L'absence de guerre de l'information efficace pour lutter contre les fabricants de faux médicaments commercialisés en Afrique
200 milliards de dollars, c’est le marché des faux médicaments dans le monde et le continent africain avec un marché estimé à 45 milliards et l'un des continents les plus touchés, ainsi les médicaments faux ou falsifiés font 100 000 milles morts chaque année en Afrique. En 2013 L'OMD (l'Organisation mondiale des douanes) et l'IRCAM (l'institut international de recherche anti-contrefaçon de médicament), en partenariat avec les douanes, publie les résultats de l'Opération Biyela sur vingt-trois (23) pays africains avec la confiscation de 550 millions de faux médicaments et en 2016, une saisie records de 113 millions de faux médicaments avec une destination pour 35 % d'entre eux, le Nigéria, porte d'entrée du continent. Plus globalement, l'Afrique subsaharienne subit l'importation et la consommation de faux médicaments et concentre 42% des importations de médicaments falsifiés, favorisées par la pauvreté des populations et l'absence d'organisme de santé contrôlés.
Les faux médicaments tuent en Afrique
Au Sénégal, L'assurance maladie ne couvre pas toute la population, beaucoup ont recours à des médicaments vendus dans la rue et les boutiques, avec des produits moitié prix de ceux vendus en officines, ils sont utilisés sans contrôle de leurs efficacités et dangerosités, les principes actifs sont soit sous dosés, où la molécule a été remplacée par une autre. Mais ces traitements comme les antipaludiques, médicament de première nécessité en Afrique, font plus de 120 000 mille décès sur des enfants avant leurs 5ème année. Dernièrement, les pharmaciens sénégalais demandaient de lourdes sanctions suite à de nouvelles saisies. Depuis 2017 et la mise en place du Conasen (Comité sénégalais de lutte contre les faux médicaments et l'exercice illégal de la pharmacie), les importations de faux médicaments sont toujours aussi présentes. L'ordre des pharmaciens sénégalais demande l'application de la Convention médicrime, texte qui criminalise la fabrication et la vente de médicament. Mais le Sénégal n'a pas ratifié le texte. Aujourd'hui un (1) médicament sur dix (10) dans le monde est une contrefaçon, et sept (7) médicaments sur dix (10) sont des contrefaçons en Afrique.
La Chine et l'Inde, les pays producteurs des faux médicaments
La Chine, l'Inde et le Nigeria sont les principaux pays importateurs et producteurs de faux médicaments soit l'équivalent de 10% du marché mondial, avec des produits les plus contrefaits et les plus porteurs que sont les antipaludéens, anti-inflammatoires, antibiotiques et analgésiques. La majorité des produits meurtriers sont introduit par mer, certains pays produisent à l'intérieur du continent, ils bénéficient de la porosité des états africains avec des milliers de point d'entrées. La répression sur le trafic des "faux médicaments" à l'inverse des stupéfiants, reste très faible, en effet les autorités et les différentes justices des pays africains, ne leur appliquent qu'une réprimande en contrefaçon, le trafic est très rentable. Ainsi, la frontière entre les médicaments génériques et la contrefaçon est très mince, trop mince pour en faire des exemples. Avec un marché à 45 milliards pour 2020, lié à l'évolution démographique et au renforcement des assurances et des remboursements, le trafic de faux médicaments sur le continent africain, faute de sanctions, augmentera ainsi que la mortalité et pour l'économie et pour exemple la Côte d'Ivoire, une perte de 60 millions d'euros sur l'économie du secteur pharmaceutique.
La riposte des états africains et de l'Union Européenne
Le Kenya a réalisé un partenariat avec la MEDS (Mission for Essential Drugs and Supplies) et US Pharmacopeial Convention, des organismes américains qui créent les standards des produits pharmaceutiques et qui sont suivis par 140 pays. L'objectif est d'offrir une visibilité et une viabilité sur la consommation des médicaments. Et pour renforcer sa législation, le Kenya c'est doté d'une loi en contrefaçon depuis 2011. D'autres initiatives kenyanes, avec les nouvelles technologies, viennent en appuis des consommateurs, ainsi en 2018 une application permet d'identifier les médicaments autorisés à être vendus au Kenya.
La traçabilité des "bons "médicaments est en plein essor avec hologrammes sur les boites, code-barres.. Depuis 2013 " Le système mondial de surveillance et de suivi des produits médicaux de qualité inférieure ou falsifiés", a été créé pour les Etats voulant y adhérer, actuellement 113 pays y sont formés à la détection des faux médicaments. L'union Européenne est aussi présente, avec la directive sur la circulation des produits médicaux " falsifiés", la "chasse au faux médicaments" un fléau mondial.
Les majors pharmaceutiques misent sur l'Afrique
Les grands groupes pharmaceutiques sont déjà présents sur les deux plus gros marchés mondiaux que sont la Chine et l'Inde qui représentent près de la moitié de la population mondiale, l'Afrique avec son premier (1) milliard d'habitant d'ici à 2050 représente le futur marché à conquérir de la planète. En vingt ans (20), la consommation de médicaments a été multipliée par 5, cela veut dire que le continent africain a besoin soins et de médicaments, d’où l'intérêt des majors pharmaceutiques. Le groupe français Sanofi présent sur 78 pays, dont 6 en Afrique a inauguré son plus gros complexe de production en Algérie fin 2018, le groupe renforce sa présence en Afrique et participe à la lutte contre les faux médicaments. En 2008 Sanofi lançait " le laboratoire central d'analyse de contrefaçon à Tours" ce qui lui permet d'être à la pointe de la recherche en contrefaçon.
Faux médicaments : Un prétexte pour la reprise du marché des laboratoires
Tous les majors pharmaceutiques sont en guerre ouverte sur la question des faux médicaments à travers la planète et directement sur leur marché. Les Etats dirigeants et les différents services publics des pays du nord ont des législations et des textes de lois leur permettant de produire et de distribuer sur leurs marchés en toutes sécurité. A l'instar de Sanofi, les laboratoires veulent reprendre la main sur un marché existant et en devenir, ainsi ils ont tout intérêt à participer activement à la lutte contre les faux médicaments et à développer des partenariats avec les Etats africains en matière de sécurité et de contrôle.
C'est d'ailleurs des conventions avec les différents ministères de santé qui permet à Sanofi d'être au plus près des populations pour apporter des solutions sur des maladies de civilisation, présentes dans les pays où le laboratoire est implanté, avec des traitements déjà éprouvés dans des pays développés, des brevets de médicaments génériques à forte rentabilités. Les laboratoires en Europe, et les obligations des Etats membres, obligeant la réduction des dépenses de santé, en instaurant l'utilisation des médicaments génériques est un bon alibi pour développer les ventes sur un continent en croissance à deux chiffres avec des produits manufacturés, produits directement sur le continent africain.
Les majors mondiaux des médicaments entretiennent d'étroites collaborations avec les ONG par le biais de subventions, ce qui in-fine ouvre une porte sur les populations et une position dominante sur des pays en forte demande de soins et de médicaments, Novartis (Suisse) et GSK (Uk) l'ont bien compris, eux aussi abordent le continent avec les différentes ONG, afin de promouvoir Leurs produits. Les laboratoires sont au plus près des décideurs aux niveaux gouvernementaux des pays en développement, ce qui leurs permet de proposer des solutions globales de santé, à commencer par les différents dépistages (VIH, Hepatite C..), des solutions stables leurs permettant de sécuriser le marché. 90% des urgences en soins et en médicaments proviennent de pays en développement et seul 10% des populations en bénéficie.
Didier Gix