année 2013. En 2012, ce sont près de 450 nouveaux musées qui ont ouvert leurs portes, selon le vice-président de l’Association chinoise des musées, à l’image de la Power Station of Art à Shangaï, premier musée public consacré à l’art contemporain en Chine. Par comparaison, avant 2008, entre 20 et 40 musées étaient construits en moyenne par an aux États-Unis.
Outre les musées publics, de nombreux musées privés, encouragés par les autorités chinoises, et financés par de grandes fortunes chinoises et des collectionneurs d’art, ont également ouverts les uns après les autres, tel l’Ullens Center for Contemporary Art (UCCA), qui a ouvert en 2007 dans le quartier artistique de Dashanzi à Pékin ainsi que, à Shanghai, le Rockbund Art Museum.
Shangaï est désormais l’une des places fortes du tourisme culturel et du marché de l’art contemporain où chaque année s’y tient la Shanghai Art Week, semaine de foires d’art contemporain, rendez-vous majeur du calendrier mondial du marché de l'art, vivement encouragée par les autorités chinoises et le gouvernement local. En 2019, elle était marquée par l'ouverture du Centre Pompidou Shanghai. En 2020, il s’agit du seul évènement d’art contemporain de cette dimension à pouvoir, depuis la crise sanitaire du Covid, se tenir physiquement dans le monde.
La Chine, qui bénéficie de moyens colossaux, d'un enthousiasme encouragé par les plus hautes autorités, et qui pèse lourd dans les résultats des maisons de ventes, est en train de devenir une force prescriptrice majeure de l'art contemporain au niveau international.
Bien qu’elle n’apparaisse qu’au 8ème rang au classement mondial du Soft Power 30 pour la culture établi chaque année par le USC Center on Public Diplomacy tandis que les États-Unis continuent à occuper la 1ère place occupée, tout porte à croire à une progression de la Chine au classement et à une déstabilisation de la position américaine sur ce marché.
Le développement fulgurant de la Chine sur le marché de l’art contemporain démontre en effet qu’un sérieux coup a été porté à l’hégémonie américaine par la stratégie de soft power chinoise menée depuis près de 40 ans et qui s’est accélérée à partir de 2007.
Reste désormais à analyser la position qui sera adoptée par le gouvernement Biden pour infléchir cette tendance et permettre aux États-Unis de conserver leur influence sur ce marché convoité. Il conviendra d’observer la stratégie qui sera déployée et soutenue par la société civile américaine (fondations, grandes fortunes, etc.), le développement de l’art numérique pourrait être l’un des signaux faibles de cette stratégie, à l’image de celle développée post guerre froide, par l’émergence de nouveaux courants artistiques consensuels et divertissants.
Cynthia Picart
Auditrice de la 36ème promotion MSIE
Références :
[1] La définition de l'art contemporain qui est la plus généralement admise est que l'art contemporain désigne l'ensemble des œuvres d'art créées depuis 1945 et jusqu'à nos jours. Les œuvres d'art contemporain sont donc toutes les œuvres créées durant cette période quel que soit le style, le médium utilisé (sculpture, peinture, photographie, dessin ou édition) ou le mouvement artistique auxquelles elles appartiennent. L'art contemporain succède à l'art moderne, désignant l'art des années 1850 aux années 1945.
[2] « Géopolitique de l’art contemporain - Une remise ne cause de l’hégémonie américaine ? » de Nathalie Obadia, éditions Le Cavalier Bleu, 2019.
[3] Le concept de soft power fut proposé par Joseph Nye, professeur de relations internationales à l’Université d’Harvard, en 1990 dans l’ouvrage « Bound to Lead : The Changing Nature of American Power », New York, Basic Books, 1990. Joseph Nye sert comme adjoint au sous-secrétaire d'État dans l'administration Carter (1977-1981) et il occupa le poste de secrétaire adjoint à la Défense sous l'administration Clinton (1994-1995).
[4] « Art contemporain manipulation et géopolitique – Chroniques d’une domination économique et culturelle » de Aude de Kerros, éditions Eyrolles, 2019.
[5] « Le marché de l’art contemporain » de Nathalie Moureau et Dominique Sagot-Duvauroux, collection Repères, éditions La Découverte, 2016.
[6] « Entre rééducation des artistes et développement effréné, où va la culture en Chine ? » De Émilie Frenkiel, Nectart 2016/1 (N° 2), pages 68 à 77
[7] « La face cachée de l’art américain - Derrière l’art moderne un combat idéologique », documentaire réalisé par François Lévy-Kuentz
[8] « Quand la CIA infiltrait la culture » - documentaire réalisé par Hans-Rüdiger Minow - 2006
[9] « Le développement des musées privés en Chine » de Song Xiangguang, dans Museum International, LX 60, pp. 43-48, Éditions UNESCO et Blackwell Publishing Ltd., 2008