Depuis la période classique qui a vu naître, dans le contexte de l’Etat royal du XVIIIe, les grandes écoles et les écoles d’ingénieurs, et d’ailleurs dans le même temps mais provisoirement, la disparition des universités, la France fait cohabiter au sein de son système de formation supérieur deux dispositifs distincts.
La question du développement et de la recherche
Le passage du XXIe siècle a révélé l’inadéquation de ce système dual dans le contexte d’une évolution économique liée à une forte innovation. D’une part, cette situation n’est pas favorable à la recherche technologique car d’un côté, la recherche universitaire se préoccupe encore peu du monde économique et de l’autre, nombre d’écoles d’ingénieurs pratiquent peu ou pas la recherche. D’autre part, cette situation nuit à l’attractivité de la recherche française, celle-ci se trouvant très mal positionnée dans le classement dit de Shanghai (Academic Ranking of World Academic). De là, les projets de loi et de réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche français (cf. la dernière en date dite loi Fioraso de l’été 2013) vont s’enchaîner pour tenter de réviser cette situation : mettre en place une véritable recherche scientifique et technologique à vocation de transfert, et rendre visible et attractive cette recherche dans le marché international de la formation et de la recherche. Cependant, la mise en œuvre de ce plan d’action via des opérations d’agrégations d’entités (fusion, communauté, association) a fait resurgir brusquement, et de façon violente, les tensions entre ces deux modèles de formation au détriment du projet général.
CGE contre CPU
Deux associations ont légitimement incarné cette guerre des valeurs (universalisme versus élitisme) à savoir la Conférence des Présidents d’Université (CPU) et la Confédération des Grandes Ecoles (CGE), même si l’une et l’autre se doivent d’œuvrer pour l’intérêt général de l’Etat et de la Nation. Un événement récent a encore cristallisé ces tensions. Le 17 octobre 2003, dans un supplément du Monde sur l’enseignement supérieur, le président élu de la CPU, Jean-Loup Salzmann, lance une attaque sérieuse à l’encontre des écoles d’ingénieurs mettant en doute la qualité de l’enseignement qui y est prodigué (« Mais tout le monde sait, et les étudiants s’en aperçoivent lorsqu’ils intègrent une école, que les cours ne sont pas de très bonne qualité. De plus, les étudiants ne font pas de recherche. »). La réponse ne tarde pas à venir quelques jours plus tard dans le même journal, le Monde du 25 octobre, par la voix non du Président mais d’un membre de la CGE, Laurent Carraro, président de l’ENSAM et plus récemment de la communauté d’établissements parisienne Hesam. Cet échange se déroule d’ailleurs sur fond de traitement asymétrique entre CPU et CGE de la part du ministère ce qui conduira Geneviève Fioraso a tenir une conférence d’apaisement le 7 novembre à l’ESPCI (Chimie Parsistech)
Un affrontement par le biais des médias
Cet affrontement par voie de presse sera relayé dans d’autres journaux et dans de nombres blogs. Il est intéressant de noter que ces relais (à de rares exceptions) se contentent de faire état de la tension et de déplorer son existence tout en appelant pour certains à son dépassement. S’il ne semble pas s’agir d’un affrontement personnel (pas de motif personnel évident pouvant justifier un duel entre ces deux personnes), ce qui n’exclut pas qu’il s’agisse d’initiatives personnelles au moins en partie, il s’agit donc bien d’une guerre entre deux systèmes revendiquant leur légitimité mais qui doivent se réformer et s’articuler. Et donc pour l’heure, nous en sommes à une guerre d’influence dont on peut dire qu’elle est à la faveur de la CPU et donc des universités. Jean-Loup Salzmann occupe le terrain politique depuis longtemps (gauche), sa réélection exceptionnelle à la tête de la CPU fin 2014 et de l’université Paris 13, le nombre de follower de son compte tweeter (1368 contre 100 à Laurent Carraro) ou encore sa proximité avec le pouvoir socialiste indique que le duel n’est pas tout à fait équilibré en dépit de la force des réseaux des Grandes Ecoles sur lequel peut compter Laurent Carraro. La réaction de ce réseau en terme de guerre informationnelle tant quantitative que qualitative n’aura pas été à la hauteur de l’assaut universitaire. Et depuis fin 2013, date de leur échange belliqueux, Jean-Loup Salzmann n’a eu de cesse de rappeler les évolutions de l’université et promouvoir son rôle possible dans le dialogue avec le monde de l’entreprise (comité Sup’Emploi), dans sa capacité à produire de la connaissance transférable, dans sa disponibilité à accueillir des formations élitistes en son sein comme des classes préparatoires et des formes d’école d’ingénieur (Polytech, master d’ingénierie, etc…) ou encore à constituer des réseaux d’anciens qui lui manque cruellement via le web 2.0.
Faire advenir un nouveau paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche est assez urgent pour l’avenir économique de la France mais le scénario de son avènement n’est pas encore clair même si le poids des universités est telle que l’arraisonnement des Grandes Ecoles dans le giron universitaire (et donc de leur présidence) semble annoncé.
La question du développement et de la recherche
Le passage du XXIe siècle a révélé l’inadéquation de ce système dual dans le contexte d’une évolution économique liée à une forte innovation. D’une part, cette situation n’est pas favorable à la recherche technologique car d’un côté, la recherche universitaire se préoccupe encore peu du monde économique et de l’autre, nombre d’écoles d’ingénieurs pratiquent peu ou pas la recherche. D’autre part, cette situation nuit à l’attractivité de la recherche française, celle-ci se trouvant très mal positionnée dans le classement dit de Shanghai (Academic Ranking of World Academic). De là, les projets de loi et de réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche français (cf. la dernière en date dite loi Fioraso de l’été 2013) vont s’enchaîner pour tenter de réviser cette situation : mettre en place une véritable recherche scientifique et technologique à vocation de transfert, et rendre visible et attractive cette recherche dans le marché international de la formation et de la recherche. Cependant, la mise en œuvre de ce plan d’action via des opérations d’agrégations d’entités (fusion, communauté, association) a fait resurgir brusquement, et de façon violente, les tensions entre ces deux modèles de formation au détriment du projet général.
CGE contre CPU
Deux associations ont légitimement incarné cette guerre des valeurs (universalisme versus élitisme) à savoir la Conférence des Présidents d’Université (CPU) et la Confédération des Grandes Ecoles (CGE), même si l’une et l’autre se doivent d’œuvrer pour l’intérêt général de l’Etat et de la Nation. Un événement récent a encore cristallisé ces tensions. Le 17 octobre 2003, dans un supplément du Monde sur l’enseignement supérieur, le président élu de la CPU, Jean-Loup Salzmann, lance une attaque sérieuse à l’encontre des écoles d’ingénieurs mettant en doute la qualité de l’enseignement qui y est prodigué (« Mais tout le monde sait, et les étudiants s’en aperçoivent lorsqu’ils intègrent une école, que les cours ne sont pas de très bonne qualité. De plus, les étudiants ne font pas de recherche. »). La réponse ne tarde pas à venir quelques jours plus tard dans le même journal, le Monde du 25 octobre, par la voix non du Président mais d’un membre de la CGE, Laurent Carraro, président de l’ENSAM et plus récemment de la communauté d’établissements parisienne Hesam. Cet échange se déroule d’ailleurs sur fond de traitement asymétrique entre CPU et CGE de la part du ministère ce qui conduira Geneviève Fioraso a tenir une conférence d’apaisement le 7 novembre à l’ESPCI (Chimie Parsistech)
Un affrontement par le biais des médias
Cet affrontement par voie de presse sera relayé dans d’autres journaux et dans de nombres blogs. Il est intéressant de noter que ces relais (à de rares exceptions) se contentent de faire état de la tension et de déplorer son existence tout en appelant pour certains à son dépassement. S’il ne semble pas s’agir d’un affrontement personnel (pas de motif personnel évident pouvant justifier un duel entre ces deux personnes), ce qui n’exclut pas qu’il s’agisse d’initiatives personnelles au moins en partie, il s’agit donc bien d’une guerre entre deux systèmes revendiquant leur légitimité mais qui doivent se réformer et s’articuler. Et donc pour l’heure, nous en sommes à une guerre d’influence dont on peut dire qu’elle est à la faveur de la CPU et donc des universités. Jean-Loup Salzmann occupe le terrain politique depuis longtemps (gauche), sa réélection exceptionnelle à la tête de la CPU fin 2014 et de l’université Paris 13, le nombre de follower de son compte tweeter (1368 contre 100 à Laurent Carraro) ou encore sa proximité avec le pouvoir socialiste indique que le duel n’est pas tout à fait équilibré en dépit de la force des réseaux des Grandes Ecoles sur lequel peut compter Laurent Carraro. La réaction de ce réseau en terme de guerre informationnelle tant quantitative que qualitative n’aura pas été à la hauteur de l’assaut universitaire. Et depuis fin 2013, date de leur échange belliqueux, Jean-Loup Salzmann n’a eu de cesse de rappeler les évolutions de l’université et promouvoir son rôle possible dans le dialogue avec le monde de l’entreprise (comité Sup’Emploi), dans sa capacité à produire de la connaissance transférable, dans sa disponibilité à accueillir des formations élitistes en son sein comme des classes préparatoires et des formes d’école d’ingénieur (Polytech, master d’ingénierie, etc…) ou encore à constituer des réseaux d’anciens qui lui manque cruellement via le web 2.0.
Faire advenir un nouveau paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche est assez urgent pour l’avenir économique de la France mais le scénario de son avènement n’est pas encore clair même si le poids des universités est telle que l’arraisonnement des Grandes Ecoles dans le giron universitaire (et donc de leur présidence) semble annoncé.