Les Talibans rejouent l’offensive du Têt, version superette

Et les journalistes occidentaux du quotidien britannique Guardian et du journal français La Croix mordent à l’hameçon. Les actes de terrorisme commis par quelques talibans à Kaboul n’ont pas de signification militaire spectaculaire. Ces piqures de moustique (tirs de roquette, commando de moins d’une dizaine d’hommes au cœur de Kaboul) font vendre de l’information par les médias et s’intègrent dans une stratégie de communication que le Guardian qualifie de guerre de l’information gagnée par les talibans. Or les actes spectaculaires sont parfois l’arbre qui cache la forêt. Mais cette évidence n’intéresse guère les journalistes occidentaux. Encore mille fois moins que les communistes vietnamiens, les talibans sont incapables de remporter une victoire militaire contre les forces de l’Otan. Le véritable problème n’est pas là. Les talibans en 2001 avaient perdu la guerre de l’information. Les  stratégies américaines successives dans cette partie du monde ont redonné une virginité à des clans tribaux bourrés de contradictions culturelles et prêts à faire n’importe quoi pour exister sut leur sol, quitte à s’entretuer comme ils l’ont déjà démontré après le départ des soviétiques dans la guerre civile qui a opposé différents chefs de guerre afghans.
Comment expliquer ce retournement de situation ? Le discours américain contribue largement à ce résultat. Il utilise les mêmes termes de démonstration mais n’a pas d’écho dans les médias occidentaux qui relaient le discours taliban (lutte contre les occupants, scepticisme sur l’avenir du régime, négociations secrètes avec l’ennemi). L’afghanisation de la guerre (formation d’une armée nationale afghane et d’une police) semble aussi mal partie que la vietnamisation de la guerre du Vietnam. Sans soutien aérien et sans les moyens de renseignement électronique des États-Unis, les forces armées afghanes ont peu de chance de préserver la sécurité du régime mis en place après la défaite des talibans en 2001.
Notons enfin que la phraséologie de l’Otan comporte des aberrations linguistiques : pour qualifier l’ennemi, l’Otan utilise le terme insurgé qui laisse entendre que l’adversaire s’insurge éventuellement contre une injustice. Par ce choix, elle offre aux talibans un début de légitimité qu’ils avaient perdu lors de leur période à la tête de l’Afghanistan.
Les alliés de l’Otan engagés en Afghanistan sont comme les États-Unis au Vietnam, ils partent avec handicap majeur de forces d’occupation en perte croissante de légitimité visible. Le régime Thieu sud-vietnamien était une fausse démocratie corrompue. Le régime Karzai est aussi un ersatz de démocratie corrompue qui a réussi l’exploit de redonner une image d’ « insurgés » à la cause taliban alors que ces mêmes talibans ont commis des crimes contre l’humanité, sont toujours une force rétrograde, hypocrite et impliquée dans le trafic de drogue pour financer leur lutte.