Nabucco est le projet de création d’un gazoduc reliant la mer Caspienne à l’Europe centrale. Soutenu par l’union européenne, il permettrait aux états membres de moins dépendre de la Russie, d’où provient 25% du gaz européen et gagner ainsi une plus grande indépendance énergétique. D’une longueur de 3300 km, Il aurait une capacité de 31 milliards de m3 de gaz. Le gazoduc passera par la Turquie, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et l’Autriche. L’Autriche à partir d’où le gaz pourra être redistribué à l’Allemagne et la République Tchèque par des gazoducs autres que Nabucco. Reste encore à définir le pays d’où proviendra le gaz. La gestion du gazoduc revient à la société Nabucco Gas Pipeline International dirigée par l’autrichien Reinhard Mitschek et dont les actionnaires sont : BOTAS (Turquie), BULGARAZ (Bulgarie), OMV (Autriche), MOL (Hongrie), TRANSGAZ (Roumanie), RWE (Allemagne).
La construction prévue pour débuter en 2011 et la mise en exploitation pour 2015, ont été repoussées à 2013 pour la construction et 2017 pour la mise en exploitation. De plus le coût du projet est passé de 7 à 15 milliards d’euros.
De nombreuses difficultés à l’accomplissement du projet ne cessent d’apparaître. Nabucco bat de l’aile et semble être au point mort.
En effet, la principale difficulté pour Nabucco est de trouver le pays où se fournir en gaz autour de la mer Caspienne.
Pour faire démarrer son projet, Nabucco a pensé à plusieurs pays gaziers que sont l’Iran, l’Irak, l’Egypte, l’Azerbaïdjan et le Turkménistan. L’affaire semble plus que compliquée pour les trois premiers puisque l’Irak est instable politiquement, l’Iran est mis hors jeu par les États Unis d’Amérique (soutien de Nabucco) du fait de son programme nucléaire. Et pour acquérir du gaz égyptien, il faudra passer par la Syrie qui est en pleine révolution et dont le président est désigné infréquentable de nos jours. Restent alors l’Azerbaïdjan et le Turkménistan.
Les dirigeants de Nabucco espéraient obtenir de l’Azerbaïdjan et du Turkménistan qu’ils s’engagent à fournir de 8 à 10 milliards de m3 par an.
En 2008 une forte délégation européenne avait rapporté de Achgabat la promesse de vente de 10 milliards de m3 par an de gaz turkmène, sans pour autant avoir abordé le sujet de la construction du gazoduc.
Quant à l’Azerbaïdjan, un accord d’association avait été signé en 2010.
Le problème est que, dans le même temps, l’Azerbaïdjan et la Turquie ont conclu en Juin 2010 un accord portant sur l’exportation par ITGI (gazoduc reliant la Turquie, la Bulgarie, la Grèce et l’Italie), de tout le gaz disponible du tout nouveau site de Shan Deniz, lequel devait fournir aussi Nabucco.
Dans le même cas, le Turkménistan livre depuis cette année 30 milliards de m3 de gaz à la Chine et fourni aussi la Russie en gaz. Bien que le Turkménistan soit la quatrième réserve mondiale de gaz, les ressources risquent de manquer pour Nabucco.
À cela, s’ajoute le fait que les cinq pays riverains de la mer Caspienne ne sont jamais parvenus à un accord sur le partage des eaux. À cet effet, l’Azerbaïdjan et le Turkménistan avaient signé un accord en 2007 interdisant le développement d’activités hors de leurs eaux territoriales sans l’accord de leurs voisins. Ainsi étant donné que le pipeline Turkmène devra passer par le fond de la Caspienne, cela ne pourra se faire sans l’accord des pays voisins. Ce qui complique un peu plus l’avenir du projet Nabucco au niveau des législations vu qu’il prend en compte les intérêts juridiques des pays associés.
Une autre menace pour le projet Nabucco vient des gaz schisteux.
Les gaz schisteux sont considérés comme une nouvelle source d’énergie, depuis l’avènement de techniques nouvelles telles que le fracking, permettant son extraction par fracturation hydraulique.
Ils constituent une menace, du fait que le retard pris par Nabucco et son coût qui ne cesse d’augmenter, pourraient pousser les pays européens à exploiter leurs sols. Ainsi une extraction à grande échelle de gaz schisteux bouleverserait les équilibres géopolitiques et constituerait une alternative crédible au projet Nabucco.
Outre le fait qu’il n’ait toujours pas de fournisseur de gaz, Nabucco est soumis à rude concurrence avec le projet South Stream du géant russe Gazprom.
En effet, South Stream semble plus avancé que Nabucco.
Contrairement à Nabucco, il a déjà son fournisseur de gaz qui est la Russie. De plus grâce à son intermédiaire Gerhard Schröder, ancien chancelier allemand et président du conseil de surveillance de North-European Gas Pipeline (Gazprom) ; Gazprom semble proche d’acquérir la participation de RWE à South Stream et son retrait de Nabucco. Or, une explosion du système de partenariat qui sert de base financière à Nabucco signifierait sans aucun doute une mise en péril de ce dernier selon les experts.
De même les discussions semblent bien avancées entre la Russie et la Turquie en vue d’une adhésion de cette dernière au projet South Stream. Nabucco semble vraiment être déborder par tout les cotés.
Enfin, les experts internationaux ont plusieurs fois annoncé qu’il n’y aurait pas assez de gaz pour South Stream et Nabucco. Car le gaz russe sera extrait pour une partie en Sibérie et l’autre dans la mer Caspienne. Ainsi le premier gazoduc fonctionnel empêchera l’exploitation de l’autre.
Étant donné que Nabucco perd ses positions en compétitivité face à South Stream, il est plus probable que South Stream voie le jour avant Nabucco et donc que ce dernier soit un « mort-né ».
Le projet Nabucco commence à paraître incompréhensible pour tout le monde. Il est difficile de comprendre les déclarations de ses dirigeants qui estiment le projet encore viable alors que tout montre le contraire et qu’il y a jusqu'à présent pas de gaz pour remplir son gazoduc.
Il est d’autant plus difficile de comprendre que le principale soutient de Nabucco, l’Union Européenne s’exprime publiquement par la voie du Commissaire européen à l'Energie Günther Oettinger, sur son possible soutient à South Stream à condition que celui-ci respecte les exigences techniques au niveau de la sécurité. Ce qui s’appel se tirer une balle dans le pied.
Au point où certains partenaires au projet Nabucco comme par exemple la Bulgarie par la voie de son Premier Ministre Boïko Borissov commence à se montrer sceptique sur un véritable soutient de l’UE au projet Nabucco : "Tous les pays en Europe de l'Ouest et les Etats-Unis ont déclaré ce projet prioritaire. Mais rien ne s'est passé dans les faits. Les Etats-Unis et la Commission européenne doivent expliquer pourquoi ce projet est toujours à l'étape zéro"
On pourrait alors se dire que les européens sachant Nabucco mort, continuent de faire croire qu’il est viable afin de trouver un arrangement avec la Russie en vue d’obtenir une remise sur les livraisons de gaz russe. Le mort-né Nabucco serait en fait un moyen de pression et de dissuasion.