L’impact de la crise financière sur la communication des ONG

La crise économique n’épargne pas les organisations non gouvernementales (ONG) confrontées à une réduction sensible de leur financement public et des donations de particuliers. Moins visibles, elles veulent rester un acteur de premier plan de l’aide humanitaire et au développement au moment où se déroulent des négociations préliminaires au sommet humanitaire mondial (2016).

Des ONG, en manque d’influence, et rattrapées par l’austérité.
Confrontées simultanément à une diminution des subventions et à la crise du secteur privé, les ONG luttant contre Ebola en Afrique de l’ouest éprouvent de grandes difficultés à financer les projets d’aide aux populations locales. Ainsi, Action contre la Faim (ACF) mène de front 22 missions dans le monde et manque de dons pour acheter matériels et produits alimentaires de première nécessité. De même, Médecins sans frontières (MSF) dépense plus cette année qu’en 2013 : aux programmes réguliers se conjugue l’actualité Ebola. Selon MSF, la crise Ebola coûterait au moins 100 millions d’euros d’ici à l’été 2015. Dans ce contexte de réduction de subventions publiques et de forte concurrence, seules les ONG dotées de budgets impressionnants résistent : OXFAM (900 millions d’euros, 2011), Care (665 millions d’euros, 2011), MSF (230 millions d’euros, 2013). En revanche, celles qui n’ont pu enrichir la liste de leurs donateurs privés sont condamnées, sinon à disparaître, du moins à être absorbées par les plus grandes. A la réduction des subventions publiques s’ajoute celle des donations privées : centré sur son quotidien, le donateur se replie sur des crises dites «de proximité» : dans sa lutte contre Ebola, la Croix-Rouge française a ainsi collecté, en 15 jours, seulement 8000 euros de dons de particuliers. Manquant de disponibilités financières, les ONG sont moins visibles, moins influentes.

Face à ce contexte, les ONG adaptent leur communication d’influence.
Les stratégies  de communication des ONG restent traditionnellement basées sur l’empathie qui permet l’identification de l’internaute, le champ lexical utilisé ou la photo qui veut responsabiliser l’internaute. A ces techniques, les ONG ont ajouté ces dernières années le plaidoyer comme outil de légitimation de leur action. Un plaidoyer efficace mobilise l’opinion qui influe sur le politique : il place volontairement le débat sur le terrain de la confrontation avec la volonté d’attirer l’attention et d’influencer les politiques publiques. Il complète les actions traditionnelles des ONG en renforçant l’impact des interventions et/ou en levant les blocages à l’action si nécessaire. Ainsi, dans sa lutte contre Ebola, Care France intervient auprès des acteurs politiques, en Europe et sur le terrain, pour améliorer les conditions de vie des populations affectées par la maladie. De même, MSF et OXFAM conduisent des actions de plaidoyer dont l’objectif est de provoquer des changements durables de politiques en influençant décideurs politiques et économiques.

Pour quels enjeux?
Les ONG s’adaptent aux évolutions du contexte externe. Moins visibles et fragilisées par la baisse des dons et subventions publiques, elles veulent réinvestir le champ politique en renforçant la légitimité de leur action sur le terrain (expertise technique, légitimité des acteurs) et en adaptant leurs stratégies de communication pour gagner en crédibilité. Au moment où se préparent les négociations liées au premier sommet humanitaire mondial qui aura lieu en Turquie en 2016, le but des ONG est de participer à la redéfinition du système de financement de l’aide humanitaire, nationale et internationale. Par leurs actions de lutte contre Ebola en Afrique de l’ouest et le renouvellement de leur stratégie d’influence, les ONG entendent rester, avec les Etats et les organisations internationales, l’un des acteurs indispensables de l’aide au développement et de l’aide humanitaire.