Greenpeace franchit la ligne rouge

Dans la guerre de l’information, il existait deux catégories d’acteurs : les « bons et les méchants ». Les « bons » étaient les représentants de la société civile en lutte contre les injustices et les malversations du monde économique et politique. Les « méchants » étaient les puissants qui n’hésitaient pas à manipuler, tromper et désinformer pour défendre leurs intérêts. Ce qui différenciait les pratiques des bons des méchants était la manière de polémiquer. Les groupes représentant la société civile essayaient tant bien que mal de se limiter à des campagnes de protestation fondées sur l’art de la rhétorique. Autrement dit, ils défendaient des arguments qu’ils estimaient fondés et les opposaient aux discours de leurs adversaires. Cette manière de débattre est en train d’évoluer puisque Greenpeace n’hésite plus aujourd’hui à utiliser la rumeur et la fausse information pour déstabiliser les entreprises que l’ONG prend pour cible. C’est notamment le cas avec Shell comme le démontre cet extrait du blog du communicant :
«Ainsi, dès mai 2012, en réponse au site officiel de Shell sur ses opérations de forage en Arctique, Greenpeace a élaboré un site qui apparaît visuellement comme la quasi réplique du premier. Baptisé « Artic Ready », l’espace donne l’impression à l’internaute qui s’y aventure, d’être dans un site animé par la compagnie pétrolière. Il offre notamment aux visiteurs la possibilité de suggérer des visuels promotionnels via un concours pour « Artic Ready ». Le tout rehaussé par des messages ambivalents tels que « You can’t run your SUV on cute. Let’s Go » qu’on pourrait littéralement traduire par « vous ne pouvez pas faire marcher votre monospace avec des bons sentiments. Allons-y ». Bien que le site fût rapidement démasqué, il continua à rencontrer un vif succès sur le Web et à semer la confusion entre le discours corporate de Shell et celui travesti de Greenpeace, épaulé pour l’occasion par les activistes de The Yes Men. »
Cette pratique désormais assumée officiellement par l’ONG Greenpeace est la porte ouverte à tous les dérapages.  A partir du moment où les « bons » utilisent les armes du « méchant », il devient difficile de savoir où commence le débat et où s’arrête la manipulation de l’image et du texte. L’ONG qui dans le passé a déjà commis des erreurs dans ses jugements (errare humanum est) passe à un registre offensif qui risque de se retourner contre elle et qui aura aussi des effets collatéraux sur la nature des d »ébats sur Internet compte tenu de la réputation de l’ONG sur le plan mondial.