La politique de puissance de l'Inde en matière de transactions financières
Cette action est un geste fort à la fois envers les puissances occidentales, mais aussi envers sa population. Car en voulant donner le marché des transactions financières à des acteurs locaux, le Premier Ministre s’assure l’émergence d’au moins un champion mondial dans la finance, mais aussi un contrôle sur toute la population indienne.
La loi au service de la stratégie
(BJP).
Cash et protection des données
Afin de s’emparer du marché, Modi va jouer sur deux tableaux : la souveraineté financière et la protection des données.
, dont le but est de protéger les données des indiens, en interdisant tout transfert des dites données à un tiers sans que la personne n’en soit informée. C’est sur cette loi que s’est appuyé le gouvernement pour forcer les sociétés étrangères à partir. Car ces dernières sont justement exclues du marché parce qu’elles n’ont pas pu se plier aux lois de rapatriement des données. Le gouvernement a t-il fait exprès de mettre un ultimatum aussi court afin de faire capoter toute chance de succès de rester sur le marché indien ?
).
Nous pouvons même partir du postulat que ce mouvement risque de se poursuivre afin d’attaquer les GAFA et de mettre la main sur absolument toutes les données de la population indienne. Le gouvernement fait déjà tout pour les forcer à stocker les données utilisateurs sur place, et à avoir accès à ces données. Si cela va à l’encontre de ces entreprises américaines (et de leur gouvernement ?), cela représente à la fois des investissements massifs à réaliser dans le pays, mais aussi un moyen de contrôle incroyable pour le gouvernement. Et force est de constater que si les GAFA ne se plient pas à la loi, ils subiront le même sort que Visa, Mastercard et American Express.
Dans la foulée des systèmes de paiement, va-t-on bientôt voir l’apparition d’un Facebook indien, d’un Twitter indien, d’un Amazon indien ? Il y a fort à parier que de potentiels champions vont apparaître et que la loi va subitement se durcir pour les acteurs américains.
Le contrôle des paiements et le contrôle de la population
. Ce projet comprend un numéro d’identification national et les informations propres à un individu, ainsi que la photographie des iris, du visage et des empreintes digitales. Cette volonté de sécurité s’inscrit dans le contexte de tensions religieuses internes et les troubles à la frontière pakistanaise. Les attentats ensanglantent le pays de 2001 à 2008, avec les tristement célèbres attentats de Bombay en 2008, ont été un véritable tournant dans la politique sécuritaire indienne, légitimant le lancement de l’Aadhaar en 2010, et accentuant les tensions religieuses. Il est également à noter que ces attentats ont été perpétrés par des pakistanais ou des indiens musulmans soutenus par des réseaux pakistanais.
L’Inde, dont l’hindouisme et sa promotion font écho à la politique nationaliste du BJP, a toujours cette peur d’un retour des attentats islamistes ou des massacres de musulmans organisés par les nationalistes indouistes.
Il faut également souligner la présence d’une importante minorité tibétaine ayant fui la Chine, soutenant le Dalaï Lama, et s’orientant vers des actions fortes antichinoises. Il est là fort à parier que cette minorité va être un point de négociation avec Pékin si celle-ci entreprend des actions transfrontalières, et nécessite d’être comprise et … contenue.
Chine, Bangladesh) et avec sa diaspora. En poussant même la témérité et le culot, l’Inde pourrait implanter ses nouveaux champions du paiement chez ses voisins, et par la même occasion, s’offrir un moyen de surveillance et de contrôle digne des plus grandes puissances.
L'Inde affirme une volonté de souveraineté
». La messe est dite.
, de l’Observer Research Foundation et expert en questions géostratégiques, « L'Inde est très importante pour la politique américaine dans l'espace Indo-Pacifique et ils ne trouveront pas d'allié de la taille et du poids de l’Inde ».
Olivier Mery