La question prioritaire de constitutionnalité (QPC) : une arme juridique communément utilisée par le monde des affaires

  

 

  

  

La QPC est en droit français une procédure de contrôle de constitutionnalité sur les lois déjà promulguées[1]. En substance, cette question permet sous certaines conditions, de demander au Conseil constitutionnel de vérifier si une disposition législative ne serait pas inconstitutionnelle, en ce qu'elle « porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ». Cette disposition de la Constitution est entrée en vigueur le 1er mars 2010, alors que ses racines sont plus anciennes dans certains pays, comme aux États-Unis par exemple, où ce droit existe depuis 1803[2]. Depuis son existence, la QPC est à l'origine de plusieurs centaines de décisions rendues[3] par le Conseil constitutionnel, et en particulier, celle du 6 octobre 2017[4] qui fait déjà date : les Sages de la rue Montpensier ont invalidé dans son intégralité une taxe de 3% sur les distributions de revenus, communément appelée "taxe sur les dividendes", un prélèvement concernant les grandes entreprises et institué en juillet 2012. En effet, le Conseil constitutionnel a jugé que cette taxe était contraire au principe constitutionnel[5] d’égalité devant l’impôt. 

En conséquence, cette censure a obligé l'État français à rembourser 10 milliards d'euros aux entreprises. La moitié de cette somme, augmentée des intérêts moratoires, retournera dans les caisses des 13 plus grands groupes contributeurs. [6] Qu'est-ce que précisément une QPC ? Comment les opposants à la taxe s'en sont-ils saisis pour faire abroger le texte de loi controversé ? L’usage de cette disposition constitutionnelle par la sphère économique peut-il mener à des dérives ? Focus sur un recours issu du droit public et faisant désormais partie intégrante des stratégies juridiques et dispositifs d’intelligence économique du monde des affaires.

Leila Sarfati Ghilas


  

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Notes 

[1] Dit « contrôle de constitutionnalité a posteriori ». 

[2] la Cour suprême établit ce principe dans son arrêt Marbury v. Madison du 24 février 1803. 

[3] Source : site du Conseil constitutionnel. 

[4] Décision n° 2017-660 QPC du 6 octobre 2017. 

[5] Le principe d’égalité fiscale est d’abord entendu comme l’égalité des contribuables devant l’impôt. C’est le fondement de la justice fiscale. Ce principe d’égalité fiscale consiste également en l’égalité des contribuables devant la loi fiscale. Il découle des articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (DDHC), adoptée le 26 août 1789, qui proclament respectivement l’égalité des hommes et l’égalité devant la loi. Un même régime fiscal doit alors s’appliquer à tous les contribuables placés dans la même situation. 

[6] Article du Figaro du 27/10/2017 : « Taxe sur les dividendes : autopsie d'un « scandale d’État » à 10 milliards ».