Les contradictions entre la puissance américaine et les entreprises privées du web

James Comey, le directeur du FBI, a dénoncé récemment la décision d’Apple et de Google de permettre un cryptage total et par défaut des données contenues sur les smartphones fonctionnant sous leurs systèmes d’exploitation, qui représentent toutefois plus de 96% de parts de marché. Les affaires Snowden (2010) et Snowden (2013) ont révélé des informations sensibles sur les pratiques et les méthodes des Five Eyes pour espionner citoyens, entreprises et Etats. La sophistication des programmes et les moyens mis en œuvres  ont déclenché une vague de protestation dans le monde et a enclenché une prise de conscience générale et un mouvement de résistance. Les usagers des nouvelles technologies commencent à s’organiser pour contourner cet écosystème constitué d’appareils et de services dont la quasi-totalité des fournisseurs sont des entreprises de droit américain. Cette mouvance ne sera évidemment pas du goût du gouvernement américain focalisé sur le maintien de ses objectifs dits de sécurité, ni pour les entreprises du web qui sont affectées par les retombées de l’affaire Snowden en termes d’image et de diminution des gains commerciaux.

Les géants de l’informatique résistent

Le 31 juillet 2014 et après une bataille judiciaire, la justice américaine a ordonné à Microsoft de fournir des données concernant ses clients même si celles-ci sont stockées hors territoires américains, notamment en Europe. Le 11 septembre 2014, Yahoo dévoile un rapport qui documente un litige qui l’a opposé au gouvernement américain concernant l’accès aux donnés des utilisateurs des services offerts par Yahoo. Le gouvernement menace le géant du Web de lui infliger une amende de 250m$ par jour pour son opposition à l’accès aux données de ses clients. D’après le rapport, des éléments restent classés secrets et inaccessibles même aux avocats de Yahoo. En dévoilant l’iPhone 6, Apple annonce que son smartphone chiffrera les données par défaut et que la clé de chiffrage est unique et que seul l’utilisateur possède.
Dans la foulée, Google annonce que la prochaine version d’Android offrira une fonctionnalité de cryptage par défaut des données similaire à celle annoncée par Apple. Une analyse superficielle amène à conclure qu’il a y bel et bien un vent de dissidence au sein du club très fermé des géants du Web. Il ne faut pas oublier que ses mêmes entreprises étaient parties prenantes du programme d’espionnage PRISM révélé par Edward Snowden en 2013.

La loi : l’arme ultime du gouvernement américain ?

L’USA Patriot Act est une loi antiterroriste, signée par George W. Bush le 26 octobre 2001, parmi d’autres qui obligent les entreprises américaines à fournir les données de leurs clients. Les décisions de justice récentes ne peuvent que confirmer cette affirmation. Toujours par les révélations de Snowden, nous savons maintenant que la NSA échappe à la surveillance de la justice américaine et reste hors de sa portée. Mais les géants du Web le savent très bien et n’ignorent pas non plus que les batailles juridiques contre le gouvernement sont longues et coûteuse. Autrement dit, on peut sérieusement s’interroger sur la capacité des entreprises du web à s’amender des démarches intrusives de l’Etat américain.