Affrontement informationnels en Haute Savoie : santé vs environnement

Des bouquetins infectés par l’épizootie de brucellose, un risque sanitaire pour les exploitations agricoles du massif du Bargy
En 2012, deux enfants d’éleveurs du Grand-Bornand en Haute-Savoie, contractent l’épizootie de brucellose après avoir consommé du fromage émanant d’un troupeau dont une vache était infectée par la maladie. Les mois suivants, des cas d’épizootie de brucellose sont repérés sur plusieurs dizaines de bouquetins dans les environs.
La maladie touche les ongulés et se transmet d’un animal à un autre par l’ingestion d’herbe souillée. Elle provoque notamment chez l’animal des avortements et des lésions, mais peut contaminer l’être humain par l’ingestion de produits dérivés de lait cru, comme certains fromages.
La progression de l’épidémie au sein des groupes de bouquetins menace donc directement les élevages bovins de la région. Si ceux-ci venaient à être contaminés, les risques qui pèsent sur la santé du consommateur obligeraient les pouvoir publics à interdire la production et la distribution de reblochon, élément économique majeur pour l’économie agricole de la région.
Un rapport de force s’établit entre les agriculteurs soutenus par la préfecture et les associations écologistes et de protection de l’environnement.
En 2013, une polémique se développe sur l’abattage des bouquetins En octobre de cette année, le préfet de la Haute-Savoie ordonne l’abattage de 280 bouquetins, afin de ne laisser subsister qu’un groupe de 90 animaux certifiés d’être « sains » et non porteurs de la maladie. L’opération doit être réalisée par l’Office de la Chasse et de la Faune Sauvage. Cette décision suscite l’ire des associations de défense de l’environnement, qui multiplient les actions pour empêcher ces abattages d’avoir lieux.

Acteurs en présence :


















Favorable à l’abattage massif des bouquetins dans le massifDéfavorable à l’abattage massif des bouquetins
La préfecture de la Haute SavoieMilieux associatif : Fondation Brigitte Bardot, Fondation Nicolas Hulot, France Nature Environnement, Fédération Rhône-Alpes de Protection de la Nature…
Les agriculteurs, appuyés par les grandes organisations syndicales (FNSEA)Ministère de l’Environnement, Ministère de l’Agriculture
La plupart des représentant politiques locaux, notamment Bernard Accoyer, maire d’Annecy et ancien président de l’Assemblée Nationale


Moyens d’actions :

- Interpeller les pouvoirs publics : chacun des deux camps tente de plaider sa cause au sein des différents ministères. La FNSEA s’adresse à plusieurs reprise au Premier ministre, les mouvements écologistes, notamment via la ministre du développement durable Barbara Pompili (élue EELV) recueillent le soutient de Stéphane Le Foll (Ministre de l’Agriculture) et de Ségolène Royal (Ministre de l’Environnement). En mai 2016, ces derniers finissent par ordonner à la préfecture de Haute-Savoie de mettre fin aux abattages de masse de bouquetins et d’éliminer uniquement les animaux détectés au préalable comme contaminés, au cas par cas.

Revirement en septembre 2016, quand les différents Ministères autorisent à nouveau le préfet à reprendre les abattages massifs pour contrer la propagation de la brucellose. Dans leur travail d’influence de l’opinion et des pouvoirs publics, chaque camp mobilise des vétérinaires et des expertises scientifiques qui défendent leur solution (abattages massifs ou au cas par cas).
Les agriculteurs et la FNSEA comptent sur la mobilisation des élus locaux, notamment le maire d’Annecy Bernard Accoyer : réunions publiques avec Xavier Beulin (à la tête de la FNSEA) et l’ancien président de l’Assemblée Nationale qui suscitent l’attention de la presse locale.
- De leur côté, les associations de défense de l’environnement mènent des actions de terrain en filmant les abattages et les diffusant sur le net, ainsi qu’en faisant fuir les bouquetins à l’approche des employés de l’OCFS.

Padilla Robin