PME : Arnaud Montebourg va dans la mauvaise direction

En juillet 2012, le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg a confié à Louis Gallois la mission de réfléchir sur la compétitivité : « Le premier est relatif à la compétitivité, aux conditions dans lesquelles nous nous battons pour défendre notre industrie. On nous parle beaucoup du coût du travail : c’est un facteur important, mais ce n’est pas le seul ! La compétitivité, c’est le prix des facteurs de production : le travail et la protection sociale ; le capital et sa rémunération ; l’énergie et son prix. J’ai eu l’honneur d’animer, avec M. Louis Gallois, ancien président d’EADS, ancien directeur général de l’industrie, ancien directeur de cabinet de Jean-Pierre Chevènement – qui fut lui-même un grand ministre de l’industrie au début des années 1980 –, l’un des ateliers de la grande conférence sociale imaginée par le Gouvernement. Nous nous sommes penchés sur la question de la compétitivité, en envisageant les trois facteurs de production. Pour le Gouvernement, il n’y a pas de sujet interdit ; tous doivent être examinés, quand nous les rencontrons. Le Premier ministre a confié une mission sur ce sujet à M. Louis Gallois, lequel rendra son rapport au mois d’octobre… »
C’est le réseau des ingénieurs des Mines et des Polytechniciens qui a pris en main la réalisation de ce rapport. Le problème est encore une fois le même : la compétitivité ne va être étudiée que sous l’angle des grands groupes industriels en non à partir de la réalité des PME et de leur ancrage territorial. Ce n’est pas la compétence des réseaux X Mines qui est cause mais leur manière d’analyser le potentiel économique du pays et de ne pas s’ouvrir à de nouvelles grilles de lecture. Le rapport Gallois sur la compétitivité risque donc d’être un discours ressassé des recettes macroéconomiques de la politique industrielle sans apporter aucune innovation sur les nouvelles stratégies de développement assimilables par les PME.
Les PME françaises dirigées très majoritairement par des entrepreneurs qui n’ont pas fait les grandes écoles souffrent depuis des décennies de ce rapport défavorable qui s’est installé entre des grands comptes qui captent une très grande partie des financements publics et privés et des PME confinés au rôle de sous-traitants. Les chefs d’entreprise qui tentent de développer des activités à fort potentiel sont systématiquement bloqués dans leur accès au financement par ces nouveaux détenteurs de privilèges. Le blocage qui a miné les fondements de la société monarchique à la fin du XVIIIè siècle s’est reconstitué sous une autre forme. Les élites françaises très interdépendantes entre la haute administration et les leaders du CAC 40 se montrent incapables de laisser une marge de manœuvre stratégique au tissu économique des PME.
La relance de la compétitivité passe par une étude approfondie de cette autre réalité économique qui échappe aux réseaux des grandes écoles. Le pouvoir politique est incapable de sortir de ce piège. La culture des réseaux des X Mines qui très naturellement cherchent à protéger leurs privilèges professionnels est un des verrous à l’origine des succès mais aussi de la paralysie de notre système industriel.
Arnaud Montebourg qui prône l’émergence d’une sixième République, se montre actuellement incapable d’initier la moindre pensée économique novatrice sur cette question essentielle. Pour aller plus loin sur un dossier aussi bloqué, il fallait le confier à des chefs d’entreprise de PME qui ont fait la démonstration de leur talent en termes de compétitivité. Ce ne fut pas le cas. Le lobbying très actif d’un Jean-Louis Beffa qui est le garant symbolique de ce réseau des X Mines auprès de Élysée et du gouvernement apparaît de plus en plus comme un obstacle majeur à cette prise en compte du potentiel des PME dans la relance de l’économie française.