Les risques liés au passage au numérique pour l’Education nationale

Les premiers marchés passés entre Apple et des établissements scolaires (commercialisation de la tablette numérique Ipad d’Apple) sont les premiers signes de l’introduction du numérique dans le domaine éducatif français. L'éducation représente pour ces firmes un domaine pratiquement vierge (70% est sous contrôle public).
Les entreprises concernées par ce marché, qui est encore très majoritairement sous contrôle public, l’abordent par le biais de la tablette numérique et de l’éventuelle édition numérique de manuels scolaires.

Enjeux
Le passage progressif au numérique dans le processus pédagogique de l’Education nationale soulève deux problèmes :
•    La propriété de l’information
•    Le contrôle de la production des connaissances

Un débat à forte résonance potentielle
Depuis l’apparition d’Internet, la question de la propriété de l’information est au cœur de nombreuses polémiques récurrentes sur le fonctionnement de la société de l’information et la manière de réguler les pratiques concurrentielles sur ce marché d’avenir. L’une des questions les plus virulentes oppose les grandes firmes multinationales à dominante anglo-saxonnes et les internautes qui ne veulent pas être dépossédés des informations ayant trait à leur vie privée.
Ce débat est d’autant plus polémique dans le cadre scolaire. Depuis plusieurs années des enseignants du second degré refusent de mettre en ligne les notes qu’ils délivrent à leurs élèves sous le prétexte qu’ils ne savent pas quel usage pourra être fait de ces notes dans le futur. L’externalisation des systèmes informatiques de l’Education nationale est déjà considérée comme une menace potentielle.

Le contrôle de l’information et la production de connaissances
La distribution actuelle d’Ipad dans des établissements scolaires français ne présente pas de risque pour l’instant car aucun stockage d’informations sensibles n’est réalisé. En revanche, le Ministère de l’Education Nationale aura à gérer dans les années à venir le passage à l’économie numérique et la mise en circulation de tablettes numériques.
Pour ce qui concerne la tablette Ipad, l’accès à l’information pose deux problèmes majeurs compte tenu du business modèle de la société Apple :
•    L’évolution de la gestion du système de notation parle biais de l’informatique présente un risque potentiel sur l’usage qui va être fait de l’information fournie par ou sur l’élève scolarisé. Certains syndicats d’enseignants sont aussi très sensibles aux conséquences encore non mesurables sur l’évaluation de leur travail par le biais d’une tablette graphique. La tablette numérique accentue ce risque si elle est connectée à un système fermé comme celui d’Apple. Cette dernière ne donne aucun droit de regard sur les applications, leur process et l’usage des informations collectées…
•    Le système fermé d’Apple donne à cette entreprise toute latitude pour avoir un droit de regard et même de choix en termes de marketing sur la fabrication de la connaissance qui transite par la tablette numérique Ipad. Cette forme de sélection des connaissances peut devenir une source de conflits dans un pays comme la France.

Une filière industrielle en devenir
Les spécificités de la France dans le domaine informatique (cf. la CNIL) donnent aux pouvoirs publics la capacité de protéger l’information privée des citoyens, notamment par les précisions apportées dans le code des marchés publics lors du lancement des appels d’offre. Cette particularité est une opportunité pour la consolidation d’une filière industrielle française et européenne qui dispose de la capacité d’innovation mais pas encore de la taille critique pour faire face aux défis concurrentiels que sont Apple, Google et Microsoft.