L’étude du professeur Séralini à la suite de l'expérimentation sur des rats avec tumeurs causé par l'OGM Monsanto (CRIIGEN/AFP) suscite la polémique dans les académies des sciences.
Le professeur Paul Deheuvels, Membre de l'Académie des Sciences attire l'attention du public sur le fait que le dit communiqué ne peut engager l'une ou l'autre de ces académies dans leur ensemble. En effet, un groupe d'experts a été convoqué en urgence dans une absence totale de transparence concernant le choix de ses membres, et sur la base de deux représentants par académie.
Ces personnes ont cru bon de rédiger dans un espace de temps très bref un avis très critique sur cette étude. Elles ne peuvent prétendre à elles seules incarner l'avis de l'ensemble du monde scientifique français. Étant le seul membre de l'Académie des sciences représentant la discipline des statistiques en tant que telle, le Professeur Paul Deheuvels aurait dû, normalement être consulté, et tel n'a pas été véritablement le cas.
Paul Deheuvels de mentionner « L'article du professeur Séralini a l'immense mérite de mettre en évidence qu'il n'y a pas suffisamment d'études portant sur les effets à long terme des alimentations à base d'OGM. Au lieu de critiquer dans cette étude ce qui ne peut pas l'être, tout en omettant de l'apprécier pour sa composante authentiquement innovatrice, les organismes établis comme l'INRA ou l'ANSES, devraient entreprendre des études approfondies sur des échantillons plus nombreux. Celles-ci permettraient de sortir par le haut d'une querelle aux paramètres évidemment biaisés. Il faut que le débat d'idées ait lieu, dans le calme, et sans avoir à subir les pressions des lobbys qui s'expriment pour ou contre des opinions, sans même prendre le temps de les discuter ».
Les limites du débat scientifique
Interrogé par l'AFP, Bernard Meunier, délégué à la communication de l'Académie des Sciences, a affirmé qu'"un groupe de travail (avait) été mis en place par les six Académies", et qu'"ensuite, cet avis a été validé par les présidents ou secrétaires perpétuels qui engagent la responsabilité des Académies". Dans leur avis, les Académies ciblent aussi la stratégie de communication lors de la sortie de l'étude, avec "la publication de deux livres, d'un film et d'un article scientifique, avec l'exclusivité de leur contenu accordé à un hebdomadaire", en l'occurrence le Nouvel Observateur. Pour sa part, l'agence européenne de sécurité des aliments (Efsa) a déjà estimé que l'étude était "inadéquate" et "insuffisante" pour remettre en question l'innocuité du maïs NK603, dont elle a autorisé la commercialisation au sein de l'UE en 2003.
Le Pr Séralini a estimé que son étude avait "des limites statistiques comme toutes les études faites avec dix rats" par groupe étudié. "Mais l'Efsa a autorisé des maïs transgéniques sur la foi d'études avec cinq ou six rats, des travaux produits par l'industriel lui-même qui ne communique pas les données brutes de l'étude", a déploré le biologiste. Cette accusation sur la faiblesse des études réalisées par les industriels est reprise par de nombreux acteurs opposés aux plantes OGM (ONG, Fédération nationale de l'agriculture bio, Attac, Confédération paysanne, etc). Dans une lettre publiée vendredi et adressée au Premier ministre et aux ministres concernés, ces organisations arguent que "les études présentées par les firmes qui ont obtenu des autorisations de commercialisation de plantes transgéniques montrent toutes encore plus de faiblesses que celles qui sont reprochées à l'étude" du Pr Séralini.
La carence des études préalables
La députée européenne Corinne Lepage, qui soutient ses travaux, a estimé cette semaine que "la carence des études préalables pose la question du fonctionnement des agences réglementaires comme l'EFSA". Le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll a indiqué attendre l'avis de l'Anses avant de se prononcer. Mais "quoi qu'il arrive" il souhaite "poser la question globale des protocoles d'autorisations sur les OGM". Le ministre a assuré que son opinion dépend entièrement des conclusions de l'Anses, qu'il a saisie préalablement, et quoi qu'il arrive il discutera de " la question globale des protocoles d'autorisation sur les OGM"
La conclusion du GECU de l’Anses, après examen critique des publications pertinentes dans le cadre de cette saisine, met en évidence l’absence de publications relatives à des études toxicologiques à long terme sur des produits phytopharmaceutiques formulés et le nombre limité des publications sur les effets à long terme des PGM. Après examen, les experts du GECU considèrent que les conclusions avancées par les auteurs sont insuffisamment soutenues par les données présentées dans cette publication. Par ailleurs, les hypothèses sur les mécanismes d’action proposées pour expliquer les résultats obtenus par l’équipe de Séralini et al. (2012) ne sont pas confortées par l’analyse réalisée.
L’impasse provisoire sur les effets à long terme
Par conséquent, les experts concluent que les résultats de l’étude tels que publiés aujourd’hui ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions des évaluations précédentes sur le maïs NK603 et sur l'herbicide Roundup. En revanche, les experts du GECU soulignent l’absence de travaux étudiant les effets potentiels à long terme de l’exposition à différentes formulations de préparations à base de glyphosate et le nombre limité de ceux portant sur les effets à long terme d’une consommation d’OGM.
Finalement, le travail conséquent et particulièrement courageux du Pr Gilles-Eric Séralini ne pouvait triompher du système européen d’autorisation de mise sur le marché des plantes génétiquement modifiées. La raison en est évidente. Le procès des « OGM » n’est ni celui des biotechnologies, ni celui de l’américain Monsanto. Ce qui est mis en cause par les uns et soutenu par les autres sont les pratiques de l’industrie, sa puissance et son rôle dans nos sociétés. En même temps que la remise en question de ses propres méthodes d’évaluation l’Europe doit affronter, le cas échéant, les abus commis en son sein par ses grandes entreprises au nom de la performance économique et du progrès. Critiquer l’ « américain », seul responsable d’une tragédie mondiale, tient d’une gageure essentielle. Comment se comporte les entreprises européennes en la matière ? Les stratégies d’influence d’un géant tel que BASF soutenues par le couple « Sarkosy-Merkel » sont-elles aussi dénuées de controverses ?
Au-delà de la moralité et de la légalité, le jour où tous les protagonistes européens porteront sans complexe le débat public sur des sujets concrets tel la pomme de terre Amflora de BASF, avec autant de verve et de passion qu’ils ne le font pour le Roundup Ready de Monsanto, l’affrontement aura acquis plus de sincérité, plus de crédibilité et plus de chance d’aboutir à une remise en question profitable.
Le professeur Paul Deheuvels, Membre de l'Académie des Sciences attire l'attention du public sur le fait que le dit communiqué ne peut engager l'une ou l'autre de ces académies dans leur ensemble. En effet, un groupe d'experts a été convoqué en urgence dans une absence totale de transparence concernant le choix de ses membres, et sur la base de deux représentants par académie.
Ces personnes ont cru bon de rédiger dans un espace de temps très bref un avis très critique sur cette étude. Elles ne peuvent prétendre à elles seules incarner l'avis de l'ensemble du monde scientifique français. Étant le seul membre de l'Académie des sciences représentant la discipline des statistiques en tant que telle, le Professeur Paul Deheuvels aurait dû, normalement être consulté, et tel n'a pas été véritablement le cas.
Paul Deheuvels de mentionner « L'article du professeur Séralini a l'immense mérite de mettre en évidence qu'il n'y a pas suffisamment d'études portant sur les effets à long terme des alimentations à base d'OGM. Au lieu de critiquer dans cette étude ce qui ne peut pas l'être, tout en omettant de l'apprécier pour sa composante authentiquement innovatrice, les organismes établis comme l'INRA ou l'ANSES, devraient entreprendre des études approfondies sur des échantillons plus nombreux. Celles-ci permettraient de sortir par le haut d'une querelle aux paramètres évidemment biaisés. Il faut que le débat d'idées ait lieu, dans le calme, et sans avoir à subir les pressions des lobbys qui s'expriment pour ou contre des opinions, sans même prendre le temps de les discuter ».
Les limites du débat scientifique
Interrogé par l'AFP, Bernard Meunier, délégué à la communication de l'Académie des Sciences, a affirmé qu'"un groupe de travail (avait) été mis en place par les six Académies", et qu'"ensuite, cet avis a été validé par les présidents ou secrétaires perpétuels qui engagent la responsabilité des Académies". Dans leur avis, les Académies ciblent aussi la stratégie de communication lors de la sortie de l'étude, avec "la publication de deux livres, d'un film et d'un article scientifique, avec l'exclusivité de leur contenu accordé à un hebdomadaire", en l'occurrence le Nouvel Observateur. Pour sa part, l'agence européenne de sécurité des aliments (Efsa) a déjà estimé que l'étude était "inadéquate" et "insuffisante" pour remettre en question l'innocuité du maïs NK603, dont elle a autorisé la commercialisation au sein de l'UE en 2003.
Le Pr Séralini a estimé que son étude avait "des limites statistiques comme toutes les études faites avec dix rats" par groupe étudié. "Mais l'Efsa a autorisé des maïs transgéniques sur la foi d'études avec cinq ou six rats, des travaux produits par l'industriel lui-même qui ne communique pas les données brutes de l'étude", a déploré le biologiste. Cette accusation sur la faiblesse des études réalisées par les industriels est reprise par de nombreux acteurs opposés aux plantes OGM (ONG, Fédération nationale de l'agriculture bio, Attac, Confédération paysanne, etc). Dans une lettre publiée vendredi et adressée au Premier ministre et aux ministres concernés, ces organisations arguent que "les études présentées par les firmes qui ont obtenu des autorisations de commercialisation de plantes transgéniques montrent toutes encore plus de faiblesses que celles qui sont reprochées à l'étude" du Pr Séralini.
La carence des études préalables
La députée européenne Corinne Lepage, qui soutient ses travaux, a estimé cette semaine que "la carence des études préalables pose la question du fonctionnement des agences réglementaires comme l'EFSA". Le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll a indiqué attendre l'avis de l'Anses avant de se prononcer. Mais "quoi qu'il arrive" il souhaite "poser la question globale des protocoles d'autorisations sur les OGM". Le ministre a assuré que son opinion dépend entièrement des conclusions de l'Anses, qu'il a saisie préalablement, et quoi qu'il arrive il discutera de " la question globale des protocoles d'autorisation sur les OGM"
La conclusion du GECU de l’Anses, après examen critique des publications pertinentes dans le cadre de cette saisine, met en évidence l’absence de publications relatives à des études toxicologiques à long terme sur des produits phytopharmaceutiques formulés et le nombre limité des publications sur les effets à long terme des PGM. Après examen, les experts du GECU considèrent que les conclusions avancées par les auteurs sont insuffisamment soutenues par les données présentées dans cette publication. Par ailleurs, les hypothèses sur les mécanismes d’action proposées pour expliquer les résultats obtenus par l’équipe de Séralini et al. (2012) ne sont pas confortées par l’analyse réalisée.
L’impasse provisoire sur les effets à long terme
Par conséquent, les experts concluent que les résultats de l’étude tels que publiés aujourd’hui ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions des évaluations précédentes sur le maïs NK603 et sur l'herbicide Roundup. En revanche, les experts du GECU soulignent l’absence de travaux étudiant les effets potentiels à long terme de l’exposition à différentes formulations de préparations à base de glyphosate et le nombre limité de ceux portant sur les effets à long terme d’une consommation d’OGM.
Finalement, le travail conséquent et particulièrement courageux du Pr Gilles-Eric Séralini ne pouvait triompher du système européen d’autorisation de mise sur le marché des plantes génétiquement modifiées. La raison en est évidente. Le procès des « OGM » n’est ni celui des biotechnologies, ni celui de l’américain Monsanto. Ce qui est mis en cause par les uns et soutenu par les autres sont les pratiques de l’industrie, sa puissance et son rôle dans nos sociétés. En même temps que la remise en question de ses propres méthodes d’évaluation l’Europe doit affronter, le cas échéant, les abus commis en son sein par ses grandes entreprises au nom de la performance économique et du progrès. Critiquer l’ « américain », seul responsable d’une tragédie mondiale, tient d’une gageure essentielle. Comment se comporte les entreprises européennes en la matière ? Les stratégies d’influence d’un géant tel que BASF soutenues par le couple « Sarkosy-Merkel » sont-elles aussi dénuées de controverses ?
Au-delà de la moralité et de la légalité, le jour où tous les protagonistes européens porteront sans complexe le débat public sur des sujets concrets tel la pomme de terre Amflora de BASF, avec autant de verve et de passion qu’ils ne le font pour le Roundup Ready de Monsanto, l’affrontement aura acquis plus de sincérité, plus de crédibilité et plus de chance d’aboutir à une remise en question profitable.