AQMI n'est-elle qu'une organisation terroriste ?

Présentation de la situation actuelle dans la zone sahélo-saharienne

La conjoncture confuse au Mali ainsi que l’enlèvement des otages occidentaux fait partie maintenant de l’actualité quotidienne. Ces évènements ont permis de faire la lumière sur la situation chaotique de l’espace sahélien, une zone sous-administrée et sous-défendue qui a permis, notamment après la crise malienne et libyenne, la prolifération d’organisations criminelles et terroristes comme AQMI (Al-Qaïda au Maghreb Islamique).
François Hollande a même confirmé l’hypothèse d’une intervention militaire dans la région, mais est-ce vraiment la solution ? Comment éradiquer une nébuleuse qui sévit dans une zone que l’on nomme le nouvel Afghanistan ? AQMI dispose-elle d’une structure définie ? Quelle sont ses relations avec d’autres nébuleuses comme « Anssar eddine » ou le front Polisario ? Et quelles sont ses sources de financement et les manipulations possibles derrière ?

La zone sahélo-saharienne constitue une large étendue désertique dotée d’une faible densité de population et de frontières incontrôlables.

Ces éléments  géographiques couplés à une instabilité politique dans le nord-Mali ont permis la création de « zones grises » complexes qui permettent la prolifération de la nébuleuse AQMI.
D’autant plus que la région est devenue une plaque tournante du trafic de drogue international : l’héroïne arrivant de l'est de l'Afrique et la cocaïne de l'ouest - se rejoignent désormais dans le Sahara, empruntant de nouveaux itinéraires à travers le Tchad, le Niger et le Mali.
Nous assistons donc à une hybridation des mouvements terroristes et des milieux criminels, ce qui permet à AQMI de se servir de ce réseau pour se financer et recruter ses troupes.
Plus au nord, Le mouvement séparatiste du Polisario qui est en nette décomposition depuis quelques années verse de plus en plus dans le crime organisé ; l’islamisme radical et l’exploitation des filières d’immigration clandestine. On ne peut que se poser des questions sur les liens occultes entre l’organisation et AQMI, d’autant plus que suite à la réunion internationale de Bamako le 19 octobre, des combattants du mouvement se sont dirigés vers GAO afin d’aider AQMI face à l’offensive imminente de la communauté internationale.
Si l’on rajoute à cela la prise de pouvoir de la milice djihadiste « Ansar Eddine » au nord Mali, nous assistons à une combinaison de facteurs géopolitiques créant un cocktail explosif dans la région, et permettant à AQMI de tisser sa sphère d’influence dans la zone, soulevant des inquiétudes dans l’ensemble de la région et en Europe.

Marge de manœuvre d’AQMI

Mais qu’est-ce que réellement qu’AQMI ? S’agit-il d’un ordre politico-religieux armé comme le Hezbollah au Liban opérant auprès des populations sahéliennes ? Leurs activités et  leur organisation tendent à démontrer le contraire.

AQMI est en réalité une structure mafieuse totalement hétérogène, constituée de différents membres  ayant généralement des intérêts divergents. Ces membres sont principalement des anciens combattants algériens du GSPC (Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat), couplés à des unités touaregs et mauritaniennes.
L’ensemble de ces composantes  s’adonne à des activités criminelles afin de se financer tout en n’ayant aucune stratégie ou projet politique. Certes, il y a le discours légitimiste derrière mais celui-ci ne sert qu’à masquer une organisation n’ayant aucun enjeu défini mais cherchant simplement à tirer profit du chaos sahélien.
Le financement des opérations de déstabilisation d’AQMI dans le Sahel est issu de divers trafics : Racket d’immigrés clandestins, armes, véhicules et médicaments.
La source de financement principale reste néanmoins le trafic de drogue. En effet depuis plus de 8 ans les cartels de la drogue d'Amérique latine utilisent l'Afrique comme plaque tournante et base arrière de leur trafic de cocaïne vers l'Europe. AQMI se sert de ce réseau et des flux transitant afin de déstabiliser les états dans la région.
L’autre source de financement principale correspond aux enlèvements d’occidentaux travaillants dans la zone, ce qui permet de donner une visibilité médiatique à la nébuleuse et de demander des rançons en échange.
Enfin les différents évènements géopolitiques survenus dans la région permette de nourrir la nébuleuse, comme la guerre en Lybie qui a permit à AQMI de se fournir en armes mais aussi de recruter ses troupes parmi des combattants soudanais ou des séparatistes du Polisario.

Quelles solutions face à la montée d’AQMI ?

Face aux activités terroristes d’AQMI qui transforment la région en nouvel Afghanistan, quelles solutions se profilent afin d’éradiquer cette menace ? La première est une intégration régionale de l’Afrique du nord, région doté de ressources stratégiques.
L’une des clés de résolution de cette équation complexe est donc la normalisation des relations entre la Maroc et l’Algérie sur le conflit du Sahara.  Cela permettra de développer une relation bilatérale entre les deux pays, et ainsi construire une base de réflexion solide sur les aspects sécuritaires de la région.
D’un autre côté, il s’agit de ne pas se focaliser sur un ennemi fantôme (AQMI) dans un premier temps, mais de réfléchir plutôt à des stratégies de reconstruction politique et économique des pays de la région sahélienne, en luttant contre la pauvreté et l’explosion démographique dans ces pays.
Une fois ces éléments intégrés, une coopération internationale pourrait alors naître afin d’éradiquer l’ensemble des trafics qui pullulent dans la région, et ainsi couper à la source le financement d’AQMI l’affaiblissant petit à petit et la conduisant à imploser par la suite.

Ali Moutaib

Bibliographie





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  • Alain Antil, « L’Afrique et la guerre contre la terreur », Politique étrangère 2006/3, Automne, p. 538-591

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  • « Le désert de tous les dangers : des français dans le piège du sahel », 2012, [Programme TV] M6