L’évaluation de la recherche française en question

Lors du colloque Les sciences de l'information… et leurs implications géopolitiques, qui s'est tenu à Ajaccio les 28 et 29 Novembre 2013, un groupe de scientifiques et d’experts de haut niveau international dans le domaine de la veille concurrentielle et de l’intelligence compétitive a abordé la question de l'évaluation de la recherche dans une période économique critique pour notre pays.
Lors de la première journée, le passage de l'intelligence économique à l'influence a été mis en exergue et plusieurs orateurs ont souligné le rôle crucial de l'université en général et des sciences de l’information en particulier. Dans un contexte de crise et de mutations, de nombreux cas ont été présentés pour montrer le rôle de plus en plus crucial joué par l’analyse des informations stratégiques. Une évidence loin d’être partagée si l’on en croit les retours d’expériences présentés montrant que trop de décisions sont prises sans veille stratégique et connaissance pertinente de l’environnement. Avec à la clé des investissements, notamment publics, en pure perte : les contribuables apprécieront ! Dès lors, et de l’avis général, il est devenu urgent d’investir dans ce domaine et de changer les mentalités. Ainsi, et au-delà de textes en réalité non appliqués dans le système d’évaluation, l'université et le CNRS doivent mieux considérer la responsabilité sociale des chercheurs et leur implication dans le monde économique. L’effet de levier est simple et à la portée des politiques : modifier les modes d’évaluation des chercheurs. Aujourd’hui, ceux-ci sont essentiellement jugés sur leur capacité à publier dans des revues dites internationales mais de fait essentiellement anglo-américaines… L’implication dans le développement régional n’est pas réellement reconnue et la diffusion des connaissances via des ouvrages ou des conférences est considérée comme mineure.
Inquiétant. La comparaison effectuée notamment entre la France et la Chine (qui accomplit un effort considérable en sciences de l'information) ou la France et le Brésil (avec, par exemple, la base de données Lattes vitae des chercheurs ) a souligné le manque de laboratoires en sciences de l’information laissant désormais aux autres puissances un boulevard sur des sujets aussi stratégiques que les Big Data. Pourtant, la France ne manque pas de compétences mais bien d’une politique de valorisation et de transfert des connaissances. Cette position dogmatique a empêché la mise en œuvre à grande échelle de dispositifs intelligents, stérilisant notamment la collaboration entre les PME et les laboratoires de recherche.
Au moment où un effort important est demandé aux entreprises et aux contribuables français, il devient urgent que nos institutions développent enfin une vision stratégique et mettent en œuvre une organisation qui redirige le rôle de la recherche et de l'enseignement supérieur français. Persévérer dans un dogmatisme aussi autiste serait suicidaire. Et ce sont des universitaires qui le disent !

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