La guerre informationnelle entre la Chine et les pays occidentaux en Afrique : l’exemple de CCTV

L’Afrique, longtemps territoire de chasse gardée des ex-puissances coloniales, serait-il en train de tomber sous l’influence chinoise ? En prenant la décision depuis 2002 de s’internationaliser par le mot d’ordre « Go Global », la Chine a clairement affiché sa volonté de construire et d’entretenir un réseau d’influence dans les pays d’Afrique.
Par le terrain de l’information, la chaine CCTV s’est patiemment tissé un instrument de propagation d’idées, d’influence et de réseaux en créant son antenne en 2011 à Nairobi (CCTV Africa) auparavant localisée à Paris, dans le but de gagner de l’influence auprès des leaders africains ; au grand dam de BBC, CNN ainsi que des chaines françaises en Afrique. Selon Chris Alden, professeur à la London School of Economics, l’implantation de CCTV en Afrique répond aux différentes attaques informationnelles subies par la Chine de la part des Etats-Unis et des pays d’Europe Occidentale visant à exacerber les effets négatifs de la relation sino-africaine.
CCTV Africa, implantée dans une douzaine de pays d’Afrique, a fait le choix de s’intéresser également aux leviers de développement économique dans certains pays comme l’Angola ou le Nigéria et de produire une vision « équilibrée » selon les termes de Pang Xinhua, directeur de la rédaction de CCTV Africa. Les détracteurs de la chaine d’information l’accusent de fournir des reportages complaisants ainsi que des interviews censurées lorsqu’il s’agit d’étayer des problématiques se rapportant aux droits de l’homme ou au travail des enfants.
Ces critiques sont balayées par les dirigeants de la chaine qui disposent d’une manne financière considérable par rapport aux chaines d’informations BBC et France 24 voire CNN dans certains pays d’Afrique de l’Ouest : il faut compter des années pour une chaine d’information pour se construire une crédibilité. Pourtant, les contrôles du contenu de la marque CCTV sont stricts. Sous couvert d’anonymat, un journaliste local rapporte que certaines listes de mots sont distribuées dans les rédactions de manière à les supprimer des interventions en direct ou enregistrées. Des reportages fleuves sur le Kenya ou le Nigéria sont régulièrement épinglés par les directeurs de programmation de CNN ou de la BBC.
De plus, la Chine s’est constituée une agence de presse en Afrique, Xinxua, qui compte une trentaine de bureaux en Afrique et qui profite d’une capacité de collecte d’informations supérieure à celle de Reuters ou Associated Press (cependant encore assez loin d’AFP) due à une étroite collaboration avec les dirigeants africains. Cette agence envoie 17 millions de bulletins d’information quotidien sur smartphone tandis que CCTV fournit un service mobile « Why I love Africa ». Pékin finance également des sessions de formations à des journalistes africains, largement défrayés à Shanghai ou dans d’autres villes en Chine.
Il semble alors que la Chine profite aujourd’hui de la décroissance de l’influence des ex-puissances coloniales pour séduire une élite africaine, lassée des chasses-gardées de certains pays occidentaux sur les terrains de l’économie, de la diplomatie et de l’information.

Sources :
http://www.journalinteret.com/affaires/lafrique-chinoise-la-guerre-de-linformation/
http://www.journalinteret.com/affaires/lafrique-chinoise-la-guerre-de-linformation/
http://www.afp.fr/fr/node/329316/
http://www.theglobeandmail.com/news/world/media-agenda-china-buys-newsrooms-influence-in-africa/article14269323/*