Episode 6 du dossier sur la Grande Bretagne : Les fragilités du système militaire

L'industrie de défense britannique, jadis fleuron de l'innovation militaire mondiale, se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins, confrontée à des défis sans précédent qui menacent non seulement sa compétitivité à l'exportation, mais aussi la puissance stratégique du Royaume-Uni sur l'échiquier international.

La Base Industrielle et Technologique de Défense (BITD) britannique, héritière d'une longue et riche tradition remontant à la révolution industrielle, a joué un rôle crucial dans le maintien de la puissance du Royaume-Uni sur la scène internationale depuis plus d'un demi-siècle. Cette industrie, qui a forgé l'arsenal ayant contribué à la victoire des Alliés lors de la Seconde Guerre mondiale et soutenu la position du pays pendant la Guerre froide, se trouve aujourd'hui confrontée à une série de défis qui remettent en question sa capacité à maintenir sa position dominante sur le marché mondial de l'armement.

L'évolution de la BITD britannique au cours des 50 dernières années reflète les transformations profondes qu'a connu le pays, passant du statut d'empire colonial à celui de puissance moyenne cherchant à redéfinir sa place dans un monde multipolaire. Cette transition s'est accompagnée de changements significatifs dans les priorités stratégiques, les capacités industrielles et les ambitions militaires du Royaume-Uni, avec un impact direct sur ses performances à l'exportation.

Dans les années 1970, la BITD britannique bénéficiait encore d'une réputation mondiale solide, s'appuyant sur une longue histoire d'innovation technologique et de production industrielle de haute qualité dans le domaine militaire. Des projets emblématiques tels que le chasseur-bombardier SEPECAT Jaguar, le char de combat Chieftain et le sous-marin nucléaire lanceur d'engins de classe Resolution démontrent la capacité du pays à produire des systèmes de pointe dans les domaines aérien, terrestre et naval, attirant l'attention des acheteurs internationaux.

Le Chieftain, en particulier, a connu un succès notable à l'exportation, notamment vers l'Iran avant la révolution islamique, renforçant la position du Royaume-Uni sur le marché international des armements. Cependant, cette période a également vu l'émergence de défis qui allaient façonner l'avenir de l'industrie : la nécessité croissante de collaborations internationales, la pression pour l'exportation afin de rentabiliser les investissements en R&D, et une concurrence accrue sur les marchés internationaux. 

Les décennies suivantes ont été marquées par des transformations majeures du paysage géopolitique et technologique. La fin de la Guerre froide, l'émergence de nouvelles puissances économiques et militaires, et les révolutions technologiques successives ont profondément modifié les exigences en matière de défense et les dynamiques du marché international de l'armement. La BITD britannique a dû s'adapter à ces changements, naviguant entre les impératifs de maintien d'une base industrielle nationale solide et la nécessité croissante de collaborations internationales pour rester compétitive à l'exportation.

Aujourd'hui, l'industrie de défense britannique fait face à une constellation de défis qui menacent sa pérennité et sa compétitivité sur le marché mondial. Cette étude vise à analyser en profondeur ces défis et leur impact sur la puissance britannique à travers le prisme de ses performances à l'exportation, en examinant l'évolution de la BITD au cours des 50 dernières années. Elle explorera les stratégies adoptées, les innovations technologiques clés, les succès et les échecs, ainsi que les perspectives pour l'industrie de défense britannique sur le marché mondial. En outre, cette recherche s'intéressera aux efforts de modernisation et d'adaptation de la BITD britannique face aux nouvelles réalités géopolitiques et technologiques, cette étude cherchera à tirer des leçons de l'expérience britannique qui pourraient être pertinentes pour d'autres nations cherchant à développer ou à maintenir une industrie de défense compétitive à l'exportation dans un environnement mondial de plus en plus complexe et concurrentiel.

En examinant ces différents aspects, cette analyse vise à fournir une compréhension approfondie des défis auxquels est confrontée la BITD britannique et de leur impact sur la puissance stratégique du Royaume-Uni, sur ses performances à l'exportation. Elle cherchera également à identifier les voies possibles pour surmonter ces défis et assurer la pérennité de l'industrie de défense britannique dans un monde en constante évolution.

 

Capacité de production insuffisante

L’évolution rapide des besoins en matière de défense résulte d’une mutation fondamentale de l’environnement stratégique mondial. Depuis la fin de la Guerre froide, les priorités des nations occidentales, y compris le Royaume-Uni, ont basculé vers des engagements plus diversifiés, allant de la lutte contre le terrorisme à la réponse aux menaces hybrides et cybernétiques. Les années 1990 et 2000 ont marqué une relative accalmie des tensions géopolitiques traditionnelles, accompagnée d’une réduction significative des budgets de défense dans de nombreux pays, y compris au Royaume-Uni. Mais cette période a pris fin avec une résurgence des rivalités entre grandes puissances et une prolifération des conflits asymétriques. L’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 a agi comme un électrochoc pour les nations européennes, les poussant à renforcer leurs capacités militaires.

Dans ce contexte, le Royaume-Uni a dû adapter ses priorités stratégiques. L’une des évolutions majeures est le pivot stratégique vers la région indo-pacifique. Ce déplacement, motivé par la montée en puissance de la Chine et par l’importance croissante de cette région pour le commerce mondial, impose de nouveaux besoins en termes d’équipements et de capacités. La Royal Navy, par exemple, doit désormais déployer des flottes capables d’opérer loin des eaux territoriales britanniques, ce qui se traduit par une demande accrue en porte-avions, sous-marins à propulsion nucléaire, et navires de soutien logistique.

Parallèlement, la nature même de la guerre évolue avec l’émergence de technologies disruptives. Les forces armées britanniques s’orientent vers une intégration accrue des technologies comme l’intelligence artificielle, les systèmes autonomes et la cybersécurité. Ces technologies ne sont plus de simples accessoires, mais des éléments centraux des doctrines militaires modernes. Par exemple, le projet Tempest, un programme visant à développer un avion de combat de nouvelle génération doté d’une capacité de pilotage autonome, illustre cette tendance. Ce type de projet reflète également l’importance croissante de l’interopérabilité entre les forces alliées, particulièrement dans le cadre de l’OTAN. Les équipements doivent désormais être conçus pour fonctionner de manière intégrée avec les systèmes alliés, ce qui complexifie davantage les spécifications techniques et les processus de développement.

Malgré l’augmentation des budgets de défense récemment annoncée par le gouvernement britannique – atteignant 2 % du PIB en 2023 – les besoins financiers du secteur restent colossaux. Les arbitrages budgétaires mettent en évidence une tension entre la modernisation des capacités militaires et le maintien d’infrastructures existantes. La nécessité de remplacer des équipements obsolètes, tout en investissant dans des technologies de pointe, crée des pressions supplémentaires sur un secteur déjà confronté à de lourds défis.



Les pressions structurelles

Au-delà des évolutions de la demande, l’industrie de défense britannique est confrontée à des pressions structurelles qui limitent sa capacité à répondre efficacement aux attentes. L’un des principaux problèmes est la concurrence croissante sur le marché mondial. Historiquement, le Royaume-Uni faisait partie des principaux exportateurs d’équipements militaires, derrière les États-Unis et la Russie. Cependant, cette position est de plus en plus contestée par des acteurs émergents tels que la Chine, la Corée du Sud et la Turquie, qui développent leurs propres industries de défense et ciblent agressivement les marchés internationaux. Par ailleurs, des nations comme la France et l’Allemagne, partenaires au sein de l’Union européenne mais concurrents sur le plan industriel, investissent massivement dans des projets communs, tels que le Système de Combat Aérien Futur (SCAF). Ce dernier, développé par Airbus et Dassault Aviation, est perçu comme un rival direct du projet Tempest britannique, ce qui fragilise davantage la position du Royaume-Uni en Europe.

Les pressions sur l’industrie de défense britannique ne se limitent pas à ces aspects. La transition écologique et énergétique constitue un défi supplémentaire. Les entreprises du secteur sont soumises à des exigences de plus en plus strictes en matière de durabilité environnementale. Les gouvernements et les institutions internationales demandent aux fabricants de réduire leur empreinte carbone et d’adopter des processus de production plus respectueux de l’environnement. BAE Systems, par exemple, a annoncé un plan ambitieux visant à atteindre la neutralité carbone pour ses installations d’ici 2030. Cependant, ces transitions nécessitent des investissements massifs, souvent difficiles à concilier avec les autres priorités du secteur.

En parallèle, le recrutement souffre également de ces restrictions budgétaires. Le manque d’investissements dans la formation de jeunes talents et l’absence de campagnes de recrutement attractives ont entraîné un déficit de main-d’œuvre qualifiée. Les programmes de défense nécessitent souvent des compétences spécialisées, que ce soit en ingénierie, en intelligence artificielle ou en gestion de projets industriels complexes. Avec un secteur de plus en plus compétitif, la défense britannique peine à attirer les meilleurs talents, qui privilégient des industries perçues comme plus stables ou mieux rémunérées. Cette situation crée un cercle vicieux où l’incapacité à recruter et à former une nouvelle génération d’experts compromet la capacité de l’industrie à moderniser ses infrastructures et à maintenir ses projets dans les délais.

 

Facteurs aggravants

Ces pressions sont amplifiées par plusieurs facteurs aggravants. Le Brexit, tout d’abord, a profondément modifié le cadre dans lequel opère l’industrie de défense britannique. La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne a entraîné une perte d’accès aux programmes collaboratifs financés par le Fonds européen de la défense (FED), ce qui réduit les opportunités de développement et de partage des coûts avec les partenaires européens. En outre, le Brexit a perturbé les chaînes d’approvisionnement transfrontalières, entraînant des coûts supplémentaires et des retards dans la production. Ces problèmes sont particulièrement aigus pour les entreprises dépendant de composants spécialisés fabriqués en Europe continentale.

Le Brexit a eu des répercussions significatives sur la mobilité des travailleurs européens dans l’industrie de défense britannique. Avant la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, les entreprises du secteur bénéficient d’un accès fluide à un vivier de talents qualifiés issus de toute l’Europe. Ce cadre facilitait le recrutement de spécialistes dans les domaines de l’aéronautique, la cybersécurité et l’ingénierie navale, en particulier pour des postes exigeant des compétences pointues que le marché britannique seul avait du mal à pourvoir.

Depuis le Brexit, les nouvelles restrictions sur l’immigration ont considérablement compliqué le processus de recrutement de travailleurs européens. Les entreprises doivent désormais se conformer à des procédures administratives lourdes, telles que l’obtention de visas de travail, qui augmentent les délais et les coûts. Cette situation exacerbe les pénuries de main-d’œuvre déjà existantes, en particulier dans les régions où les compétences locales sont limitées. Par ailleurs, l’incertitude créée par le Brexit a incité de nombreux travailleurs européens à quitter le Royaume-Uni, contribuant ainsi à une perte de savoir-faire. La mobilité réduite affecte également les programmes collaboratifs entre les industries européennes, où les échanges de personnel jouent un rôle clé dans le partage des connaissances et l’innovation technologique.

La pandémie de COVID-19 a perturbé de manière significative les chaînes d’approvisionnement mondiales, et l’industrie de défense britannique n’a pas été épargnée. Les restrictions sanitaires et les confinements imposés dans de nombreux pays ont entraîné des interruptions dans la production et des retards dans la livraison de composants essentiels. Par exemple, des pièces critiques utilisées dans l’assemblage d’aéronefs militaires ou de systèmes de missiles, souvent importées d’Europe ou d’Asie, ont été bloquées pendant des semaines, voire des mois, perturbant ainsi les calendriers de production.

Enfin, la crise économique mondiale et l’inflation ont également exacerbé les difficultés de l’industrie de défense. La hausse des prix des matières premières, comme l’acier et l’aluminium, a augmenté les coûts de production, tandis que les contrats à long terme, souvent négociés à des prix fixes, laissent peu de marge pour absorber ces hausses. Par ailleurs, l’incertitude économique affecte la capacité du gouvernement britannique à maintenir un financement constant pour les grands projets de défense. Dans un tel contexte, les entreprises doivent jongler entre des contraintes budgétaires croissantes et des attentes élevées de la part des clients.

Enfin, l’instabilité politique. Les changements fréquents de gouvernements au Royaume-Uni ont conduit à des revirements dans les priorités stratégiques, affectant la continuité des politiques de défense. Les projets d’envergure, tels que les porte-avions de la classe Queen Elizabeth, ont souvent été retardés ou modifiés en raison d’ajustements budgétaires et de priorités fluctuantes. Cette instabilité complique également les relations avec les partenaires internationaux, qui peuvent percevoir le Royaume-Uni comme un acteur moins fiable dans les collaborations à long terme.

 

Pénurie de main-d'œuvre : un défi stratégique

La pénurie de main-d'œuvre représente aujourd'hui un défi stratégique majeur pour l'industrie de défense britannique. Alors que le secteur est soumis à des exigences croissantes en matière de modernisation et de production, la disponibilité limitée de talents qualifiés compromet directement sa compétitivité et sa capacité à répondre aux besoins nationaux et internationaux. Les profils les plus recherchés, tels que les ingénieurs en aérospatial, les experts en cybersécurité et les techniciens spécialisés, se font de plus en plus rares, rendant cette problématique particulièrement pressante.[i]

Les ingénieurs en aérospatial figurent parmi les compétences les plus prisées, notamment pour le développement et la maintenance des avions militaires et des drones. Les systèmes modernes nécessitent une expertise avancée dans des domaines tels que l’aérodynamique, la propulsion et les technologies furtives. De leur côté, les experts en cybersécurité sont devenus incontournables dans un monde où la guerre hybride et les cyberattaques ciblent non seulement les infrastructures civiles, mais aussi les systèmes militaires critiques. Enfin, les techniciens spécialisés, souvent responsables de l’assemblage, de la maintenance et des tests des équipements, jouent un rôle clé dans la chaîne de production. Cependant, l'offre de ces profils qualifiés ne parvient pas à répondre à la demande croissante, aggravant les tensions au sein de l'industrie[ii].

Plusieurs facteurs expliquent la pénurie de main-d'œuvre dans l’industrie de défense britannique. En premier lieu, le manque de formations adaptées freine l’émergence de nouveaux talents. Bien que certaines universités et institutions techniques offrent des cursus en lien avec l’aéronautique ou la cybersécurité, ces programmes restent insuffisants pour répondre aux besoins croissants du secteur. De plus, les partenariats entre les entreprises de défense et les établissements éducatifs, qui pourraient favoriser une meilleure adéquation entre l’offre de formation et la demande industrielle, demeurent encore trop rares.

Un autre facteur est la faible attractivité du secteur auprès des jeunes diplômés. Comparée à des industries perçues comme plus dynamiques et innovantes, telles que les technologies de l’information ou les énergies renouvelables, la défense souffre d’une image moins attrayante[iii]. Les jeunes professionnels sont souvent découragés par des opportunités salariales limitées, des processus de recrutement longs et une perception de rigidité dans les carrières offertes par le secteur. Cette tendance est particulièrement marquée dans les domaines technologiques, où des entreprises privées comme Google ou Tesla attirent des talents qui auraient autrement pu contribuer à des projets de défense[iv].

Enfin, le vieillissement de la main-d’œuvre accentue la crise. Une part importante des employés du secteur, en particulier les techniciens et les ingénieurs, approche de l’âge de la retraite. Le manque de planification pour former et recruter de jeunes travailleurs pour remplacer cette génération creuse les disparités, laissant des postes critiques vacants. Par exemple, dans des projets complexes comme le programme des sous-marins de classe Dreadnought, les départs à la retraite de techniciens spécialisés risquent de ralentir des étapes essentielles de la production[v].

 

La baisse des performances

Les répercussions de cette pénurie de main-d'œuvre se manifestent directement dans les performances du secteur. Une conséquence immédiate est l’allongement des délais de production. Les programmes stratégiques[vi], souvent soumis à des contraintes temporelles strictes, subissent des retards fréquents en raison du manque de personnel qualifié. Ces retards affectent la capacité des forces armées britanniques à disposer des équipements nécessaires pour maintenir leur avantage stratégique. Par exemple, des projets comme celui du chasseur Tempest nécessitent des milliers d’ingénieurs et de techniciens pour respecter les échéances, mais la pénurie actuelle complique cette mobilisation.

En outre, l’incapacité à répondre à des commandes stratégiques urgentes constitue un défi critique. Les contrats d’exportation, essentiels pour soutenir l’économie de défense britannique, sont de plus en plus difficiles à honorer dans les délais prévus, ce qui nuit à la réputation des entreprises nationales sur le marché mondial. La concurrence internationale exacerbe cette situation : lorsque des clients potentiels constatent des retards ou des difficultés dans la production, ils se tournent vers des concurrents étrangers plus réactifs, comme ceux de la France, des États-Unis ou de la Corée du Sud[vii].

Enfin, cette pénurie mine la capacité d'innovation du secteur. Sans une base solide de talents pour concevoir, développer et tester de nouvelles technologies, l’industrie risque de perdre son avance technologique sur des domaines cruciaux tels que les systèmes autonomes et l’intelligence artificielle. À long terme, cette situation pourrait fragiliser non seulement l’industrie elle-même, mais également la sécurité nationale du Royaume-Uni, qui repose sur des équipements à la pointe de la technologie. Ce qui nécessite une modernisation du matériel. 

 

Défis de modernisation 

Pour mener à bien une politique de modernisation de son matériel, le Royaume-Uni doit auparavant réévaluer ses ambitions et sa stratégie de défense.

Il y a actuellement un décalage entre le budget consacré à la défense, dont une partie est captée par sa dissuasion nucléaire, et les missions de l’armée britannique. Avec le retour des conflits de haute intensité comme en Ukraine et la multiplication des théâtres instables comme la mer Rouge ou le Pacifique, le Royaume-Uni souhaite être présent partout, notamment aux côtés de l’OTAN. Cependant, le pays n’a pas les capacités humaines ou matérielles à la hauteur de ses prétentions.

Si le Royaume-Uni veut conserver son statut de puissance moyenne, il est dans l’obligation de redéfinir ses engagements militaires. Or le maintien d'un large spectre de capacités militaires devient un objectif de plus en plus difficile à atteindre pour le Royaume Uni. Les Britanniques pourraient être contraints de se spécialiser dans des domaines limités en privilégiant le développement de certaines technologies. Un tel choix permettrait de mieux répartir le budget de la défense et de maintenir compétitive une partie de son industrie militaire. L’inconvénient serait une plus grande dépendance à l’OTAN pour pallier ses faiblesses, ainsi qu’une probable perte de souveraineté dans les domaines où la Grande Bretagne ne se spécialise pas. Pour ne pas arriver à de tels extrémités, la nouvelle orientation stratégique britannique doit impérativement s'accompagner d'une réforme en profondeur du système de « procurement », son système de développement et d’acquisition de matériel.

 

Des programmes parfois irréalistes

Ces problèmes sont souvent attribuables à une culture qualifiée « d’optimisme biaisé » au sein du ministère de la Défense (MOD), qui conduit à des estimations irréalistes des coûts et des délais des programmes d'armement[viii]. En effet, le MOD a tendance à se lancer dans des programmes avant que les technologies ne soient matures, ce qui entraîne des retards et des surcoûts.

On peut citer l’exemple du projet de radio Morpheus[ix]. Lancé en 2016, le programme Morpheus visait à moderniser les systèmes de communication tactiques de l’armée britannique. L’objectif était de concevoir un système modulable et plus adapté aux menaces électroniques actuelles. De plus, il était censé être capable de s’adapter aux nouvelles technologies afin de servir de plateforme commune et évolutive. Le projet a été abandonné en raison des retards importants et des dépassements de coûts. En attendant l’arrivée d’un nouveau système aussi ambitieux, l’armée britannique est donc forcée de mettre à jour son système actuel obsolète (Bowman) et de l’adapter à ses nouveaux véhicules comme le char Challenger 3.

Ce cas illustre les problèmes de procurement britannique non seulement sur l’angle des budgets alloués aux programmes mais également sur les relations avec la BITD.

Le MOD est critiqué pour impliquer tardivement les entreprises dans le processus de formulation des besoins. Cela limite les réflexions sur le matériel adapté aux besoins actuels et futurs mais rend aussi difficile pour les entreprises de planifier leurs investissements et de développer des solutions adaptées.

La complexité des procédures d'appel d'offres et des réglementations en matière de marchés publics décourage également de nombreuses entreprises de se positionner sur les marchés de la défense, laissant donc la place aux grands groupes étant moins agiles et n’ayant pas forcément les capacités d’innovation des startups.

Les PME innovantes ne représentaient sur l’année 2022-2023 que 5% des dépenses industrielles du MOD[x]. Ce sont pourtant ces entreprises qui peuvent apporter à l’armée britannique les matériels de pointe et innovations technologiques cruciales pour les combats et opérations à venir.

On peut citer l’intelligence artificielle ou la montée en puissance des drones FPV sur le théâtre ukrainien comme exemples frappants.

Les PME britanniques sont parmi les grandes perdantes de l’ancien système en raison de leur faibles ressources financières[xi]. Les processus de négociation et de désignation des prestataires sont longs et demandent des moyens pour survivre assez longtemps jusqu’à l’obtention des crédits publics. Ce facteur, ajouté à leur visibilité réduite dans l’industrie de la défense, permet un maintien de la domination des grands groupes dans l’obtention de contrats militaires.

La mise en place du « Integrated Procurement Model »

Ce modèle, introduit en mars 2024 et effectif depuis avril, vise à corriger les faiblesses du système existant en instaurant une approche plus collaborative et flexible. Le but ultime est de répondre aux besoins actuels et futurs des forces armées britanniques mais également d’orienter davantage la BITD britannique vers l’export.

Pour contrer les dépassements de coûts et de délais, le nouveau modèle met l'accent sur un engagement plus précoce des industriels dans les processus de développement. Cette implication dès les premières phases de planification permet de mieux définir les besoins, d'identifier des solutions innovantes et rentables et d'éviter les estimations irréalistes qui caractérisaient l'ancien système. L'accent est également mis sur une plus grande transparence quant aux besoins futurs du MOD et aux opportunités d’export, notamment à travers la communication d'un « pipeline d'acquisition » plus clair[xii].

Ce « pipeline » d’acquisition est un outil de planification stratégique qui permet aux entreprises, y compris les PME, de mieux se préparer et de proposer des solutions adaptées aux exigences de la défense. On peut le comparer au « Livre blanc de la Défense » français mais réservé aux industriels et se projetant dans le court terme.

Pour la gestion des programmes validés, le développement en spirale est désormais privilégié. Cette approche consiste notamment à déployer rapidement du matériel, puis à l'améliorer de manière itérative en fonction des retours d'expérience et des avancées technologiques. Ainsi, le parlementaire James Cartlidge expliquait en février 2024 que les équipements pourraient être livrés à partir de « 60% ou 80% de leur potentiel »[xiii] dans l’optique d’assurer une disponibilité rapide tout en assurant que la suite de leur conception réponde aux besoins concrets des utilisateurs.

Le développement en spirale permet de réduire les risques de dépassements de coûts et de délais, et de s'adapter plus facilement à l'évolution des menaces et des technologies. Le nouveau modèle encourage également l'innovation en simplifiant les processus d'approvisionnement pour les PME et en leur donnant accès à des financements.

Le pari de l'implication des PME 

Ces entreprises sont considérées comme des acteurs essentiels de l'innovation et de la diversification de la BITD. Le MOD s'engage à leur offrir davantage d'opportunités de participer aux marchés publics, notamment en simplifiant les processus d'appel d'offres et en publiant davantage d'informations sur ses besoins futurs.

Des initiatives telles que le « Defence and Security Accelerator » (DASA) et le « Defence Technology Exploitation Programme » (DTEP) visent à soutenir les PME dans le développement de technologies innovantes et à faciliter leur intégration dans la chaîne d'approvisionnement de la défense.

On peut comparer la DASA à « l’Agence Innovation Défense » française dans son rôle d’accompagnement des technologies cruciales pour la défense.

 

Un nouveau modèle tourné vers l’export

Une des grandes priorités du nouveau système de procurement est le potentiel commercial des nouveaux matériels[xiv]. Les nouveaux programmes seront conçus pour répondre aux besoins des armées britanniques mais également pour ceux des clients étrangers et les alliés du Royaume-Uni.

La capacité pour la BITD britannique de s’imposer sur les marchés étrangers est importante car elle offre un levier de puissance pour la diplomatie britannique et permet une plus grande résilience du secteur grâce aux financements extérieurs via les ventes d’armement.

 

L’impact de l’effet « Augustine » sur les développements de matériel

L’effet « Augustine », du nom de l’ancien PDG de Lockheed Martin Norman Ralph Augustine, désigne l’augmentation des coûts de développement et d’achat de matériel militaire lié à leur haute sophistication technologique. A contrario des budgets de la défense qui augmentent difficilement, le coût des armements augmente de manière exponentielle[xv].

Dans le cas britannique, on peut comparer l’Eurofighter Typhoon et le programme Tempest (équivalent britannique du SCAF). Le coût unitaire d’un Typhoon est d’environ 110 millions de Livres Sterling alors qu’un exemplaire du Tempest pourrait valoir cinq fois plus[xvi]. Cette hausse des prix entraîne une baisse du nombre d’appareils qui seront opérés par la Royal Air Force, et par conséquent une perte de capacité d’action pour l’armée britannique. De plus, elle devra faire face à des adversaires ayant recours à des drones qui seront moins performants mais moins chers et plus flexibles.

 

La réforme du système de procurement pour tempérer l’effet « Augustine »

En impliquant les experts et industriels tôt dans la réflexion, le gouvernement britannique peut mieux identifier ses besoins actuels et futurs et les capacités de sa BITD. Ce meilleur ciblage des priorités offre au MOD l’opportunité de répartir ses ressources de manière efficiente.

Grâce au développement en spirale, les armées n’auront plus à attendre qu’un équipement soit entièrement finalisé, risquant ainsi l’obsolescence dès sa mise en service, mais pourront apporter leurs retours d’expérience pour améliorer leurs matériels et assurer leur avance technologique. La réforme du système promet une ouverture des marchés aux PME innovantes. Ces dernières sont vitales pour rester à la pointe de la technologie et éventuellement développer des alternatives plus abordables comme les drones.

Enfin, en tournant son modèle vers l’export, le Royaume-Uni peut poursuivre ses ambitions de systèmes d’armes avancés et onéreux. La prise en compte du potentiel commercial des nouveaux matériels peut constituer une sorte de partage indirect des coûts. Les industriels seront plus susceptibles d’investir s’ils savent que l’armée britannique ne sera pas leur unique client.

Un exemple d’adaptation de l’armée britannique à l'envolée des coûts et sa nouvelle philosophie de procurement est le char Challenger 3. Au lieu de développer un nouveau char d’assaut, l’armée s’est servie du Challenger 2 et l’a amélioré en se fondant sur son expérience et sur les enseignements de la guerre en Ukraine. Le nouveau canon développé avec l’allemand Rheinmetall permet une interopérabilité avec les obus des autres membres de l’OTAN. Le char a aussi été équipé de capteurs, d’un blindage amélioré ainsi que d’une protection active contre les projectiles. 

Ce choix est économiquement stratégique car les Britanniques peuvent mettre à niveau leur flotte de Challenger 2, ils n’auront pas à entraîner leurs équipages sur une nouvelle plateforme étrangère et s’ouvrent un nouveau marché avec la revalorisation des Challenger 2 déjà exportés[xvii]. Ces avantages sont néanmoins occultés par le faible nombre de char dans les stocks britanniques qui freine l’ambition commerciale. Avant d’exporter il faut déjà avoir assez d’équipement pour se défendre.

 

Les points faibles du système de défense britannique

A la fin de la Guerre Froide, la capacité industrielle de défense du Royaume-Uni a connu une forte réduction. Les réductions budgétaires se sont succédé les unes après les autres. En cause, la fin de la menace à l’Est depuis la chute de l’Union Soviétique. L’Occident ayant naïvement cru à un monde unipolaire où les conflits n'auraient plus lieu et dans lequel l’Europe ne serait plus menacée. Ce doux rêve d’un monde heureux grâce à la mondialisation et à la fin de la Guerre Froide, n’a eu pour conséquence que la perte de capacités dans les domaines de la construction navale, de l’aérospatiale, de l’électronique de défense et de la production de munitions et d’explosifs. En interne, l’industrie de défense britannique souffre également de problèmes structurels. La désindustrialisation progressive, amorcée dès les années 1980, a entraîné une perte de compétences et une diminution des capacités de production nationales. Cette situation est exacerbée par le vieillissement de la main-d’œuvre qualifiée, tandis que les investissements dans la formation des nouvelles générations restent insuffisants. Par exemple, le recrutement d’ingénieurs spécialisés dans l’aéronautique ou les systèmes électroniques est de plus en plus difficile, menaçant les délais et la qualité des projets en cours.

 

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Statistiques annuels détaillant l’équipement et les formations des forces armées du Royaume-Uni pour l’année 2023[xviii]

 

La situation à laquelle elle doit faire face aujourd’hui, n’est semblable à aucune autre. L’armée britannique ne peut plus combattre efficacement les défis et les problématiques qu’un monde en pleine mutation apporte avec lui. Actuellement les réserves et la capacité industrielle du Royaume-Uni, en matière d'armement, sont particulièrement préoccupantes. L’ancien directeur de la Defense Assessment Agency de 2022 à 2024, Rob Johnson a déjà mis en exergue les problèmes qui touchent les forces armées britanniques[xix]. Il est d'ailleurs l'une des personnes les mieux placées pour le savoir dans la mesure où cet organisme contrôle l’état, le service et les dépenses des forces armées. À ce titre, il a chargé à avertir le public et les dirigeants du pays de l’urgence de la situation. Les réserves d’armement des forces armées britanniques sont si basses, que le Royaume-Uni ne peut mener que des missions visant au maintien de la paix et à vocation humanitaires, telles l’évacuation de population ou le combat de groupes de sabotage[xx]. Ce niveau critique concernant l’état de préparation au combat de l’armée britannique est au niveau le plus bas jamais atteint durant toute son histoire. Une telle faiblesse en matière d’armement, empêche les forces armées britanniques de mener un conflit armé à grande échelle quelle que soit son ampleur. La principale raison de cette incapacité à mener un conflit de haute intensité sur une longue durée, réside dans le manque de munitions lors des opérations de combat. Une situation qui devrait arriver bien trop vite, pour pouvoir permettre aux forces armées britanniques de faire face à la menace. Une telle situation empêche ni plus ni moins le Royaume-Uni de défendre son territoire national et ses intérêts dans le cadre d’un conflit de haute intensité. 

 

L’armée de terre en capacité d’aligner trop peu de chars de combat

Le Royaume-Uni, n’a jamais été une puissance terrestre, préférant toujours dominer les mers pour soumettre ses adversaires par le contrôle des flux maritimes notamment commerciaux. Hélas, cette vision centrée sur l’aspect naval, n’est plus suffisante aujourd’hui, dans un contexte de guerre asymétrique de plus en plus répandue. La plupart des combats auxquels doit faire face le Royaume-Uni se déroulent sur la terre ferme et non pas sur les mers. C’est sans doute, une réalité dure à prendre en compte pour le commandement britannique et cela se ressent dans le nombre de chars composant l’armée britannique. La triste réalité devient trop flagrante pour pouvoir fermer les yeux sur celle-ci. Aujourd’hui, on estime que plus de 200 chars d’assaut sont théoriquement possédés par l’armée de terre britannique. Dans les faits, les estimations sont beaucoup pessimistes et on estime à une quarantaine seulement le nombre de chars qui seraient réellement opérationnels. 

Une quantité qui se compose essentiellement du char de combat britannique dénommé Challenger 2, entré en service en 1998. Il fait face à une obsolescence de plusieurs de ses systèmes, obligeant les ingénieurs britanniques à penser à une modernisation complète. Une modernisation qui doit déboucher sur le Challenger 3. Un ambitieux programme qui doit moderniser près de 148 chars Challenger 2 d’ici 2030. Si des ajouts en ce qui concerne le canon, la suite électronique et une meilleure protection sont des bonnes avancées, ils ne remplacent pas l’important manque en terme numérique de chars pour constituer une force de frappe suffisante au sein de l’armée britannique[xxi]. Tous ces manquements empêchent d’exporter du matériel d’armement à l’étranger, dans la mesure où il n’y en a pas assez pour l’armée britannique et qu’il y a trop de problèmes techniques avec celui-ci.

 

La réduction drastique du potentiel opérationnel de la Royal Navy 

Les chars de l’armée de Terre ont déjà mis à mal, la capacité opérationnelle de la force armée britannique. Cependant, à ce constat déjà inquiétant s’ajoute celui de la marine. La célèbre Royal Navy n’a plus rien à voir avec ce qu’elle fut par le passé. Elle aussi a été lourdement impactée par les réductions de budget. Concrètement le nombre de frégates et de destroyers est passé de 19 à 17 car ils étaient considérés comme trop coûteux à entretenir. Néanmoins, cette estimation est encore trop haute, en réalité seulement 11 à 12 navires sont en capacité de fonctionner d’après Mark François[xxii]. La Royal Navy considérant son nombre de navires, ne peut organiser le service nécessaire dans l’Atlantique Nord pour rechercher les sous-marins russes. A un moment, où la guerre en Ukraine démontre à quel point la Russie est prête à employer la force pour défendre ses intérêts. 

Le fait que le Royaume-Uni, ne soit pas capable d’assurer la surveillance dans cette zone alors-même qu’elle est connue pour être un lieu de transit des sous-marins russes, à l’instar du sous-marin russe détecté au large des côtes bretonnes le 29 septembre 2022 pose question en ce qui concerne les capacités de la Royal Navy[xxiii]. Avoir deux porte-avions est un point fort pour la Royal Navy mais elle ne dispose pas des navires de premier rang pour les accompagner. Il en va de même pour le manque de disponibilité de ses sous-marins nucléaires d’attaque (SNA)[xxiv]. Il ne fait aucun doute, que le manque de réserve en matériel de guerre est l’une des principales raisons pour lesquelles, le Royaume-Uni ne peut exporter.

 La Royal Navy ne dispose pas de matériel récent et en quantité raisonnable pour se priver d’approvisionnement ultérieurs qui seraient tournés vers l’export. L’accroissement du matériel vieillissant et l’absence de capacité à le remplacer par du matériel neuf avec des capacités en adéquation aux besoins modernes nuit à l’image d’exportations d’armement sur la scène internationale dans le domaine de l’armement. 

Concrètement cet affaiblissement de la Royal Navy s’exprime par la situation dans laquelle se trouve la flotte sous-marine britannique. Pas moins de six sous-marins d’attaque sont actuellement bloqués dans les bases navales par manque de quais de réparation disponibles. Le manque d'investissement dans les infrastructures de maintenance et de réparation en est la cause. Pour une nation comme le Royaume-Uni, qui a tiré toute sa puissance de sa flotte navale et sous-marine, une telle situation est un véritable signal d’alarme. Plus grave encore, la Royal Navy qui reste la référence en majeur de puissance navale dans l’imaginaire collectif n’est en réalité plus que l’ombre d’elle-même. Elle n’est composée plus que d’une quinzaine de frégates et destroyers en état d’opérer. Il y a vingt ans, cette même flotte disposait d’une trentaine de vaisseaux opérationnels. De nombreuses installations, comme les chantiers navals et les usines aéronautiques, n’ont pas été modernisées pour intégrer les avancées technologiques les plus récentes, ce qui limite la capacité des entreprises à répondre efficacement aux nouvelles demandes. Cette situation est particulièrement préoccupante dans le développement de systèmes complexes tels que les drones autonomes ou les technologies cybernétiques, où des infrastructures de pointe sont nécessaires.

 

L’insuffisance du nombre d'avions de combat de la Royal Air Force 

Après la marine et l’armée de terre, c'est bien la Royal Air Force qui subit de plein fouet les conséquences du rêve occidental d’un monde en paix perpétuel. Qui ne se souvient pas d’avions britanniques combattant la luftwaffe durant la Seconde Guerre mondiale dans l’un des nombreux films historiques passés au cinéma. Dans les années 2016,  elle représentait près de 724 appareils prêts au combat, aujourd’hui, c’est 564 appareils mais seulement 308 en service (tout appareil confondus).

Aujourd’hui, la RAF doit faire face à une situation sans égale. Elle ne dispose plus que de 137 Eurofighter Typhoons[xxv]. En 2021, dans un souci d’économie, le ministre de la Défense britannique Ben Wallace avait d’ailleurs dû faire face à la mise hors service de la flotte de C-130J Hercules, sept ans avant la date initialement prévue. Le fait que la RAF ait dû se séparer du C-130J Hercules au profit de l’Atlas A400M alors même qu’il est considéré comme médiocre par le parlement démontre à quel point l’industrie britannique n’a pas les moyens de remplacer le matériel de sa propre armée et par extension se trouve incapable d’exporter son matériel à l’étranger[xxvi].

 

Une dépendance aux importations 

Plus grave encore, sa capacité industrielle est remise en cause par sa très forte dépendance aux importations dans le domaine des matières premières, pourtant essentiels à la production d’armements. Bien que le Royaume-Uni possède un savoir-faire significatif dans certains domaines, notamment les moteurs d’avion (Rolls-Royce) et les systèmes de défense antimissiles (MBDA), il reste dépendant de composants critiques importés, tels que les semi-conducteurs. Cette dépendance fragilise la souveraineté stratégique du pays, notamment en cas de tensions commerciales ou géopolitiques avec ses principaux fournisseurs, tels que les États-Unis ou des pays asiatiques. Il en va de même pour les équipements militaires qui viennent pour certains de l’étranger. On peut notamment citer les avions de patrouille maritime P-8 Poseidon. 

Pourtant essentiel à la défense de la sécurité nationale britannique, cet avion de patrouille maritime est acheté auprès des Etats-Unis. Loin d’être, le seul produit d’importation en matière de défense. Le Royaume-Uni, se fournit également auprès des USA pour acheter des hélicoptères d’attaque AH-64 Apache.

Plus préoccupant encore, certains composants critiques pour les sous-marins nucléaires proviennent de fournisseurs étrangers. Cette situation a mis en lumière la dépendance de l’industrie britannique vis-à-vis des fournisseurs étrangers, une vulnérabilité accentuée par des décennies de désindustrialisation. Les retards provoqués par ces interruptions ont également engendré des dépassements de coûts pour de nombreux projets, réduisant encore davantage les marges déjà limitées des entreprises. Par ailleurs, la pandémie a eu un impact direct sur les équipes de production. Les restrictions de déplacement et les protocoles de distanciation sociale ont ralenti les opérations dans les usines, compliquant la coordination des équipes et limitant la capacité à maintenir les délais des projets complexes. À titre d’exemple, certains programmes phares, tels que le développement du chasseur Tempest, ont dû être réorganisés pour s’adapter aux nouvelles contraintes, augmentant encore davantage les incertitudes financières et stratégiques. N’étant déjà pas suffisamment préparé pour assurer l’autonomie stratégique du Royaume-Uni en cas de conflit majeur, il semble difficile d’exporter de l’armement à l’étranger[xxvii].

 

Un espoir de relance

Bien que la situation soit critique pour l’armée britannique. Plusieurs dépenses supplémentaires dans le domaine de la défense ont été annoncées durant l’année 2023. On estime le montant de ces dépenses supplémentaires à près de 5 milliards de livres sterling[xxviii]. Une telle augmentation permettrait de faire passer la part du PIB consacrée à la défense de 2.1% à 2.5% d’ici 2030. Cependant, nombreux sont ceux qui s’accordent sur le fait, que cela sera insuffisant pour remonter la pente dans laquelle s’est engagée l’armée britannique depuis deux décennies[xxix].

Néanmoins, plusieurs programmes de relance sont déjà envisagés pour relancer la capacité industrielle britannique. On y trouve d’ailleurs, une certaine facilité des Etats-Unis à investir dans la BITD britannique pour encourager cette relance[xxx]. Ils devront faire face à plusieurs problèmes de qualité et de fiabilité déjà anciens.

 

Problèmes de qualité et de fiabilité 

La base industrielle et technologique de défense britannique est longtemps apparue comme une référence à l’échelle mondiale, constituée d’entreprises solides capables d’exporter des matériels technologiques aboutis et fiables. S’appuyant sur son statut de vainqueur au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’Empire britannique a longtemps dominé le marché de l’armement à l’échelle mondiale.

Mais un tournant s’est opéré dans les années 70. Ce changement est notamment dû à la fin de l’empire colonial et au retrait des troupes britanniques de Suez en 1968 (engendrant une réduction des besoins en équipements militaires) et aux contraintes budgétaires croissantes qui marquent cette époque et notamment la crise économique de 1970. Ces changements ouvrent une ère de réduction progressive des capacités et des investissements dans le domaine de l’industrie de défense.

Cette contraction économique a poussé au regroupement et à la fusion des entreprises du secteur de la défense pour créer de grands conglomérats (comme BAE Systems), a privatisé une partie importante de ces entreprises et a engendré le délaissement voire l’abandon de pans entiers de la défense, réduisant ainsi l’autonomie stratégique du pays. Afin de maintenir leur activité, les entreprises restantes se sont tournées vers l’international afin de compenser la baisse significative des commandes passées par leur gouvernement. De telles  réductions budgétaires ont notamment eu un impact lourd sur la partie recherche et développement de cette industrie de défense et donc sur la qualité et la fiabilité de ces matériels à l’export. Plusieurs cas emblématiques peuvent être cités.

 

Le fiasco du développement du système SA80

Le SA80 (Small Arms for the 1980’) est une famille d’armes à feu développée par le Royaume-Uni à partir de 1972.

Cette famille comprend plusieurs modèles différents :

- fusil d’assaut L85 IW (Individual Weapon)

- mitrailleuse légère L86 LSW (Light Support Weapon)

- SA80 carbine L22

- SA80 carbine L98 (dédié à l’entraînement des cadets)

Entrés en service en 1985, les L85 et L86 ont vocation a remplacé le fusil d’assaut L1A1, le pistolet-mitrailleur Sterling, la mitrailleuse légère L4A4 et la mitrailleuse L7A1 GMPG, une partie des armes ayant été développées avant la Seconde Guerre Mondiale.

C’est l’entreprise Royal Small Arms Factory qui est chargée du développement de cette nouvelle génération d’armement léger d’infanterie.

L’objectif de départ de ce projet est de réaliser des économies d’échelle en maximisant le nombre de pièces communes entre les différents modèles, permettant ainsi de réduire les coûts de production et par la même occasion de faciliter l’entraînement des soldats (même type de structure pour plusieurs armes). Le but était d’en exporter un maximum, en espérant même en faire un standard OTAN.

Cependant, le SA80 va se révéler être un échec commercial.

Durant sa phase de développement, pressés par le temps et convaincus que leur concept est le meilleur, les Britanniques ne réalisent pas de tests intensifs avant 1977. Les essais qui sont conduits cette année-là se déroulent mal : les cartouches de calibre 4,85 x 49 mm sont massivement rejetées par les autres pays qui ne souhaitent pas totalement changer leur armement pour une cartouche qui ne présente pas réellement de meilleures performances que leurs propres munitions de calibre 5,56 x 45 mm. Mais surtout, les essais intensifs conduits montrent de sérieuses faiblesses dans la conception : le prototype appelé XL64 subit un incident de tir en moyenne tous les 97 coups, principalement lié à un problème d’éjection des étuis usagés qui ont tendance a bloqué le mécanisme. Il est également observé durant ces tests des passages inopinés du mode automatique au mode semi-automatique et inversement sans action du tireur. Afin de ne pas risquer de dépasser la date initiale de mise en service fixée à 1983, le choix est fait de convertir l’arme au calibre 5,56 x 45 mm OTAN et de simplifier sa conception afin de réduire les coûts de production.

L’objectif de ces nouveaux modèles produits et testés à partir de 1981 est d’accuser un incident de tir que tous les 2500 coups. Mais les phases de tests qui sont conduites apparaissent comme manipulées et manquant totalement d’objectivité, notamment au regard de la classification des incidents pris en compte : ne sont comptabilisés que les incidents considérés comme majeurs, c’est-à-dire ne pouvant être réparés par l’utilisateur seul. Le fusil étant livré avec une culasse de rechange, la rupture de culasse n’est pas exemple pas considérée comme un incident majeur. Il est à noter que cette culasse de rechange est supprimée du kit livré avec le fusil à la fin des essais. Malgré ces nouveaux standards, le modèle de test XL70 ne parvient à atteindre qu’un écart de 1250 coups entre 2 incidents.

Une nouvelle mise à jour est encore effectuée pour aboutir aux modèles XL85 et XL86. Afin de réaliser de nouvelles économies, les versions pour gauchers sont supprimées. La réalisation finale est donc effective en 1985, soit avec deux de retard sur la date prévue.

En raison de ces tests, puis une fois entrés en service, ces fusils conservent la réputation d’être de piètre qualité. Ils ont tendance à s’enrayer bien plus souvent que leurs concurrents en conditions d’utilisation normales, et s’avèrent être plus sensibles à la saleté et à la poussière. Les programmes de modernisation de ces armes, conduits en 2000 et en 2018, interviennent bien trop tardivement (notamment car le ministère de la défense refuse d’admettre l’existence de problèmes afin de ne pas remettre en cause les décisions politiques de départ) et ne parviennent pas à améliorer l’image négative que ces fusils véhiculent. Pour ces raisons, la production s’arrête en 1994 après que seulement 330.000 exemplaires ont été produits. Les seuls utilisateurs de ces armes hors Royaume-Uni sont des pays l’ayant reçu au titre de l’aide militaire (donc sans les avoir achetés).

Du fait de leur mauvaise fiabilité, la série des SA80, et en particulier le modèle L85, sont surnommés de manière peu flatteuse par les soldats britanniques the civil servant, « le fonctionnaire », parce qu’il ne fait pas le travail et qu’on ne peut pas s’en débarrasser.

 

Le retard du programme AJAX

Débuté en mars 2010, le programme Scout SV (dont la gestion a été confiée à General Dynamics Land Systems UK) avait pour but de remplacer les blindés CVR(T) (Combat Vehicule Reconnaissance Tracked) dont le développement datait du début des années 70. Les premiers de ces véhicules blindés (pouvant être déclinés pour différents usages : infanterie mécanisée, reconnaissance, génie, dépannage) étaient attendus en 2017.

Développé à partir de l’ASCOD Pizarro / Ulan (programme de développement d’un véhicule de combat d’infanterie hispano-autrichien), l’AJAX avait pour but d’entrer dans l’ère du combat info-valorisé et se voyait équipé de nombreux capteurs et systèmes de communication. Son armement repose essentiellement sur une tourelle équipée d’un canon de 40 mm. Problème majeur : l’ensemble de ces équipements a conduit à un alourdissement massif, bien trop important pour le châssis de base conçu pour un véhicule de 20 à 30 tonnes[xxxi].

Lors des premiers essais, il est apparu que l’AJAX ne pouvait pas rouler à une vitesse supérieure à 30 km/h sans être sujet à des vibrations excessives et bruyantes. Tellement bruyantes que les militaires britanniques chargés des évaluations ont dû faire tester leur audition (et certains seront d’ailleurs indemnisés pour de troubles persistants de l’audition à la suite de ces essais).Des soucis liés à la mobilité du véhicule sont également apparus durant ces tests, notamment son incapacité à franchir en marche arrière des obstacles de 20 cm de haut. A plusieurs reprises, le ministère de la défense britannique a pris la décision d’interrompre les essais de l’AJAX par « mesure de sécurité ». Les paiements dus à GLS UK ont été suspendus tant que ces problèmes ne seraient pas réglés.

En 2022, l’Infrastructure and Projects Authority classa même le programme comme programme « à risque », alors qu’il affichait déjà un retard de 5 ans. Ces retards et problèmes sont imputables à la manière dont le programme a été géré : exigence du cahier des charges bien trop nombreuses et évoluant au fil du temps, insuffisance des contrôles au fur et à mesure du développement du projet, notamment liés à la qualité.

Les solutions à ces divers problèmes ayant été trouvées par GLS, les paiements ont repris au premier semestre 2023.La capacité opérationnelle initiale de l’AJAX devrait être prononcée entre juillet et décembre 2025, soit avec 8 ans de retard. La pleine capacité est quant à elle attendue en 2028, voire 2029[xxxii]. Pour rappel, la commande initiale passée en 2014 prévoyait la livraison de 589 véhicules pour un montant de 4,5 milliards d’euros. On est donc encore loin de songer à une potentielle exportation… 

 

La disponibilité des chars CHALLENGER 2

En service depuis 1998, le char CHALLENGER 2 est le remplaçant du Chieftain. Il est développé par Vickers Defence Systemes (maintenant BAE Systems). L’aventure de ce char commence mal car tout juste sorti d’usine le 1er août 1994, le ministère de la Défense refuse la réception du premier lot dès le mois suivant car celui-ci ne répond pas aux standards de qualité et de fiabilité exigés. La date d’entrée en service est donc repoussée à 1998.

Le char Challenger 2 reprend une version modifiée du châssis du Challenger 1. Son canon de 120 mm est compatible avec l’ensemble des munitions du char Chieftain, mais ne l’est donc pas avec les munitions de 120 x 570 mm au standard OTAN.

Depuis son entrée en service, le Challenger n’équipe que la British Army et le sultanat d’Oman. Les choix de conception de ce char sont actuellement mis à l’épreuve du feu en Ukraine. En effet, 14 Challenger 2 ont été donnés aux Forces armées Ukrainiennes par le Royaume-Uni en 2023. L’emploi de ce char en zone de combat permet de comprendre pourquoi il a été si peu exporté. Le fait qu’il ne puisse pas tirer de munitions standardisées OTAN restreint sensiblement son soutien logistique. De plus, son rapport poids/puissance ne joue pas forcément en sa faveur. Affichant une masse de 64 tonnes, son groupe motopropulseur de 1200 ch n’est pas assez puissant (à masse équivalente, le Léopard 2 allemand et le M1A1 Abrams américain développent 1500 ch). Ce déficit joue sur sa mobilité : il reste coincé dans la boue parce qu’il est trop lourd » confiait dans un journal britannique un officier ukrainien après la livraison des 14 chars. Fort de ce constat, il est donc principalement cantonné à de l’appui d’infanterie.

Comme pour de nombreux matériels donnés par les occidentaux aux ukrainiens, les pièces de rechange manquent et les mécaniciens sur le terrain ne sont pas forcément formés pour les entretenir. Les patins de chenilles, les composants de la tourelle, les systèmes de visée ne durent pas longtemps. Sur les 14 chars livrés, 7 seulement étaient encore opérationnels début 2024[xxxiii].  Les faiblesses relevées par l’emploi de ce char dans des conditions réelles de combat permettraient d’expliquer le faible volume d’exportation.

 

Un système malgré tout résilient

L'évolution de l'exportation d'armement britannique au cours des 50 dernières années reflète les transformations profondes qu'a connues le Royaume-Uni, passant du statut d'empire colonial à celui de puissance moyenne cherchant à redéfinir sa place dans un monde multipolaire.

Dans les années 1970, la BITD britannique bénéficiait encore d'une solide réputation mondiale, s'appuyant sur une longue histoire d'innovation technologique et de production industrielle de haute qualité. Des projets emblématiques comme le chasseur-bombardier SEPECAT Jaguar, le char de combat Chieftain et le sous-marin nucléaire lanceur d'engins de classe Resolution démontrent la capacité du pays à produire des systèmes de pointe dans les domaines aérien, terrestre et naval, attirant l'attention des acheteurs internationaux.

Le Chieftain, en particulier, a connu un succès notable à l'exportation, notamment vers l'Iran avant la révolution islamique, renforçant la position du Royaume-Uni sur le marché international des armements. Cependant, cette période a également vu l'émergence de défis qui allaient façonner l'avenir de l'industrie : la nécessité croissante de collaborations internationales, la pression pour l'exportation afin de rentabiliser les investissements en R&D, et une concurrence accrue sur les marchés internationaux.

Au fil des décennies, l'industrie de défense britannique a dû s'adapter à un paysage géopolitique et technologique en constante évolution. La fin de la Guerre froide, l'émergence de nouvelles puissances économiques et militaires, et les révolutions technologiques successives ont profondément modifié les exigences en matière de défense et les dynamiques du marché international de l'armement.

L'exportation d'armement britannique a connu des hauts et des bas au cours des 50 dernières années, reflétant les transformations de la puissance britannique sur la scène internationale. Malgré des défis persistants, la BITD britannique a su s'adapter et maintenir une position significative sur le marché mondial grâce à son innovation technologique, ses collaborations internationales et sa spécialisation dans des domaines de haute technologie. L'avenir de cette industrie dépendra de sa capacité à continuer à innover, à s'adapter aux nouvelles réalités géopolitiques et technologiques, et à maintenir sa compétitivité face à une concurrence mondiale croissante.

 

Notes

[i] "UK Defence in Numbers," Ministry of Defence, 2023.

[ii] ”UK Defence Sector Suffers from STEM Skills Shortage”, IO Associates. 

[iii]CAAT - “Weaponizing Universities : Research Collaborations Between UK Universities And The Military Industrial Complex”, s. d.

[iv]Thornhill, J, “How Big Tech is winning the AI talent war”. Financial Times, 22 mars 2024

[v]Dyer, R. “Overcoming Workforce Challenges in the UK Defence Sector”, Moorhouse Consulting. Moorhouse Consulting, 1er octobre 2024.

[vi]  Louisa Brooke-Holland, “Defence procurement: challenges and reform”, 13 septembre 2024, House of Commons

[vii] “SIPRI, Yearbook 2024. SIPRI.

[viii] RETTER Lucia, DEE Stuart, « Pace Through Integration? UK Defence Attempts Procurement Reform, Again », Rand, 20 mars 2024

[ix] SYLVIA Noah, “Upgrading the British Army’s Tactical Communications: What Next?”, RUSI, 5 avril 2024

[x] Gouvernement Britannique, “MOD regional expenditure with industry 2022/23”, GOV.uk, 8 février 2024

[xi] SYLVIA Noah, “Can Technology Solve the UK Military’s Problems?”, RUSI, 22 aout 2024

[xii] Ministry of Defence, “Integrated Procurement Model”, GOV.uk, février 2024

[xiii] CARTLIDGE James, “Oral statement to Parliament : Defence Procurement Minister oral statement on the Integrated Procurement Model - 28 February 2024”, GOV.uk, 28 février 2024

[xiv] HILL John, “UK will have Integrated Procurement Model in “full flow by next year”, Army-Technology, 3 mai 2024

[xv] “Defence spending in a time of austerity”, The Economist, 26 aout 2010

[xvi] HARTLEY Keith, “‘Britain could soon lose control of its defence industry’ – expert Q&A”, Theconversation, 30 avril 2024

[xvii] PARAMESWARAN Swaraj, “What impact could the Challenger 3 Tank have on British military capability?”, Modern Diplomacy, 13 juin 2024

[xviii] ALLISON George, RAF aircraft numbers drop by 22% since 2016”, UK Defence Journal, 4 mars 2024 

[xix] KIRILL Ryabov, “Les défis de la défense britannique”, Top War, 8 juillet 2024 

[xx] KIRILL Ryabov, “Les défis de la défense britannique”, Top War, 8 juillet 2024 

[xxi] International Institute for Strategic Studies (IISS), “The Military Balance”2023 

[xxii]  ROMANACCE Thomas, “L’armée britannique n’a plus que 40 chars et quelques bateaux prêts pour une guerre”, Capital, 7 juillet 2023

[xxiii] “Un sous-marin russe repéré au large de la Bretagne avant d'être escorté par une frégate, Le Huffpost, 14 novembre 2022

[xxiv] LAGNEAU Laurent, “Pour le ministre britannique de la Défense, le Royaume-Uni n'est pas prêt à faire la guerre”, Zone Militaire OPEX360, 25 octobre 2024

[xxv] KIRILL Ryabov, “Les défis de la défense britannique”, Top War, 8 juillet 2024 

[xxvi] CHUTER Andrew, “Royal Air Force faces 'significant' aircraft shortfalls, report finds”, Defense News, 10 septembre 2023

[xxvii] TAYLOR Trevor, “Ministry of Defence’s post-Brexit spending power: Assumptions, numbers, calculations, and implications, Royal United Services Institute, 12 août 2016

[xxviii] PS avec AFP, “Royaume-Uni : un trou de 17 milliards dans le budget d'équipement de la défense”, BFM TV, 4 décembre 2023

[xxix] FEURESTEIN Ingrid, “Le Royaume-Uni renforce encore son budget militaire face aux nouvelles menaces”Les Echos, 23 avril 2024

[xxx] U.S. Department of Commerce, “Defense equipment – United Kingdom”. Trade.gov. 

[xxxi] LAGNEAU Laurent, “Les essais de l’Ajax, le futur blindé de la British Army, sont de nouveau suspendus, OPEX360.com, 30 juin 2021

[xxxii] LAGNEAU Laurent, “Le futur blindé Ajax de la British Army devrait entrer en service en 2025, soit avec huit ans de retard, opex360.com, 21 mars 2023. 

[xxxiii] LAGNEAU Laurent, “Faute de soutien, seulement 50% des chars Challenger 2 livrés à l’Ukraine sont actuellement opérationnels”, Opex360.com, 11 mars 2024.