La Chine bloque Uber

Le géant du VTC (voitures de transport avec chauffeur) fondé en 2009 par Travis Kalanick était déjà présent dans plus de 22 pays en 2013. Leadeur mondial réputé pour ses négociations agressives et soutenu par de nombreux investisseurs dont Google, il réalise en 2016 un chiffre d’affaire de 6 milliards de dollars. Lancé en 2011 à Paris, Uber s’est vite imposé comme l’application de référence pour le transport de particulier et de professionnels dans la capitale.
Aujourd’hui, suite à plusieurs victoires significatives et une présence dans 82 pays, l’entreprise ne cesse ses confrontations avec les services publics locaux et les associations de taxi. En Hongrie en 2016, Uber s’est retiré après plusieurs déboires avec les associations de Taxis et la sortie d’une nouvelle loi interdisant leur plateforme web. A Londres en 2017, Uber perd son droit d’exercer son activité suite à un refus de communication avec une structure publique locale. Au Québec le gouvernement impose à Uber 35h de formation pour chacun de ses pilotes autrement celui-ci se verra également interdire son droit d’exercer. Le Ministre canadien M. Lessard remarqua également lors d’un communiqué de presse : « On dénote de nombreuses infractions et irrégularités de la part d’Uber ». En France, Uber est assigné aux prud’hommes pour une dizaine de dossiers présentés par le syndicat SCP-VTC. Les employés de l’entreprise eux-mêmes sont accusés par leurs collègues de sexisme. La présence de l’entreprise dans les médias internationaux est de plus en plus forte ce qui impact grandement sa RSE et son image de marque.

La défaite d’Uber en Chine.
La Chine est l'un des plus grands marchés mondiaux du VTC : 1er territoire démographique mondiale, elle représente plus d'1.3 Mds d'habitants et contient 8 des 20 villes les plus congestionnés en termes de trafic routier au monde. M. Kalanick, a toujours communiqué ouvertement sur son appétence pour le marché chinois et son potentiel économique, il affirme que : « Les opportunités y sont sans équivalent ».
Lancé à Shangaï le 13 février 2014, Uber arrive 2 ans après son principal concurrent : Didi. S’en suit une bataille acharnée à base d’offres promotionnelles et de guerre des prix de 2014 à 2017 ce qui amena les deux concurrents à exercer leur activité parfois à perte. Didi Chuxing (fusion de deux concurrents chinois Didi Kuaidi et Didi Dache) a reçu des investissements d’Apple et des deux géants chinois Alibaba et Tencent. Le 1er Août 2017, Uber cède et annonce un accord de fusion de 35 Mds de dollars à travers lequel il vend ses activités chinoises à Didi Chuxing, entre autres, contre une participation de 5.89 % dans Didi. Les deux PDG pourront, à l’issue de cette signature, l’un et l’autre, siéger au conseil d’administration de l’entreprise concurrente. Didi Chuxing devient donc le leader du VTC en Chine avec 90% du marché.
Mais ce n’est pas tout, en plus de développer sa propre application, Didi a investi dans de nombreux autres concurrents leaders : Lift (US), Ola (Inde) et GrabTaxi (Asie du sud-est) pour un montant additionné de 950 millions de dollars.
Uber valorisé en juin 2016 à 68 Mds de dollars sera-t-il rapidement dépassé par Didi Chuxing, nouvellement 1ère start-up d’Asie valorisé en avril 2017 à 50 Mds de dollars ?

Le dépassement du protectionnisme par l’encerclement commercial
Après avoir découragé le groupe Murdoch, puis les GAFA de s’installer en Chine, Pékin étouffe habilement Uber en le déstabilisant par la mise de fonds et la capacité à l’encercler commercialement.
Présente maintenant sur tous les continents (Europe l’est et de l’ouest, Afrique, Etats-Unis, Inde, Asie du sud-est) et à travers de nombreuses labels (Didi, Taxify, Ola, Lift, Uber et GrabTaxi), Didi Chuxing représente aujourd’hui une entreprise conséquente sur le marché des VTC et se positionne comme premier concurrent d’Uber. Au centre de cette arène mondiale des start-ups du VTC, Didi s’allie avec les meilleurs fleurons pour imposer un « après-Uber », comme s’il fallait nettoyer en douceur cette arrivée maladroite faisant imparablement face à l’anti-uberisation.

Benjamin Fichera