Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, alors que la population Américaine se réveille sonnée par ces attaques terroristes sans précédent, des drones PREDATOR sont embarqués à destination du Moyen Orient. Le 30 septembre, l’ancien Imam Américain Anwar Al-Awalki surnommé le « Ben Laden d’internet » était éliminé à l’aide d’un missile Hellfire tiré depuis un drone, bien que citoyen américain, la population Américaine ne s’est pas indignée pour cet assassinat considérant que la sécurité intérieure des Etats unis ne devait pas être remise en cause par l’action terroriste et pouvait légitimer le meurtre ciblé de citoyens américains.
Un débat lancé dans un contexte de terrorisme et de tensions internationales
Cette année 2024, dans la droite lignée des années qui nous précèdent, voit son horloge de l’apocalypse se rapprocher inexorablement de l’heure fatidique. A minuit moins 90 secondes, cette horloge crée en 1947 n’a jamais atteint un seuil aussi critique depuis sa création, l’apparition de nombreux conflits armés : Israël/Gaza, Russie/Ukraine, et d’autres latents : Chine/Taiwan, permettent aux industries de la Base Industrielle Technologique et de la Défense d’investir massivement dans la militarisation des drones et le développement de l’Intelligence artificielle.
A ce jour de nombreuses questions éthiques et juridiques sont soulevées par les différents acteurs impliqués. Un ensemble d’ONGS fédérées par HUMAN RIGHT WATCH agissent pour interdire l’utilisation de drones militaires armés, à l’inverse, les industries de la défense (BITD) soutenues par les Etats pour qui la conquête d’un ascendant technologique est synonyme de puissance sur la scène internationale. Cette confrontation informationnelle commence officiellement dès 2013 lors du lancement de la campagne « Stopkillersrobots » et n’est toujours pas terminée comme le prouve le dernier rapport de l’ONG lors de la publication de son rapport annuel 2023…
Les Etats à la manœuvre dans l’ombre
La défense de la souveraineté des Etats ne pourrait être remise en question par un retard technologique accumulé sur la modernisation de l’armement, et la défense de ses intérêts au détriment de la perte de vie humaine soulevait déjà des questions d’éthiques comme le disait le Général S. PATTON : « L’objet de la guerre n’est pas de mourir pour son pays, mais faire en sorte que le salaud d’en face meure pour le sien… »
Cette doctrine militaire est désormais intégrée par l’ensemble des Puissances, la CHINE, dévoile son premier drone furtif dès 2012, La TURQUIE commercialise avec succès son drone « Bayraktar », la RUSSIE les utilise en UKRAINE et précédemment pour soutenir les forces gouvernementales Syrienne dans la guerre civile, ce qui pose la question quant à leur utilisation par des acteurs non étatiques.
De son côté l’évolution des mentalités dans les armées françaises est désormais officielle et peux désormais compter sur le drone AAROK de la société TURGIS & GAILLARD, permettant de s’affranchir des drones US.
Les Nations Unies, ne peuvent rester inactives et proposent dès 2015 la nomination d’un groupe d’experts sur le sujet des Armes Autonomes Létales et proposent d’analyser les aspects éthiques et juridiques de ces systèmes d’armes, terrains d’affrontements soulevés par HUMAN RIGHT WATCH deux années plus tôt. Pour la première fois en 2017, sous la pression des ONGs, une réunion est organisée à Vienne en 2017 réunissant pour la première fois l’ensemble des acteurs : Gouvernements, ONGs, Groupe d’experts, Lobbys…
De leur côté, les entreprises du GICAT tentent de faire infléchir les règles de certifications qui sont trop contraignantes par l’intermédiaire de Groupe d’experts au Parlement EUROPEEN.
Ces Lobbys (DRONE4SEC, ADIF, DRONE ALLIANCE EUROPE…) ont compris que l’affrontement sur le terrain de l’éthique et la mise en avant de la légitimé de l’acte létal ne pouvait contrebalancer avec les actions de sensibilisation de la société civile par les ONGs. Il est primordial pour ces industries de préserver leur image publique et leurs parts de marché, maintenir le soutien des États en soulignant le rôle crucial qu'elles jouent dans la sécurité nationale et la défense du pays.
Enjeux nationaux et asymétrie des ressources :
Les industries de défense disposent, par l’intermédiaire des aides d’états (loi LPM) de ressources financières et médiatiques bien supérieures à celles des ONG, il est impossible pour ces dernières d’affronter les industries de la BITD sur le plan Législatif, c’est la raison pour laquelle le budget des Lobbys militant pour l’accélération du déploiement n’évolue pas ou peu.
Inclure l’éthique dans la doctrine et la stratégie militaire :
« Je tue en toute sécurité et, en tuant, je sauve des vies » une citation de Marion TOUBOUL dans un ouvrage de 2020 résume la vision des industries de défense. De nombreuses études publiées avancent l’aspect précis et efficaces : « La guerre des drones, aspects stratégiques et juridiques de la robotique sécuritaire », Rapport en 2016 de l’AED (Association des industries Européenne de la défense)
Rappelons-nous lors de la Guerre du Golfe l’utilisation de l’appellation « frappes chirurgicales »
En 2019, se basant sur les travaux antérieurs de l’AED, le Groupe Européen d’éthique et de la défense publie un rapport concluant sur l’utilisation des drones armés, précisant que certaines circonstances pouvaient justifier leur utilisation.
Parallèlement aux groupes d’experts, des fédérations de drones civils voient le jour (JEDA..), ces fédérations participent aux commissions aux cotés des Lobbys de l’armement et demeurent des soutiens importants lors des votes sur la prolifération des armes autonomes.
Maintenir une opacité pour « geler » la réglementation
Les entreprises de la BITD appliquent une stratégie claire consistant à maintenir une opacité totale sur les résultats obtenus en matière d’avancée sur l’Intelligence Artificielle. Sous couvert de l’intérêt prioritaire de la Nation, elles conservent une longueur d’avance sur les ONGs qui ne peuvent interférer la réglementation et les votes autour de la militarisation des drones. Cette stratégie est appuyée avec le soutien des Etats qui par les travaux et rapports constatent les progrès de leurs capacités d’intervention et de fait l’accroissement de leur puissance.
Les opposants ciblent une société civile déjà acquise à la cause.
Un sondage de 2018 confié à IPSOS et commandé par l’ONG HUMAN RIGHT WATCH révélait que 61% des sondés étaient défavorable à l’utilisation de système d’armes autonomes, renforçant ainsi les idées et la stratégie déployée dès 2013 lors du lancement de la campagne « STOPKILLLERROBOTS »
Une sensibilisation multi-canaux de la société civile..
HUMAN RIGHT WATCH, leader des opposants agit en première ligne pour mobiliser l’opinion publique aux dangers liés à la déshumanisation des armes autonomes. Des actions très concrètes sont menées notamment en proposant aux militants un Kit de campagne permettant de centraliser l’ensemble des arguments nécessaires à la mise en avant médiatique de la lutte contre les drones. Outre les grands médias qui sont fréquemment utilisés comme vecteur de propagande, les réseaux sociaux comme Instagram et Facebook sont aussi utilisés comme relais d’opinion. La rhétorique utilisée par les ONGs utilisent des termes qui suscite de l’émotion auprès des lecteurs qui ne peuvent rester insensible à la notion de : « Robots tueurs », « drones armés hors la loi ? », « chasse à l’homme », « serai-je la prochaine à mourir ? » ; Une pétition à également vue le jour sur le site de Change.org intitulée
Légitimer son action par le biais de Leaders d’opinions
Les images publiques de scientifiques de notoriété internationale seront mises en avant par HUMAN RIGHT WATCH lors de la pétition signée en 2015, elle permet de lutter contre les LOBBY pro sur le terrain de la compétence technique. Cette pétition sera signée par 3000 personnalités du monde entier.
L’échiquier politique n’est pas délaissé
Bien que la position des ONGS soit affaiblie sur l’échiquier politique eu égard aux enjeux de puissance des Etats et des moyens financiers investis, les ONGs, comme l’explicite le kit de campagne, propose aux Commissions et groupes d’experts, la mise à disposition d’études rigoureuses et de rapports par l’intermédiaire d’universités et de centres de recherches. Leurs objectifs : Dénoncer les impacts négatifs liés à l’utilisation des armes produites par les industries de défense tels que : Les violations des droits humains, les souffrances civiles et les dommages environnementaux ; Et proposer des alternatives à la violence et à la prolifération des armes. Ces rapports permettent de maintenir une pression sur les Etats et engager le dialogue avec les entreprises de la BITD.
La guerre informationnelle entre ONGs et les industries de défense met en lumière les défis complexes liés à la sécurité nationale, à l'éthique et aux droits humains. Les États ont un rôle crucial à jouer pour trouver l’équilibre entre ces différents intérêts et promouvoir un avenir pacifique et durable.
L’armement des drones soulève des questions éthiques et réglementaires indissociables des enjeux de Puissance et de maintien de leur souveraineté. L’affrontement sur l’échiquier Politique est d’emblée biaisé, les Etats étant juges et parties, le combat est déséquilibré, ces éléments ont bien été intégrés par les ONGS qui concentre leurs actions sur la sensibilisation de la société civile. Ce combat informationnel se déroule depuis plus de 10 ans, et le dernier rapport de l’ONG HUMAN RIGHT WATCH de 2023, prouve que celui-ci n’est pas fini.
Bien que les ONGs ont un fort impact sur l’échiquier social, aucun être humain ne souhaite la mort de son prochain, Il faudra cependant que les ONGs soit vigilante vis-à-vis des avancées technologiques qui peuvent aussi utilisées pour servir leur propre cause: En 2011, des drones utilisés par SEA SHEPPERD ont traqué et attaqué un navire Japonais ; Si ces utilisations venaient à se répéter et à se durcir, les industries de la BITD auraient tôt fait de retourner les arguments contre leur détracteur…
Christophe Demeslay,
étudiant de la 44ème promotion Management stratégique et intelligence économique (MSIE)