Ebola : la remise en cause de l’industrie pharmaceutique

La première épidémie du virus Ebola est apparu pour la première fois en 1976, d’autres épidémies ont ressurgi entre-temps, les plus importantes datent des années 1995, 2000 et 2007. Chaque épidémie avait causé la mort d’environ 280 personnes. Le virus était très localisé en milieu rural et ne concernait qu’un pays. L’épidémie actuelle est jusqu’à présent la plus importante avec un taux de mortalité de 70%. Elle touche les zones citadines, affecte quatre pays de l’Afrique de l’Ouest et a causé la mort de plus de 4500 personnes.
En Afrique, les femmes sont au centre de la vie familiale, économique et sociale du pays. Elles s’occupent des enfants, des malades; de l’économie familiale en vendant leurs produits aux marchés et s’occupent du rite funéraire. Elles sont les premières victimes de l’Ebola. De fait, un pan de l’économie et de la structure sociale des pays s’effondrent. Les gouvernements concernés par l’épidémie multiplient les campagnes d’informations envers la population et interdisent le transport des corps et l’accès au cimetière par les familles. Ces mesures préventives sont acceptées par la population malgré leur fort attachement à leurs traditions.
Le virus Ebola n’a pas de vaccin ni de traitement disponible. Pourtant fin août 2014, deux personnels soignants américains contaminés par le virus sont rapatriés aux Etats-Unis, soignés par un traitement expérimental, le ZMapp du laboratoire Mapp Biopharmaceutical. Les deux soignants guérissent.
En l’espace de 10 mois plusieurs laboratoires sont sur des pistes pour trouver plusieurs vaccins de l’Ebola et annoncent une mise à disposition d’un vaccin pour 2015 ou 2016. On peut être surpris par cette réactivité en sachant que le cycle de développement et de validation d’un vaccin est de 10 années environ.
Face à l’urgence, les laboratoires et les autorités de régulation s’accordent pour accélérer les processus de test et d’approbation des vaccins. Ils rendent acceptable l'utilisation de traitements expérimentaux et seront testés sur une plus grande échelle de cobayes humains. Tout ceci a un coût et les fondations sont capables de lever des fonds important et très rapidement. Chose faite par deux des plus grandes fondations : Gates Foundation et Wellcome Trust. Plusieurs millions de dollars sont versés aux laboratoires pour accélérer les travaux. Les moyens techniques et financiers sont bien là.
On peut se demander si l’absence de vaccin contre Ebola était liée à un manque d'intérêt du fait que la maladie était cantonnée aux pays pauvres. Cette accélération n’est pas du fait d’une coïncidence mais d’une réaction urgente face à un risque de pandémie en occident. Ce risque n’est pas négligé par les USA et l’Europe depuis qu’ils importent le virus sur leurs territoires en rapatriant les concitoyens malades.
A l’heure de la mondialisation, l’isolement sanitaire n’est plus possible. La prévention des pandémies est une question de « politique de sécurité sanitaire ». Comme le pointe du doigt Patrick Zylberman, de nouveaux dispositifs de surveillance et de prévention sont à penser par les Etats indépendamment des laboratoires ou des fondations. Ce n’est pas aux fondations ou aux laboratoires de décider quelle menace virale mérite des recherches. Le modèle d’économie de marché ne répond pas à ce type de menace puisque c’est donner un prix à une vie par des laboratoires.