Bien que le secteur de l’assurance ne soit pas le plus à plaindre des impacts de la crise sanitaire, il est intéressant de se demander comment le système français de remboursement en frais de santé fait face à cette situation inédite. Le choix de ce focus sur la branche santé des assurances n’est pas anodin. En effet, le rapport de force s’accentue entre l’Etat, par le biais des services de couverture santé publique, et les acteurs privés.
Un contexte inédit qui révèle un système inefficace
La prise en charge des frais de santé des Français s’articule de deux manières. La Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) rembourse une grande partie des frais de santé. Le complément de frais non-couvert par la CPAM est réglé soit par la CMU (Couverture Maladie Universelle, soumise à revenus) soit par la mutuelle éventuelle (régime de l’entreprise ou choix personnel) du patient. En d’autres termes, les frais de santé s’apparentent à un jeu perpétuel de ping-pong entre les acteurs privés, dont l’objectif est la recherche de profit, et le système d’Etat providence dont la caisse d’assurance maladie est excessivement déficitaire. Chacun adopte ses propres armes de dissuasion afin de couvrir le moins de coûts possibles. En ce qui concerne la pandémie de coronavirus, les frais de santé liés aux prestations de soin contre la Covid-19 ne sont pas entièrement pris en charge entièrement par la CPAM, le relai est donc pris par la CMU ou mutuelle. Cependant, le point noir de cette information est que les affections longues durées sont pourtant systématiquement couvertes entièrement en temps normal, et aucune information n’est disponible à ce sujet. En revanche, la réanimation figure parmi les services les plus chers du monde hospitalier. Cela laisse à penser que l’Etat a volontairement laissé les complémentaires santé prendre le relai de ces frais conséquents. Du côté des assurances privées, elles ont connu une baisse de régime pendant le confinement. En effet, ce sont près de 40% des dépenses santé en moins durant toute la durée du confinement.
L'affaiblissement de certains assureurs
Cependant, chacune des parties prenantes de la couverture des frais de santé française affiche des difficultés évidentes, d’autant plus au cours d’une crise sanitaire sans précédent. Les acteurs privés de l’assurance santé ont des obligations de taille. Le maintien d’un taux de solvabilité et des fonds propres suffisamment haut constituent une exigence considérable. D’autant plus que les marchés financiers se trouvent au plus bas et que l’Etat a instauré une taxe Covid aux assureurs santé afin de redistribuer leurs économies réalisées pendant le confinement bien qu’elles furent de courte durée puisqu’une fois le confinement levé les prestations ont repris de plus belle. La communication autour de ces décisions étatiques a par ailleurs orchestré le mécontentement des Français envers leurs compagnies d’assurance. Par conséquent, la baisse des ratios de solvabilité liée à la chute des marchés financiers, a pour conséquence une baisse de l’emploi à raison de plusieurs milliers de postes dans les assurances depuis le début de la pandémie.
Ceci dit, ce n’est sans compter la dégradation de la relation assuré / assureur le manque d’implications des compagnies d’assurance sans pour autant faire table rase de l’assurance santé qui a couvert une partie des soins liés au coronavirus.
Nécessité d'atténuer les contradictions entre les parties prenantes
Des organisations de professionnels ont d’ores et déjà tirer leur conclusion de la situation, à l’instar de la Fédération française d’assurances (FFA) qui, toutes couvertures confondues (santé, auto, exploitation…), a participé à hauteur de 3Mds€ au Fonds de solidarité mis en place par l’Etat. Le secteur des assurances est d’ailleurs à ce jour le premier acteur, en termes de volume de dons, à y avoir contribué. Cette générosité n’est cependant pas dénuée de la volonté de redorer l’image des assurances et donc d’influencer le grand public.
Certaines compagnies d’assurance réfléchissent également à comment les contrats d’assurance santé pourraient être revus à la demande du client, adaptés à ses besoins afin de regagner la confiance des assurés. Car, en contrepartie, il est évident que les comportements des Français en ce qui concerne leur couverture santé. Les clients qui ne peuvent prétendre à la CMU et qui n’avaient jusqu’ici aucune complémentaire santé vont être plus nombreux à souscrire un contrat afin de prévenir les dépassements de frais de prise en charge en cas de nouvel épisode similaire.
Enfin, l’Etat a marqué sa volonté de résilience avec création d’un fonds de solidarité en réponse immédiate à la crise sanitaire. Cette initiative pourrait par la suite faire l’objet d’un programme plus « long-termiste » sous la forme d’un fonds d’investissement où l’ensemble des acteurs privés du secteur de l’assurance santé participeraient afin de prévenir des pandémies. Une harmonisation à l’échelle de l’Union Européenne serait également intéressante à étudier.
Malgré le manque de perspective sur l’évolution de la situation actuelle, la Covid-19 aura permis au système de couverture santé français d’afficher l’ensemble de ses failles au grand jour. L’Etat français est dans l’incapacité de financer l’ensemble des soins liés au coronavirus. La branche de l’assurance santé en France a pâti des mouvements de révoltes envers les compagnies d’assurance, notamment en ce qui concerne la perte d’exploitation de nombreuses affaires. Tous les Français ne disposent pas d’une complémentaire santé…
Paloma Lopez