La Corée du Sud face à la Chine et aux Etats-Unis

La tempête continue de souffler au Sud de la péninsule coréenne. La multitude des événements à la fois politiques, industriels et sécuritaires finissent par rendre son décryptage particulièrement délicat. Plusieurs articles récents dénoncent les scandales qui se succèdent, et proclament la fin d’un modèle sociétal qui a fait la réussite de ce pays. Un pays encore divisé, à vif, souvent malmené. Un pays dont la présence américaine demeure incontournable, presque une fatalité. Cette présence n’a pas que des désavantages mais elle contribue à geler une situation de guerre froide qui est aujourd’hui clairement dirigée contre la Chine, faisant de la Corée du Nord un prétexte. Pyongyang ne tiendrait pas une semaine face à une offensive alliée. Alliée car la France est toujours juridiquement en guerre contre la Corée du Nord, aux côtés des Etats-Unis. On ne peut nier par ailleurs que la forte présence civile américaine a facilité le déploiement de modèles économiques et sociétaux qui ont profité à la Corée. Le prix à payer était un renoncement sur bien des sujets stratégiques.
La construction économique de la Corée s’est donc appuyée sur deux facteurs : la présence américaine et des régimes politiques forts fondés sur une symbiose entre les différents acteurs de cette construction au point de générer des distorsions comme les affaires qui agitent aujourd’hui le pays.
On pourrait ironiser en disant que la destitution de Mme Park a été initiée par un problème de batterie sur un smartphone Samsung. On peut s’interroger sur l’origine et le séquençage de cette affaire et les véritables raisons. Peut-on relier ce fait à la crise qui frappe les Cheabols ? Il convient de rester prudent. Car Samsung n’est pas la seule entreprise entrainée dans cette tempête. Lotte est également concernée : ses fondateurs sont aujourd’hui accusés de malversations.
On ne peut par conséquent que constater cette nouvelle vague de scandales qui vont très certainement imposer la réforme en profondeur des modes de gouvernance de ces groupes, réforme entamée depuis plusieurs années.
Ce n’est pas Mme Park seule qui appartient à un monde révolu, mais bien la société coréenne toute entière qui poursuit sa mue. Une société qui a grandi, muri et qui aujourd’hui se trouve face à une fracture générationnelle : ceux qui ont connu la reconstruction du pays dans un climat sécuritaire tendu et ceux qui veulent la voir se moderniser, se libérer et s’adapter aux défis présents et futurs.
La Chine n’a jamais été aussi présente en Corée depuis des décennies. Il ne s’agit pas nécessairement de faire du tourisme mais d’apprendre de son voisin qui a quelques longueurs d’avance. Cette métamorphose sera donc observée de très près.
L’enjeu au plan international est de taille car il conditionne l’adoption de standards qui seront alors relayés par les entreprises de ce pays et les Coréens eux-mêmes. Si des actions d’influence sont menées en ce sens par les Etats-Unis ou la Chine, elles n’ont d’autre choix que de tenir compte du tempo d’une révolution dont nous ne percevons en France que la partie émergée.