Détecter les techniques offensives d’astrosurfing

Le terme « Astroturfing » vient de la marque américaine AstroTurf qui fabrique de la pelouse artificielle, Turf en anglais, pour les stades et les jardins. La spécificité de cette marque vient du fait que l’herbe qu’elle arrive à recréer est particulièrement ressemblante.  Le lien entre pelouse et opinion publique n’est pas évident en français mais il a un sens en anglais. En effet, les mouvements que l’on dit venus de la base sont dits « grassroots movements», ce qui pourrait se traduire littéralement par « mouvements issus des racines d’herbe ». L’expression a un sens bien établi en langue anglaise pour désigner aussi bien des mouvements spontanés que des mouvements venus de la base, au sens de base social, de terrain politique. C’est dans ce sens que doit être comprise l’expression. Le terme d’astroturfing est en fait un jeu de mots qui n’a de sens qu’en anglais et qui désigne donc des mouvements populaires issus de la base instrumentalisés et/ou simulés.
Le terme de Sybil attack est également utilisé en anglais pour désigner des attaques réputationnelles organisées via les réseaux Peer-to-Peer notamment via le protocole Bit torrent2. Ces attaques utilisent des identités créées pour l’occasion dans le but de nuire à la réputation d’une personne ou d’une institution.
L’Astroturfing est une technique qui consiste à simuler la spontanéité d’un mouvement. Les motivations de ceux qui se livrent à ce type de pratique sont principalement d’ordre politique et économique. L’idée étant de justifier une prise de position en s’appuyant sur ce qui semble être la manifestation d’un sentiment majoritaire. L’astroturfing peut être choisi ou subi. Il peut être choisi pour venir à l’appui d’une stratégie de communication mais il peut aussi être subi quand l’adversaire croit, à tort, que sa démarche s’appuie sur une adhésion générale.
L’astroturfing est une technique qui se développe autant que se développe les réseaux sociaux et le web 2.0 en général. Plus les consommateurs/citoyens prendront leurs renseignements sur internet plus il est tentant d’influer sur cette source. Tout l’enjeu va donc être de détecter et contrer ses pratiques pour connaitre la réalité de l’adhésion en faveur de l’idée ou du produit.
L’astroturfing varie également selon son ampleur, il peut concerner aussi bien des enjeux limités comme le trucage d’un sondage à la télévision que des enjeux militaro-diplomatique comme dans l’opération Earnest Voice.
L’astroturfing peut être considéré comme un mode d’action faussement légitime dans le sens où il est dans la nature de tous les mouvements d’essayer de se montrer plus gros qu’ils ne sont. L’astroturfing n’en serait que l’avatar moderne.
La multiplication des cas récents d’astroturfing en France doit déclencher une prise de conscience sur la facilité avec laquelle se manipule l’opinion sur Internet.
Le cas du journal Soir 3 du 27 novembre 2013 est un parfait exemple d’astroturfing. La chaîne avait lancé un sondage à propos de la décision de la justice sur la crèche Babyloup pour connaitre les réactions du public. Malheureusement la chaine n’avait pas prévu de protection spécifique de son site et le sondage a été largement manipulé. Il a suffi à de nombreux de supprimer le cookie informatique de la chaine pour pouvoir voter une nouvelle fois. Le site Al-Kanz détaille la procédure qu’il a suivi pour participer à cet astroturfing que l’on peut qualifier « d’astroturfing d’opportunité ». L’internaute précise que grâce à cette technique et à l’usage d’une extension pour navigateur, IPFlood, il a pu voter près de 64 000 fois. C’est d’ailleurs l’augmentation brutale du nombre de votes dans un sens unique qui a alerté les responsables du site et les a obligé à ne pas diffuser les résultats du sondage pendant le direct de l’émission.