Comment fonctionne une procédure d'alerte pour une société ?

Lorsqu'une entreprise fait face à des difficultés, il est possible que les dirigeants ne réagissent pas ou trop lentement. Ils peuvent en effet ne pas prendre conscience correctement de la situation ou ne désirent pas exposer leurs créanciers à des frayeurs. Ils peuvent également ne pas s'exposer à des poursuites. Dans ce cas, si le dirigeant ne réagit pas suffisamment promptement, l'entreprise pourra avoir des difficultés majeures. Le dirigeant peut alors être averti via un principe : la procédure d'alerte. Cette procédure vise à attirer l'attention du dirigeant sur les difficultés importantes. Mais comment cela fonctionne-t-il ? C'est ce que nous allons voir.

Acteurs associés à une procédure d'alerte

La procédure d'alerte peut avoir deux origines. Elle peut être :
● Interne ;
● Externe à l'entreprise.
Lorsque cette procédure est réalisée en interne, la procédure peut être déclenchée par différents acteurs.

Les associés

La procédure d'alerte ne peut pas être déclenchée par tous les associés. Elle est en effet réservée aux :
● Associés des SARL ;
● Associés des SA ;
● Associés des SCA ;
● Associés des SAS.

Dans ce cas, la procédure d'alerte ne peut être déclenchée par les associés que pour porter à la connaissance du dirigeant des « faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation » (articles L. 223-36 et L. 225-232 du Code de commerce). Les associés n'auront toutefois pas intérêt à ébruiter les difficultés rencontrées, et cela afin d'éviter d'effrayer les partenaires sociaux ou autres.
Alors, la procédure se déroule en différentes étapes. Dans un premier temps, la question relative aux difficultés rencontrées sera posée. Pour ce qui est des SA, SCA et SAS, cette question pourra être posée soit par un ou plusieurs actionnaires qui représentent au moins 5 % du capital de la société, soit par une association d'actionnaires détenant au moins 5 % des droits de vote. La question ne peut être posée que 2 fois par exercice du dirigeant. Elle doit également être posée par écrit et doit porter sur un fait, comme déjà indiqué, « de nature à compromettre la continuité de l'exploitation ». Vient ensuite l'étape de la réponse. Le dirigeant a obligation de formuler une réponse dans le cadre de la procédure d'alerte. Selon les articles R. 223-29 et 225-164 du Code de commerce, cette réponse doit être faite par écrit et dans un délai d'un mois à compter de la réception de la question. Troisième étape : informer le commissaire aux comptes. Le dirigeant doit transmettre, selon les articles L. 223-36 et 225-232 du Code de commerce, une copie au commissaire aux comptes de la question qui a été posée et de la réponse apportée. Le délai de cette transmission est de deux mois (articles R. 223-29 et 225-164).

Le commissaire aux comptes (procédure d'alerte cac)

Le commissaire aux comptes peut également déclencher une procédure d'alerte. La loi impose au commissaire aux comptes d'informer le dirigeant d'une entreprise s'il constate des faits risquant de mettre en péril celle-ci.

Toutefois, celui-ci n'est pas désigné dans toutes les entreprises. Cette désignation n'est en effet pas obligatoire. Désigner un commissaire aux comptes concerne uniquement les sociétés commerciales :
● Sociétés commerciales dont la désignation d'un commissaire aux comptes est obligatoire (sociétés anonymes, en commandite par action, à actions simplifiées) ;
● Sociétés commerciales dont la désignation d'un commissaire aux comptes est subordonnée à la taille (lorsque la clôture de l'exercice atteint 50 salariés, 1 550 000 euros pour le total du bilan, 3 100 000 euros hors taxe pour le chiffre d'affaires). Cela concerne uniquement les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée.
● Groupements d'intérêts économiques ;
● Personnes morales de droit privé non commerçantes et ayant une activité économique ;
● Entreprises publiques.

Le déclenchement de l'alerte est réalisé par le commissaire aux comptes. « Lorsque le commissaire aux comptes d'une personne morale relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation de cette personne morale, il en informe les dirigeants de la personne morale » (articles L. 234-1 et L. 612-3 du Code de commerce). Toutefois, cela reste flou puisqu'il y a peu de précisions dans les textes. L'alerte du commissaire aux comptes devra, au préalable, s'assurer qu'aucun élément ne menace l'équilibre financier de l'entreprise. Il pourra pour cela consulter les documents comptables et prendre en compte les éléments d'ordre économique. Son déroulement doit, effectivement, être analytique et synthétique. Le déroulement de la procédure se fait là encore en plusieurs étapes et selon le type d'entreprises.
Pour les SA, SCA et les SAS, il y a 4 étapes. En premier lieu, les dirigeants devront interpeller et répondre, par écrit (lettre recommandée avec accusé réception) et sans délai. Dans un deuxième temps, il y aura une saisine du conseil d'administration ou de surveillance. Puis vient la saisine de l'assemblée des actionnaires. L'ultime étape concerne l'information du Président du Tribunal de commerce. Ce déroulement est immuable.
Pour ce qui concerne les SNC, SCS et SARL, on trouve trois étapes : interpellation et réponse du dirigeant, convocation de l'assemblée générale, et information du Président du Tribunal de commerce.
Trois étapes sont aussi de mise pour les GIE : l'interpellation et la réponse des administrateurs, la convocation de l'assemblée générale et l'information du Président du Tribunal de commerce.

Trois étapes sont également à suivre pour ce qui concerne les personnes morales de droit privé non-commerçantes : interpellation et réponse du dirigeant, convocation de l'assemblée générale, et information du président du Tribunal de commerce.

Le comité d'entreprise

La procédure d'alerte peut également être déclenchée par le comité d'entreprise. Ce comité peut demander des explications s'il apprend des faits « de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise ». Contrairement au déclenchement réalisé par le commissaire aux comptes, le critère n'est pas ici de nature comptable.
La procédure se fait impérativement sous le sceau du secret. Les informations ne peuvent être divulguées à un tiers. La première étape est d'interpeller l'employeur. Un rapport sera ensuite établi. Vient ensuite la saisine (ou l'information) des organes sociaux.
Une procédure d'alerte peut également être déclenchée par un groupement de prévention agréé ou le Président du Tribunal de commerce ou de Grande Instance. Cela concerne deux types d'entreprises :
● Groupements d'intérêt économique et entreprises individuelles, commerciales ou artisanales ;
● Personnes morales de droit privé ou les personnes physiques exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante, professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire.
La procédure est identique à celle mise en place par le commissaire aux comptes. En premier lieu, le dirigeant sera convoqué. Un entretien aura lieu et le problème sera discuté.
Le Président du Tribunal de commerce ou TGI a trois types de prérogatives :
● Pouvoir de convoquer le dirigeant ;
● Pouvoir de renseignement ;
● Pouvoir d'injonction.

Comment fonctionne une procédure d'alerte pour une société

Pour éviter qu'une entreprise soit placée en procédure collective, plusieurs procédures peuvent être utiles (procédures de conciliation, par exemple). La procédure d'alerte est aussi un moyen d'anticiper les difficultés. Rappelons que cette procédure offre une information sur l'étendue des difficultés rencontrées qui peuvent menacer le futur de l'entreprise. Elle est lancée pour trouver des solutions le plus tôt possible. Si elle est utilisée rapidement, cette procédure peut en effet permettre de trouver des solutions permettant de résorber les difficultés.

Nous avons déjà mentionné les différentes étapes de la procédure d'alerte selon les différents acteurs. Reprenons généralement ces étapes pour comprendre le déroulement de base de la procédure d'alerte.

Informer

En premier lieu, il est indispensable d'informer le dirigeant. Il devra donc être interpellé et recevoir des questions concernant le pourquoi des difficultés rencontrées. Il devra y répondre le plus précisément possible et ne rien cacher. En effet, dans le cas d'une procédure collective ultérieure, son comportement pourrait être considéré comme fautif s'il cache des informations.

Transmettre

Cette réponse devra être transmise aux différents acteurs de la procédure d'alerte : comité d'entreprise, commissaire aux comptes, associés, président du Tribunal de commerce… L'assemblée générale sera convoquée et cherchera à trouver des solutions si les décisions prises par le Conseil d'administration sont insuffisantes.

Déclenchement de la procédure

Lorsque toutes les informations sont recueillies, la procédure peut être engagée. Elle sera utilisée pour trouver les meilleures solutions pour sortir l'entreprise de ses difficultés.

Le Tribunal de commerce

Lorsque les décisions prises en assemblées générales sont insuffisantes, il sera indispensable de faire appel au Tribunal de commerce. Celui-ci pourra alors déclencher la déclaration de cessation de paiement.

La procédure d'alerte a lieu s'il y a un dysfonctionnement en interne ou encore un problème financier qui peut compromettre l'avenir de l'entreprise. Il sera ainsi possible d'éviter le dépôt de bilan et les problèmes qui y sont liés (licenciements, faillite des différents fournisseurs…). Les problèmes de gestion (qui engagent la responsabilité du dirigeant) pourront aussi être évités.

Une procédure d'alerte est un événement qui peut s'avérer compliqué à mettre en place, même si les choses sont bien établies. Dans certains cas, en effet, des hésitations peuvent intervenir. Il pourra alors s'avérer utile de faire appel à des experts, comme une personne détenant un MBA en intelligence économique. C'est en effet la formation de référence pour tout ce qui concerne les problèmes économiques dans une entreprise. Cette personne connaîtra donc parfaitement toutes les subtilités du déroulement du droit d'alerte et pourra aider les groupes qui souhaitent entamer cette procédure.