Depuis début mars, le consommateur européen d’œuf a le moral dans les chaussettes. Le dimanche 4 mars, le britannique a cru s’étouffer en mangeant ses œufs brouillés et en lisant son journal, Le Guardian : « le prix des œufs sur le marché au gros a été multiplié par quatre en une semaine ! ». Le temps que l’information traverse la manche, c’est au tour du français de recracher son œuf à la coque le mardi 13 mars en écoutant France Inter : le prix des œufs a augmenté de 75% depuis novembre 2011 ! Le coup de grâce est réservé à l’allemand à qui le Frankfurter Rundschau annonce le 19 mars que la vente des œufs en supermarché sera bientôt rationnée. A en croire tous les grands média européens, l’augmentation du prix des œufs serait directement lié à la directive européenne 1999/74/CE. Celle-ci oblige tous les éleveurs de poules en batterie à agrandir de 550 à 750 cm carré leur cage, pour le bien être des poules. La directive stipule également qu’il sera désormais obligatoire d’aménager plus confortablement les cages notamment avec un perchoir et un nid. C’est donc au consommateur de maudire la Commission …et de payer la facture !
Mais est ce réellement le cas ?
A y regarder de plus près, on pourrait en douter. Pire, il nous semble que les médias et le consommateur sont au centre d’une opération de manipulation informationnelle orchestrée par les puissants lobbies de l’agro-alimentaire.
En effet, la totalité des sources des articles et des reportages sont liés aux professionnels des industries transformatrices d’œufs (« syndicat des fabricants de biscuits et gâteaux de France », « association des entreprises de produits alimentaires élaborés », « syndicats des industriels fabriquant de pâtes alimentaires de France » etc.), et des associations d’éleveurs de poules (« Comité national pour la promotion de l’œuf », « Comité consultatif européen sur les œufs »). Le chiffre d’une augmentation de 75% du prix de l’œuf (entre octobre 2011 et février 2012), conséquence directe de la directive européenne revient dans la plupart des articles. Or, un rapide calcul permet de mettre en doute le lien direct entre la directive et le prix des œufs. Comment une augmentation de 36% de la superficie de la cage de la poule peut-elle engendrer une hausse de 75%du prix de l’œuf ? Prenons l’exemple d’un éleveur qui posséderait 100 poules, sur une surface de 5.5 m². Avec l’augmentation de la taille de la cage, il n’a plus de place que pour 73 poules. Imaginons qu’avec ses 100 poules, il faisait auparavant 100 euros de chiffre d’affaire. Les poules ne pondant pas davantage, il aura donc un manque à gagner de 27€ à compenser, et à récupérer sur son prix de vente. Mais cette compensation du manque à gagner par l'augmentation du prix de vente des œufs ne doit être que de... 36%, et non 75%! D'autant plus que les coûts de notre fermier baissent, puisqu'il a moins de poules. Ajoutons à cela que l’état français a débloqué 20 millions d’euros en 2011 pour aider les éleveurs à s’équiper. Et que ces même éleveurs auraient pu étaler les investissements sur plusieurs années, étant donné que la directive date..de 1999 !
D’ailleurs, si la directive date de 1999 comment comprendre que le prix des œufs aient si soudainement explosé depuis octobre 2011 ? Le timing est bien choisi pour les industriels. En effet, la directive stipule qu’à partir de janvier 2012, les pays qui ne seront pas en règle devront payer de lourdes amendes. Or la France est le plus gros pays producteur d’œuf en Europe. Il y a donc un enjeu financier majeur pour les industriels. On peut également se poser la question de la date de sortie des premiers articles dans la presse. Début mars, c’est un mois avant Pâques, une fête lors de laquelle, traditionnellement, les enfants cherchent les œufs dans le jardin. Une fête qui engendre donc une augmentation de la vente d’œufs. Il est donc plus évident pour les industriels de sensibiliser le consommateur et donc les média à l’approche d’une telle date. Par ailleurs, de nombreux articles au ton alarmiste agitent le chiffon rouge en prévoyant des ruptures de lignes de production et du chômage technique. Un argument, qui en temps de crise, ne manque pas d’interpeller l’opinion.
Le problème, c’est aussi la présentation de l’affaire par les média. En effet, l’augmentation du prix des œufs ne concernent pas les consommateurs. Car le prix de la vente au détail n’est pas soumis à la cotation mais à un contrat, entre les producteurs et la grande distribution qui n’a pas répercuté l’augmentation des prix en grande surface. En essayant de faire croire que l’augmentation des œufs concerne tout le monde, l’industrie agro-alimentaire cherche ainsi à faire pression sur la Commission via l’opinion publique pour qu’elle donne de la marge aux éleveurs. L’objectif de cette campagne de manipulation informationnelle est d’ailleurs écrit noir sur blanc dans les articles : faire pression sur la Commission pour qu’elle « redonne de la disponibilité sur le marché intérieur en privilégiant le marché européen ». En gros, qu’elle donne plus de temps aux producteurs pour aménager les cages des poules…et faire les travaux qu’ils ont repoussés depuis plus de 10 ans.
Mais est ce réellement le cas ?
A y regarder de plus près, on pourrait en douter. Pire, il nous semble que les médias et le consommateur sont au centre d’une opération de manipulation informationnelle orchestrée par les puissants lobbies de l’agro-alimentaire.
En effet, la totalité des sources des articles et des reportages sont liés aux professionnels des industries transformatrices d’œufs (« syndicat des fabricants de biscuits et gâteaux de France », « association des entreprises de produits alimentaires élaborés », « syndicats des industriels fabriquant de pâtes alimentaires de France » etc.), et des associations d’éleveurs de poules (« Comité national pour la promotion de l’œuf », « Comité consultatif européen sur les œufs »). Le chiffre d’une augmentation de 75% du prix de l’œuf (entre octobre 2011 et février 2012), conséquence directe de la directive européenne revient dans la plupart des articles. Or, un rapide calcul permet de mettre en doute le lien direct entre la directive et le prix des œufs. Comment une augmentation de 36% de la superficie de la cage de la poule peut-elle engendrer une hausse de 75%du prix de l’œuf ? Prenons l’exemple d’un éleveur qui posséderait 100 poules, sur une surface de 5.5 m². Avec l’augmentation de la taille de la cage, il n’a plus de place que pour 73 poules. Imaginons qu’avec ses 100 poules, il faisait auparavant 100 euros de chiffre d’affaire. Les poules ne pondant pas davantage, il aura donc un manque à gagner de 27€ à compenser, et à récupérer sur son prix de vente. Mais cette compensation du manque à gagner par l'augmentation du prix de vente des œufs ne doit être que de... 36%, et non 75%! D'autant plus que les coûts de notre fermier baissent, puisqu'il a moins de poules. Ajoutons à cela que l’état français a débloqué 20 millions d’euros en 2011 pour aider les éleveurs à s’équiper. Et que ces même éleveurs auraient pu étaler les investissements sur plusieurs années, étant donné que la directive date..de 1999 !
D’ailleurs, si la directive date de 1999 comment comprendre que le prix des œufs aient si soudainement explosé depuis octobre 2011 ? Le timing est bien choisi pour les industriels. En effet, la directive stipule qu’à partir de janvier 2012, les pays qui ne seront pas en règle devront payer de lourdes amendes. Or la France est le plus gros pays producteur d’œuf en Europe. Il y a donc un enjeu financier majeur pour les industriels. On peut également se poser la question de la date de sortie des premiers articles dans la presse. Début mars, c’est un mois avant Pâques, une fête lors de laquelle, traditionnellement, les enfants cherchent les œufs dans le jardin. Une fête qui engendre donc une augmentation de la vente d’œufs. Il est donc plus évident pour les industriels de sensibiliser le consommateur et donc les média à l’approche d’une telle date. Par ailleurs, de nombreux articles au ton alarmiste agitent le chiffon rouge en prévoyant des ruptures de lignes de production et du chômage technique. Un argument, qui en temps de crise, ne manque pas d’interpeller l’opinion.
Le problème, c’est aussi la présentation de l’affaire par les média. En effet, l’augmentation du prix des œufs ne concernent pas les consommateurs. Car le prix de la vente au détail n’est pas soumis à la cotation mais à un contrat, entre les producteurs et la grande distribution qui n’a pas répercuté l’augmentation des prix en grande surface. En essayant de faire croire que l’augmentation des œufs concerne tout le monde, l’industrie agro-alimentaire cherche ainsi à faire pression sur la Commission via l’opinion publique pour qu’elle donne de la marge aux éleveurs. L’objectif de cette campagne de manipulation informationnelle est d’ailleurs écrit noir sur blanc dans les articles : faire pression sur la Commission pour qu’elle « redonne de la disponibilité sur le marché intérieur en privilégiant le marché européen ». En gros, qu’elle donne plus de temps aux producteurs pour aménager les cages des poules…et faire les travaux qu’ils ont repoussés depuis plus de 10 ans.