C’est l’insuline la plus vendue dans le monde et l’un des plus grands blockbusters de l’histoire de l’industrie pharmaceutique. L’antidiabétique Lantus a rapporté à son fabricant Sanofi près de 35 milliards d’euros en dix ans. Au printemps, le brevet qui protégeait son principe actif est tombé dans le domaine public et le géant pharmaceutique français a vu arriver la riposte sur deux fronts : l’américain Eli Lilly et l’allemand Boehringer avec un biosimilaire; «l’Abasaglar », le danois Novo Nordisk, fort de son insuline maison, « le Levemir », déjà bien présent sur le sol américain. Le développement du marché est exponentiel. D' ici 20 ans, toutes les analyses réalisées convergent vers un chiffre : celui du doublement pur et simple des personnes diabétiques.
La redistribution des cartes sur le marché mondial du diabète est donc en route.
Véritable navire-amiral du groupe, la division diabète de Sanofi est la plus rentable et totalise à elle seule 21 % du CA de l'empire pharmaceutique français. Pour autant, les sirènes ne chantent pas sur le cours de la bourse, laquelle continue, avec quelques toussotements remarqués mais magistralement maîtrisés, à enregistrer une évolution légèrement à la hausse sur ces trois derniers mois.
Sanofi a t-elle efficacement œuvré pour anticiper cette ouverture du marché, a-t-elle mis au point une contre offensive stratégiquement pertinente? Ou jouit-elle en interne de la maestria d’un communiquant passé maître dans l’art de minimiser les avancées fulgurantes des prédateurs du marché du diabète désormais hyper concurrentiel ?
L'accord trouvé entre Sanofi et Lilly : le fort redevient faible ?
Nous ne disposons d'aucun élément pour connaître de la réalité de l'accusation portée par Sanofi lorsqu'elle décide de lancer une action en contrefaçon contre le laboratoire américain Eli Lilly en 2014. Ce dont nous sommes certains, en revanche, c'est que judiciariser un différend - au-delà de la menace que cela induit et avant même que ne s'engage la bataille juridique proprement dite - donne nécessairement un avantage considérable à celui qui veut gagner du temps.
En agissant de la sorte, Sanofi bloquait le processus d'approbation finale de la FDA qui venait de donner son feu vert provisoire à Eli Lilly quelques semaines auparavant, obtenait un moratoire en retardant de 6 mois la mise sur le marché américain du biosimilaire et négociait un ticket d'entrée pour son concurrent soumis à un système de redevances.
Des charges qui pèsent sur Eli Lilly eu égard au vol de quatre brevets chez Sanofi, nous ne saurons rien. Seule une information, lâchée laconiquement à la fin du communiqué vient accréditer l'idée d'une démonstration de force puisqu' « en contrepartie Sanofi renonce, à toute procédure semblable ailleurs dans le monde ». Sur le marché boursier, Sanofi annonce la bonne nouvelle. Il maîtrise le timing, les six mois arrachés serviront au groupe pour communiquer sur le Toujéo ou le Lixilan, versions améliorées du Lantus (ce qui resterait à démontrer à la FDA…) ou sur le relais de croissance présenté comme tel: le Praluent (un anticholestérol déjà concurrencé à des prix plus beaucoup plus bas) … toutes choses évidemment passées sous silence.
Un système de redevance artificiel et finalement peu embarrassant dans une guerre des prix qui fait rage.
Le biosimilaire Abasaglar est effectivement beaucoup moins cher (jusqu'à - 30% en France) et plus performant. Le Levemir est quant à lui commercialisé également 20 % moins cher et aurait déjà grignoté 25 % du marché américain.
Pour rester dans la course, Sanofi a déjà du consentir un rabais de 40% aux mutuelles pour conserver une place dans leur catalogues. Outre Atlantique, l'équation est sans appel : si les 4,7 millions de patients nord américains sous Lantus se convertissaient, les mutuelles économiseraient de facto 2,6 milliards de dollars. L’exemple parle de lui même, cette fois il n’est plus question de simple perte d'influence mais bien de pertes sèches.
Une image écornée
Pour parer à la guerre des prix, le groupe tricolore aurait pu choisir de miser sur la mieux disance.
L’annonce d’un partenariat avec Google dans le cadre du programme Alphabet, d’applications interactives sur smartphone sensées responsabiliser les clients de Sanofi ou de programmes de coaching n’ont pas suffit à redorer le blason du géant français, à lui accorder un supplément d’âme, avantage compétitif majeur quand la guerre des prix fait rage. L’image de Sanofi demeure encore associée aux entreprises dont les patrons voyous perçoivent des bonus indécents (affaire Olivier Brandicourt) et procèdent à des licenciements boursiers (plan de restructuration de 2012).
Que penser enfin des récentes déclarations d'Hillary Clinton pointant la dérive des prix de certains médicaments aux Etats-Unis, suivez mon regard….
La redistribution des cartes sur le marché mondial du diabète est donc en route.
Véritable navire-amiral du groupe, la division diabète de Sanofi est la plus rentable et totalise à elle seule 21 % du CA de l'empire pharmaceutique français. Pour autant, les sirènes ne chantent pas sur le cours de la bourse, laquelle continue, avec quelques toussotements remarqués mais magistralement maîtrisés, à enregistrer une évolution légèrement à la hausse sur ces trois derniers mois.
Sanofi a t-elle efficacement œuvré pour anticiper cette ouverture du marché, a-t-elle mis au point une contre offensive stratégiquement pertinente? Ou jouit-elle en interne de la maestria d’un communiquant passé maître dans l’art de minimiser les avancées fulgurantes des prédateurs du marché du diabète désormais hyper concurrentiel ?
L'accord trouvé entre Sanofi et Lilly : le fort redevient faible ?
Nous ne disposons d'aucun élément pour connaître de la réalité de l'accusation portée par Sanofi lorsqu'elle décide de lancer une action en contrefaçon contre le laboratoire américain Eli Lilly en 2014. Ce dont nous sommes certains, en revanche, c'est que judiciariser un différend - au-delà de la menace que cela induit et avant même que ne s'engage la bataille juridique proprement dite - donne nécessairement un avantage considérable à celui qui veut gagner du temps.
En agissant de la sorte, Sanofi bloquait le processus d'approbation finale de la FDA qui venait de donner son feu vert provisoire à Eli Lilly quelques semaines auparavant, obtenait un moratoire en retardant de 6 mois la mise sur le marché américain du biosimilaire et négociait un ticket d'entrée pour son concurrent soumis à un système de redevances.
Des charges qui pèsent sur Eli Lilly eu égard au vol de quatre brevets chez Sanofi, nous ne saurons rien. Seule une information, lâchée laconiquement à la fin du communiqué vient accréditer l'idée d'une démonstration de force puisqu' « en contrepartie Sanofi renonce, à toute procédure semblable ailleurs dans le monde ». Sur le marché boursier, Sanofi annonce la bonne nouvelle. Il maîtrise le timing, les six mois arrachés serviront au groupe pour communiquer sur le Toujéo ou le Lixilan, versions améliorées du Lantus (ce qui resterait à démontrer à la FDA…) ou sur le relais de croissance présenté comme tel: le Praluent (un anticholestérol déjà concurrencé à des prix plus beaucoup plus bas) … toutes choses évidemment passées sous silence.
Un système de redevance artificiel et finalement peu embarrassant dans une guerre des prix qui fait rage.
Le biosimilaire Abasaglar est effectivement beaucoup moins cher (jusqu'à - 30% en France) et plus performant. Le Levemir est quant à lui commercialisé également 20 % moins cher et aurait déjà grignoté 25 % du marché américain.
Pour rester dans la course, Sanofi a déjà du consentir un rabais de 40% aux mutuelles pour conserver une place dans leur catalogues. Outre Atlantique, l'équation est sans appel : si les 4,7 millions de patients nord américains sous Lantus se convertissaient, les mutuelles économiseraient de facto 2,6 milliards de dollars. L’exemple parle de lui même, cette fois il n’est plus question de simple perte d'influence mais bien de pertes sèches.
Une image écornée
Pour parer à la guerre des prix, le groupe tricolore aurait pu choisir de miser sur la mieux disance.
L’annonce d’un partenariat avec Google dans le cadre du programme Alphabet, d’applications interactives sur smartphone sensées responsabiliser les clients de Sanofi ou de programmes de coaching n’ont pas suffit à redorer le blason du géant français, à lui accorder un supplément d’âme, avantage compétitif majeur quand la guerre des prix fait rage. L’image de Sanofi demeure encore associée aux entreprises dont les patrons voyous perçoivent des bonus indécents (affaire Olivier Brandicourt) et procèdent à des licenciements boursiers (plan de restructuration de 2012).
Que penser enfin des récentes déclarations d'Hillary Clinton pointant la dérive des prix de certains médicaments aux Etats-Unis, suivez mon regard….