Polémiques sur les origines de la peste porcine

Le contexte


Le 28 Août dernier, l’Agence des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation annonçait que l'épidémie de peste porcine africaine (PPA) qui sévissait en Chine, ne faiblissait pas, bien au contraire. Malgré les mesures d’abattage et de confinement prises par les autorités, la PPA a fait un bond de plusieurs centaines de kilomètres depuis l’Europe de l’Est, lobant l’Allemagne pour atterrir à la frontière franco-belge. Alors que les acteurs de la filière porcine française s’inquiètent, la question de l’origine de la propagation se pose sur les réseaux sociaux. Le facteur humain est indéniable puisque la transhumance naturelle d’un sanglier malade sur une telle distance est impossible. Deux options : soit un humain a amené le virus via de la viande contaminée, soit un humain a amené un sanglier contaminé. Selon le Réseau de surveillance sanitaire de la faune sauvage en Région wallonne, « le virus est très résistant dans les produits infectés, il survit jusqu’à trois mois dans de la viande réfrigérée ». En conséquence, l’hypothèse d’une denrée alimentaire contaminée, venue de l’Est, jetée par un tiers, retrouvée et mangée par des sangliers paraît la plus plausible. D’autant plus plausible que, d’avis d’experts, le fait qu’un sanglier malade ait été amené par un camion est « impossible ». L’animal ne survivrait pas au trajet ! 

La rumeur


Néanmoins, une autre explication est avancée : des chasseurs fortunés auraient importé en toute illégalité des sangliers afin de pouvoir les tirer dans des chasses commerciales. Ainsi, en juin 2018, Michel Servais, représentant de l’Association des chasseurs wallons, s’étonnait des « générations spontanées » de sangliers. Leur carrure (250 kilos à la balance) justifierait l’importation. Le ministre de l’Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme et du Patrimoine, René Collin, reconnaissait qu’un suivi génétique de la population des sangliers démontrait « l’existence de sangliers dits « éloignés » ».  Côté français, la FNSEA, la Fédération nationale porcine (FNP) et la Fédération nationale des chasseurs (FNC), exprimaient leur inquiétude quant à la propagation de la PPA sur le territoire et aux répercussions économiques immédiates dans un communiqué de presse commun publié le 27 septembre 2018. A son issue et en réaction, la polémique enfle ! Les internautes s’expriment : « Il semble que vous ignorez qu'un camion transportant des sangliers a été vu dans les Côtes d'Armor il y a environ une dizaine de jours. Le malheur est que celui qui les a vus n'a pas pris de photos ni de n° de plaque. Dommage ! Ne vous inquiétez pas, si la PPA arrive chez nous, ils vont vous faire abattre des centaines de cochons d'élevage mais ils ne toucheront pas aux sangliers. Cherchez l'erreur. » 

Les parties prenantes concernées par la polémique


La FNSEA : La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), fondée en 1946, est le syndicat professionnel majoritaire dans la profession agricole en France avec 55,31 % des votes aux élections aux chambres d’agriculture en 2019, dans la liste commune avec le syndicat Jeunes Agriculteurs. La FNSEA fait partie des organisations patronales françaises et des organisations professionnelles agricoles. L’interprofession nationale porcine rassemble tous les métiers de la filière porcine française : fabricants d’aliments pour les porcs, éleveurs, coopératives, abatteurs-découpeurs, industriels de la charcuterie-salaison, grande distribution, artisans bouchers et charcutiers-traiteurs, restauration collective. Elle défend les intérêts de la filière porcine française, met en œuvre des actions collectives d’intérêt général et est également un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics. La Fédération nationale des chasseurs (FNC) : Présidée par Willy Schraen, la FNC regroupe l’ensemble des fédérations départementales et régionales des chasseurs et représente environ 1,1 million de chasseurs français. La FNC est considérée comme un lobby puissant. 

Une mobilisation collective


Le 2 octobre 2018, le ministre de l’agriculture, Stéphane Travert, conviait l’ensemble de la filière porcine et une délégation de la Fédération Nationale des Chasseurs (FNC) pour évoquer le sujet de la PPA. Lors de cet entretien est ressorti que la réaction très rapide des fédérations de chasseurs et de l’Etat français, avait permis de mettre en place différentes mesures de surveillance ayant abouti à considérer que la France est indemne de PPA. En date du 21 janvier 2019, son successeur, Didier Guillaume adopte la même stratégie d’implication de tous les acteurs. « Le ministre compte beaucoup sur les chasseurs pour participer activement à la veille sanitaire et contribuer à l’éradication des sangliers dans la zone blanche. » déclare Willy Schraen qui partage la même analyse que le ministre sur les conséquences catastrophiques de l’extension possible de la PPA, à la fois pour les éleveurs et pour les chasseurs, et sur l’urgence de prendre des mesures drastiques pour contenir la maladie. Un déplacement commun (interprofession nationale porcine / FNC) dans la zone blanche a été proposé par Didier Guillaume. Le 20 mars dernier, lors du congrès de la Fédération Nationale des Chasseurs, quatre ministres, Didier Guillaume, Emmanuelle Wargon, Sébastien Lecornu et François de Rugy, ont exprimé aux chasseurs la reconnaissance de leur rôle dans la ruralité, la gestion et la préservation des territoires. Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture, a évoqué les chasseurs comme étant des acteurs essentiels du monde rural. 

 

Angélique Guettier