Évolution de la puissance de la France de 2000 à 2020: l’industrie de Défense

Infoguerre entame la publication d’une série de rapports sur la problématique de la puissance française. Ce travail est le fruit d’un exercice qui a eu lieu à la fin de l’année 2021. Les effets de la guerre en Ukraine ne sont donc pas pris en compte. Les constats ont été effectués sous différents angles d’approche (militaire, diplomatique, commercial, agricole, industriel …) sont éclairants. Ils permettent de mieux cerner la situation de la France quand on la confronte à une grille de lecture centrée sur la puissance. Le premier rapport porte sur l’évolution de l’industrie de défense.

Ce rapport a été rédigé juste avant la guerre en Ukraine. Le sujet de la souveraineté de l’industrie française de défense est plus que jamais plébiscité par les enseignements qui en découlent. Mais l’angle d’approche de ce rapport vise porte avant tout sur la notion de puissance. Qu’elle soit industrielle, défensive ou offensive, il est question d’abandonner la lecture monothématique de protection d’intérêts. Car si la France possède le rayonnement suffisant pour les imposer, encore faut-il que le gouvernement en ait la volonté.

Une industrie très compétitive

L’industrie de la défense française est pourtant une exception en Europe, rivalisant avec les plus grandes puissances industrielles dans le monde par sa capacité de production. C’est une des rares à répondre à l’ensemble des besoins des forces armées, y compris dans les domaines du nucléaire et des technologies de pointe.

La BITD pèse en France près de 20 milliards d’euros, et alimente un tissu de grands groupes ainsi que des PME/TPE de pointe. Toutes les régions bénéficient de cette manne économique, et des pôles en Île-de-France, Occitanie ou encore en Bretagne se sont organisés pour créer des synergies entre la formation des ingénieurs et techniciens, les groupes et leurs sous-traitants, ainsi que les acteurs publics.

L'importance récurrente de l'exportation d'armements

Les exportations représentent environ 30% du chiffre d’affaires de la BITD obligeant la France à fournir des efforts conséquents en vue de promouvoir ses matériels et équipements auprès de ses partenaires internationaux, et concurrençant directement les géants américain et chinois. L’alternative française est suffisamment attractive pour justifier une véritable guerre informationnelle visant à délégitimer ses ventes. Les accusations se centrent sur la fourniture de matériels de guerre à des pays non démocratiques ou qui les utiliseraient contre des populations civiles. Étrangement, d’autres acteurs, comme les États-Unis ou la Chine, qui ne sont pas signataires des traités visant à restreindre le commerce des armes, sont moins visés que la BITD française.

S’agissant de sa stratégie d’exportation, celle-ci, héritière du gaullisme, est efficace et bien établie, mais pourrait être renforcée afin d’améliorer la conquête et la préservation de marché. De même, si les programmes d'armement en commun peuvent être bénéfiques à la France d'un point de vue opérationnel et ainsi renforcer la puissance industrielle et technologique de la BITD française ; force est de constater que certains partenariats - notamment avec l'Allemagne - peuvent se réaliser au détriment des industries françaises et porter atteinte à l'autonomie stratégique de la France. Il s’agira donc de chercher à concilier l'autonomie et les intérêts stratégiques d'un État - fondements de sa puissance - avec une volonté de coopération.

L'importance vitale des nouvelles technologies

Les nouvelles technologies font entièrement parties du spectre de recherche et développement de l’industrie de défense et leur évolution est de plus en plus fulgurante. Enjeu stratégique dans les domaines clés de la puissance, elles prennent une part majeure dans les processus d’innovation. L’enjeu est donc de comprendre comment la R&D et l’innovation dans la défense constituent à la fois un outil normatif et un outil de projection de puissance

Vincent Bernaud, Marie Breymand, Florian Brun, Pierre Chapoulie, Anna de Castro, Gauthier Eymard, 

Guilhem Garnier, Adèle Ronget, Achille Wagner

 

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