Le développement fulgurant de Huawei sur la dernière décennie a été possible grâce à la conjonction de plusieurs facteurs :
• Un réel travail de mise à niveau technique des équipements de télécommunications allant des téléphones aux équipements stratégiques "cœur de réseau". Ceci a été rendu possible grâce à une organisation de type militaire et une "armée" de jeunes ingénieurs travaillant pour la R&D,
• La mise à profit d’un grand marché national dont le développement des infrastructures s’appuie sur une politique nationale,
• La conquête de marchés étrangers immédiats en Asie et plus lointains en Afrique s’appuyant souvent au concours de financements gouvernementaux.
Cette croissance du chiffre d’affaires a été basée sur un « business model » fondé sur des équipements montant dans la chaîne de valeur du réseau et vendus à faible marge. Si la Chine étant relativement fermée à l'entrée des opérateurs étrangers sur son territoire, elle a encouragé la venue des équipementiers occidentaux pour des raisons de transferts de technologies depuis le début des années 2000. Transferts de technologies qui ont également profité au développement d’Huawei. Une fois la pénétration de ces marchés immédiats réalisée, Huawei a souhaité revoir son modèle économique et s’attaquer à des marchés à plus forte valeur ajoutée tant en terme de produits (se rapprocher du cœur de réseau) que de services (maîtriser les opérations des clients). Huawei s’est alors projeté vers les Etats-Unis et l’Europe orientale puis occidentale.
La résistance américaine
Face à la mutation du modèle économique et des cibles de Huawei, les Etats-Unis, pour protéger leurs intérêts, ont porté le débat sur le terrain de la sécurité. Cependant, outre le caractère réel de sécurité invoqué, les Etats-Unis souhaitent, par cette restriction, protéger l’industrie nord américaine des équipementiers télécoms qui a fortement souffert ces 10 dernières années. Le canadien Nortel très bien implanté aux US a disparu. Motorola est en convalescence et Lucent a été sauvé par Alcatel en 2006. Il y a deux ans, afin d'aider leurs équipementiers télécoms, les trois principaux opérateurs téléphoniques ATT, Verizon et Sprint ont fait appel à Alcatel-Lucent (plus précisément la partie Lucent d’Alcatel-Lucent) pour le développement des infrastructures 4G aux Etats-Unis.
Bloqués sur le marché américain, Huawei qui a déjà conquis des positions en Europe, notamment orientale, tente de se renforcer sur ce marché à forte valeur ajoutée, lequel par ailleurs, présente l’avantage pour l’équipementier chinois d’être extrêmement fragmenté sur le plan politique, économique et réglementaire. Enfin en Europe, Huawei peut s'attaquer à une multitude de clients opérateurs se livrant une concurrence prix/services intense.
La vulnérabilité de l’Union Européenne
En Europe, contrairement à la Chine, les forces industrielles sont dispersées : la Suède avec l'équipementier Ericsson, la Finlande avec Nokia, l'Allemagne avec Siemens entré en Joint-venture avec Nokia (NSN)), l'Italie poursuit ses activités de transmissions avec Marconi (racheté par Ericsson) et la France dispose d'un ex-champion des années 1990, Alcatel-Lucent (né de la fusion entre Alcatel et Lucent en 2006) et dont on a du mal à mesurer le degré de survie à moyen terme. Quant à la Grande Bretagne, elle n'a pas plus d'équipementiers télécom nationaux dont elle doit défendre les intérêts. Cela explique peut-être a bienveillance manifestée par Londres pour Huawei qui peut maintenant compter sur un allié de poids dans son implantation pour l'attaque du marché des télécoms de l'Europe Occidentale, est-elle dans l'intérêt d'une Europe industrielle des équipementiers?
La Grande Bretagne comme base arrière européenne pour Huawei?
Outre le fait mentionné en novembre dernier sur le site Knowckers indiquant que John Suffolk, alors responsable de la sécurité informatique et numérique au 10 Downing Street ait été recruté par Huawei en tant que responsable de la sécurité du groupe depuis 2011, les autorités anglaises par la voix de Derek Smith (spécialiste en Cyber sécurité au Cabinet du Ministre) indiquent que, contrairement aux Etats-Unis, celles-ci n'ont pas de "concerns" particuliers vis à vis des équipements de Huawei et ZTE. Pourquoi un tel positionnement ? Dans un premier temps, il est intéressant de constater que dès le printemps 2012, les autorités anglaises ont autorisé l'opérateur China Telecom à devenir un MVNO (Mobile Virtual Network Operator) s'appuyant sur les infrastructures de l'opérateur Everything, Everywhere (T Mobile - Orange) afin de fournir des services télécom à la communauté chinoise vivant en Angleterre.
Contrairement au Etats-Unis qui ont vu la disparition progressive de leurs équipementiers télécoms, l'Europe continentale a su jusqu'à présent préserver et développer cette industrie. Or ses équipementiers se battent becs et ongles contre les assauts répétés de Huawei qui tente de percer sur le marché européen. La politique de l'Europe privilégiant le consommateur plutôt que le producteur peut considérer d'un bon œil la venue de cet opérateur chinois qui permettra des économies de coûts dans les développements des réseaux. Mais nul doute que cela se fera aux dépends des équipementiers européens.
• Un réel travail de mise à niveau technique des équipements de télécommunications allant des téléphones aux équipements stratégiques "cœur de réseau". Ceci a été rendu possible grâce à une organisation de type militaire et une "armée" de jeunes ingénieurs travaillant pour la R&D,
• La mise à profit d’un grand marché national dont le développement des infrastructures s’appuie sur une politique nationale,
• La conquête de marchés étrangers immédiats en Asie et plus lointains en Afrique s’appuyant souvent au concours de financements gouvernementaux.
Cette croissance du chiffre d’affaires a été basée sur un « business model » fondé sur des équipements montant dans la chaîne de valeur du réseau et vendus à faible marge. Si la Chine étant relativement fermée à l'entrée des opérateurs étrangers sur son territoire, elle a encouragé la venue des équipementiers occidentaux pour des raisons de transferts de technologies depuis le début des années 2000. Transferts de technologies qui ont également profité au développement d’Huawei. Une fois la pénétration de ces marchés immédiats réalisée, Huawei a souhaité revoir son modèle économique et s’attaquer à des marchés à plus forte valeur ajoutée tant en terme de produits (se rapprocher du cœur de réseau) que de services (maîtriser les opérations des clients). Huawei s’est alors projeté vers les Etats-Unis et l’Europe orientale puis occidentale.
La résistance américaine
Face à la mutation du modèle économique et des cibles de Huawei, les Etats-Unis, pour protéger leurs intérêts, ont porté le débat sur le terrain de la sécurité. Cependant, outre le caractère réel de sécurité invoqué, les Etats-Unis souhaitent, par cette restriction, protéger l’industrie nord américaine des équipementiers télécoms qui a fortement souffert ces 10 dernières années. Le canadien Nortel très bien implanté aux US a disparu. Motorola est en convalescence et Lucent a été sauvé par Alcatel en 2006. Il y a deux ans, afin d'aider leurs équipementiers télécoms, les trois principaux opérateurs téléphoniques ATT, Verizon et Sprint ont fait appel à Alcatel-Lucent (plus précisément la partie Lucent d’Alcatel-Lucent) pour le développement des infrastructures 4G aux Etats-Unis.
Bloqués sur le marché américain, Huawei qui a déjà conquis des positions en Europe, notamment orientale, tente de se renforcer sur ce marché à forte valeur ajoutée, lequel par ailleurs, présente l’avantage pour l’équipementier chinois d’être extrêmement fragmenté sur le plan politique, économique et réglementaire. Enfin en Europe, Huawei peut s'attaquer à une multitude de clients opérateurs se livrant une concurrence prix/services intense.
La vulnérabilité de l’Union Européenne
En Europe, contrairement à la Chine, les forces industrielles sont dispersées : la Suède avec l'équipementier Ericsson, la Finlande avec Nokia, l'Allemagne avec Siemens entré en Joint-venture avec Nokia (NSN)), l'Italie poursuit ses activités de transmissions avec Marconi (racheté par Ericsson) et la France dispose d'un ex-champion des années 1990, Alcatel-Lucent (né de la fusion entre Alcatel et Lucent en 2006) et dont on a du mal à mesurer le degré de survie à moyen terme. Quant à la Grande Bretagne, elle n'a pas plus d'équipementiers télécom nationaux dont elle doit défendre les intérêts. Cela explique peut-être a bienveillance manifestée par Londres pour Huawei qui peut maintenant compter sur un allié de poids dans son implantation pour l'attaque du marché des télécoms de l'Europe Occidentale, est-elle dans l'intérêt d'une Europe industrielle des équipementiers?
La Grande Bretagne comme base arrière européenne pour Huawei?
Outre le fait mentionné en novembre dernier sur le site Knowckers indiquant que John Suffolk, alors responsable de la sécurité informatique et numérique au 10 Downing Street ait été recruté par Huawei en tant que responsable de la sécurité du groupe depuis 2011, les autorités anglaises par la voix de Derek Smith (spécialiste en Cyber sécurité au Cabinet du Ministre) indiquent que, contrairement aux Etats-Unis, celles-ci n'ont pas de "concerns" particuliers vis à vis des équipements de Huawei et ZTE. Pourquoi un tel positionnement ? Dans un premier temps, il est intéressant de constater que dès le printemps 2012, les autorités anglaises ont autorisé l'opérateur China Telecom à devenir un MVNO (Mobile Virtual Network Operator) s'appuyant sur les infrastructures de l'opérateur Everything, Everywhere (T Mobile - Orange) afin de fournir des services télécom à la communauté chinoise vivant en Angleterre.
Contrairement au Etats-Unis qui ont vu la disparition progressive de leurs équipementiers télécoms, l'Europe continentale a su jusqu'à présent préserver et développer cette industrie. Or ses équipementiers se battent becs et ongles contre les assauts répétés de Huawei qui tente de percer sur le marché européen. La politique de l'Europe privilégiant le consommateur plutôt que le producteur peut considérer d'un bon œil la venue de cet opérateur chinois qui permettra des économies de coûts dans les développements des réseaux. Mais nul doute que cela se fera aux dépends des équipementiers européens.