Entre 2005 et 2007, en tant qu’attaquante ou attaquée, Danone a subi plusieurs revers en matière de guerre de l’information à l’étranger. A l’inverse en 2005, la mobilisation générale en France face à la rumeur orchestrée de l’OPA hostile de PepsiCo sur Danone semble attester d’une réelle capacité à mener des offensives en matière informationnelle. Cette réussite pourrait bien ne pas être le fruit d’une véritable stratégie mais bien d’une simple facilité, pour une entreprise de cette taille, à mobiliser les pouvoirs publics et la presse de son pays d’origine.
Une offensive ratée en Argentine
En 2005, Danone tente de profiter du retrait de l’eau minérale de marque Dasani du marché britannique et européen par Coca Cola au motif qu’elle contenait des substances cancérigènes. La firme américaine souhaite alors introduire cette eau sur le marché argentin que Danone a déjà investi par le biais d’une filiale. L’entreprise française décide avec l’aide de son conseil Euro RSCG de propager de rumeurs arguant de la dangerosité de ce produit auprès d’ONG et d’organes de presse. Après deux ans d’enquête, Coca Cola remonte à la source de cette rumeur orchestrée par mails anonymes et met en cause la filiale argentine de Danone ainsi qu’un cadre d’Euro RSCG. Une plainte est déposée par Coca Cola. Si en première instance la multinationale américaine est déboutée, le juge reconnaît néanmoins l’origine de la rumeur. Si le résultat économique pour Danone est incontestable puisqu’il a bien ralenti l’entrée de cette eau minérale sur le marché, les techniques utilisées ont permis de mettre à jour le commanditaire. En appel, Coca Cola gagne sur le fondement suivant : « Il est possible de supposer que les responsables de cette campagne avaient prévu que certains des acheteurs potentiels du produit (Dasani), en raison des informations malveillantes diffusées via Internet, choisiraient des produits similaires (eau), un secteur du marché dominé par l’entreprise accusée (Danone) ».
Une défaite subie en Roumanie
En août 2007, la presse roumaine accuse la filiale locale de Danone de produire et distribuer des yaourts aux fruits susceptibles de contenir de la dioxine, substance potentiellement cancérigène. Cette campagne relève du dénigrement quand d’autres ressorts sont mis en œuvre sur le terrain émotionnel. Les médias expliquent en effet que Danone est l’un de principaux fournisseurs des écoles roumaines mettant ainsi en danger les enfants roumains. Un stade supplémentaire est atteint lorsque le parallèle est fait avec la tentative d’empoisonnement du Président Ukrainien Viktor Luscenko avec photos à l’appui. Cette campagne intervient alors qu’un produit concurrent est lancé sur le marché.
Danone arrête la commercialisation des yaourts litigieux bien qu’un laboratoire soit nommé pour démontrer qu’il n’y a pas de danger à la consommation de ces yaourts. Cette campagne fait perdre 20% de parts de marchés à Danone, Le dimensionnement de la réponse apportée par Danone tient plus de la simple défense que de la contre-attaque.
Des rumeurs contrées en France
Retour en 2005 en France cette fois, au mois de juillet nait une rumeur d’OPA hostile de la part de PepsiCo sur Danone. Après l’annonce par le magasine Challenge le 6 juillet, le titre bondit et la mobilisation est générale : de l’association des petits porteurs d’actifs au Président de la République, chacun se mobilise pour « défendre les intérêts de la France » selon les propos du Premier Ministre Dominique de Villepin. S’il semble aujourd’hui avéré que PepsiCo avait bien mandaté son Directeur financier pour diriger une OPA contre Danone alors sous-valorisée sur les marchés financiers, c’est bien l’entreprise française qui aurait fait naître cette rumeur afin d’organiser sa défense. Si l’augmentation du cours de bourse a pu contribuer à dissuader PepsiCo de porter son projet, c’est à coup sûr la mobilisation des dirigeants politiques qui a incité la multinationale américaine à annoncer par la voie de l’AMF qu’elle n’avait pas l’intention de lancer une telle opération.
De nouvelles rumeurs sont à apparues au mois de juin 2016 à la faveur d’un exécutif jugé plus ouvert et Danone semble avoir utilisé les mêmes recettes d’influence nationale puisque le 30 août, aux Université d’été du Medef, le Ministre de l’économie a affirmé : "Qu'il s'agisse de Danone ou de n'importe quel autre groupe français stratégique, nous ne laisserons pas des prédateurs s’attaquer aux entreprises qui font le patrimoine économique de notre pays".
Si la mobilisation des réseaux fonctionne jusque-là en France, la capacité d’influence de Danone à l’étranger semble bien plus fragile. La défense des intérêts du groupe semble plus axée sur la santé et donc sur la communication que sur une stratégie intégrant des techniques de guerre informationnelle dont elle a pourtant été victime.
Emmanuel François
Une offensive ratée en Argentine
En 2005, Danone tente de profiter du retrait de l’eau minérale de marque Dasani du marché britannique et européen par Coca Cola au motif qu’elle contenait des substances cancérigènes. La firme américaine souhaite alors introduire cette eau sur le marché argentin que Danone a déjà investi par le biais d’une filiale. L’entreprise française décide avec l’aide de son conseil Euro RSCG de propager de rumeurs arguant de la dangerosité de ce produit auprès d’ONG et d’organes de presse. Après deux ans d’enquête, Coca Cola remonte à la source de cette rumeur orchestrée par mails anonymes et met en cause la filiale argentine de Danone ainsi qu’un cadre d’Euro RSCG. Une plainte est déposée par Coca Cola. Si en première instance la multinationale américaine est déboutée, le juge reconnaît néanmoins l’origine de la rumeur. Si le résultat économique pour Danone est incontestable puisqu’il a bien ralenti l’entrée de cette eau minérale sur le marché, les techniques utilisées ont permis de mettre à jour le commanditaire. En appel, Coca Cola gagne sur le fondement suivant : « Il est possible de supposer que les responsables de cette campagne avaient prévu que certains des acheteurs potentiels du produit (Dasani), en raison des informations malveillantes diffusées via Internet, choisiraient des produits similaires (eau), un secteur du marché dominé par l’entreprise accusée (Danone) ».
Une défaite subie en Roumanie
En août 2007, la presse roumaine accuse la filiale locale de Danone de produire et distribuer des yaourts aux fruits susceptibles de contenir de la dioxine, substance potentiellement cancérigène. Cette campagne relève du dénigrement quand d’autres ressorts sont mis en œuvre sur le terrain émotionnel. Les médias expliquent en effet que Danone est l’un de principaux fournisseurs des écoles roumaines mettant ainsi en danger les enfants roumains. Un stade supplémentaire est atteint lorsque le parallèle est fait avec la tentative d’empoisonnement du Président Ukrainien Viktor Luscenko avec photos à l’appui. Cette campagne intervient alors qu’un produit concurrent est lancé sur le marché.
Danone arrête la commercialisation des yaourts litigieux bien qu’un laboratoire soit nommé pour démontrer qu’il n’y a pas de danger à la consommation de ces yaourts. Cette campagne fait perdre 20% de parts de marchés à Danone, Le dimensionnement de la réponse apportée par Danone tient plus de la simple défense que de la contre-attaque.
Des rumeurs contrées en France
Retour en 2005 en France cette fois, au mois de juillet nait une rumeur d’OPA hostile de la part de PepsiCo sur Danone. Après l’annonce par le magasine Challenge le 6 juillet, le titre bondit et la mobilisation est générale : de l’association des petits porteurs d’actifs au Président de la République, chacun se mobilise pour « défendre les intérêts de la France » selon les propos du Premier Ministre Dominique de Villepin. S’il semble aujourd’hui avéré que PepsiCo avait bien mandaté son Directeur financier pour diriger une OPA contre Danone alors sous-valorisée sur les marchés financiers, c’est bien l’entreprise française qui aurait fait naître cette rumeur afin d’organiser sa défense. Si l’augmentation du cours de bourse a pu contribuer à dissuader PepsiCo de porter son projet, c’est à coup sûr la mobilisation des dirigeants politiques qui a incité la multinationale américaine à annoncer par la voie de l’AMF qu’elle n’avait pas l’intention de lancer une telle opération.
De nouvelles rumeurs sont à apparues au mois de juin 2016 à la faveur d’un exécutif jugé plus ouvert et Danone semble avoir utilisé les mêmes recettes d’influence nationale puisque le 30 août, aux Université d’été du Medef, le Ministre de l’économie a affirmé : "Qu'il s'agisse de Danone ou de n'importe quel autre groupe français stratégique, nous ne laisserons pas des prédateurs s’attaquer aux entreprises qui font le patrimoine économique de notre pays".
Si la mobilisation des réseaux fonctionne jusque-là en France, la capacité d’influence de Danone à l’étranger semble bien plus fragile. La défense des intérêts du groupe semble plus axée sur la santé et donc sur la communication que sur une stratégie intégrant des techniques de guerre informationnelle dont elle a pourtant été victime.
Emmanuel François