La guerre informationnelle sur la Libye

Depuis le soulèvement en Tunisie en Décembre 2010, qualifié de révolution du Jasmin, ce parfum ne cesse de se propager dans le monde arabe. Après l’Egypte en Afrique du Nord, c’est au tour de la Libye dirigé par le colonel Kadhafi de faire son entrée dans ce mouvement de révolte par un effet de domino. Les protestations ont notamment débuté dans l’Est du pays notamment dans la ville de Benghazi suivi de la démission de nombreux militaires et hommes politiques qui ont rejoint le clan des insurgés. Devenu un conflit armé que l’on pourrait qualifier de guerre civile, vu le nombre de victimes établit à environ 6000 personnes selon le site du journal libération, cette opposition au régime fait face à une forte répression de la part des forces gouvernementales.

Dans cette guerre civile, la guerre de l’information proprement dite joue un rôle différent que dans les cas tunisiens (rôle central) ou égyptien (rôle périphérique). En effet, les Etats-Unis sont très présents pour garantir leurs intérêts sur le front du pétrole et le réalisme est de mise en toile de fond des discours officiels car Washington doit prendre en compte l’incapacité militaire des insurgés à battre les troupes de Kadhafi. Il faut donc regarder avec beaucoup d’attention le contenu des messages émis par le clan Kadhafi et essayer de décrypter qui peut souffler certains changements de ligne…

Le clan Kadhafi justifie notamment les différentes attaques du camp adverse et les répressions sanglantes par le fait que les protestataires sont des membres d’Al Qaeda, auparavant qualifiés de jeunes drogués au début de la révolte. Pour Kadhafi, il ne fait qu’appliquer la volonté du peuple qui possède le pouvoir alors que l’information diffusée par les médias internationaux et les différents blogs dénoncent une réalité différente. Ainsi, le Jeudi 3 Mars, les forces gouvernementales attaquent la base pétrolière de Brega alors que les médias annoncent des dizaines de morts, pour le gouvernement, la riposte n’avait pour seul objectif que d’effrayer les opposants, a déclaré le fils de Kadhafi sur la télévision Skynews. Dans le contexte actuel de la mondialisation, il s’avère difficile pour un dirigeant d’avoir un contrôle total sur la circulation de l’information, c’est le cas de souligner l’exemple de l’Egypte où Google et Twitter ont mis en place un système où il était possible de publier sur le net par callback après la coupure d’Internet par le gouvernement. Les différents justifications du gouvernement vont dans le sens de prouver la légitimité de ses ripostes au niveau international en se plaçant en victime du terrorisme mondial avec Al Qaeda mais c’est sans compter sur le fait que les insurgés disposent aussi aujourd’hui de moyens de communication qui lui permettent de diffuser les informations en envoyant des vidéos amateurs aux médias internationaux, en utilisant des blogs pour faire prévaloir leur vérité. La lutte pour la maîtrise des pôles stratégiques pétroliers est de mise entre le gouvernement et la rébellion, chacun voulant faire prévaloir sa domination par des annonces aux médias.

Kadhafi arrivera t’il à faire plier la rébellion, les différentes études sur l’économie de la guerre ont mis en évidence le fait que la présence de ressources pétrolières augmentait le risque d’éclatement des conflits, cependant elles en diminuent la durée. Cela, du fait qu’il est couteux pour les sociétés pétrolières d’arrêter leurs activités du fait des infrastructures d’exploitation et de transport qui sont mis en place dans une optique de très long terme. Aussi, elles vont parfois jusqu’à fournir une aide logistique et militaire pour faire cesser la révolte. Dans le cas de la Libye, il reste à savoir si cette théorie s’appliquera. Cela dépendra notamment de l’analyse des enjeux par les différentes puissances. Car aujourd’hui les différentes crises profitent plutôt à la Chine qui se positionne comme le banquier du monde quand les entreprises occidentales rechignent à cause du risque pays important. L’anarchie qui pourrait suivre le départ de Kadhafi pourrait ainsi profiter à la Chine.

Aïssata Coulibaly

Sources :
Barbara Leblanc, Crise en Libye : la production de pétrole en chute libre, http://www.usinenouvelle.com/article/crise-en-libye-la-production-de-petrole-en-chute-libre.N147662, dernière consultation le 04 Mars 2011

Le monde, La Libye plonge dans la guerre civile (l’essentiel), http://www.liberation.fr/monde/01012323590-kadhafi-poursuit-les-frappes-aerienne-a-brega-washington-examine-toutes-ses-options, dernière consultation le 04 Mars 2011

Myriam Berber, Pétrole et gaz : la Libye a coupé le robinet vers l’Europe, publié le 23 Février 2011, http://www.rfi.fr/afrique/20110223-hydrocarbures-libye-coupe-le-robinet-vers-europe-petrole-gaz, dernière consultation le 04 Mars 2011

Philippe Berry, Egypte: Google et Twitter offrent une solution aux Egyptiens privés d’Internet, publié le 01 Février 2011, http://www.20minutes.fr/article/662136/high-tech-egypte-google-twitter-offrent-solution-egyptiens-prives-internet#commentaires, dernière consultation le 04 Mars 2011

RIA Novosti, La Libye n'a pas peur d'une intervention militaire (Saif Al-islam Kadhafi), publié le 01 Mars 2011, http://fr.rian.ru/world/20110301/188748068.html, dernière consultation le 04 Mars 2011

Wikipedia, Libye, http://fr.wikipedia.org/wiki/Libye#Mouvement_de_r.C3.A9volte_de_2011, dernière consultation le 04 Mars 2011

Wikipedia, Protestations en Afrique du Nord et au Moyen-Orient de 2010-2011, http://fr.wikipedia.org/wiki/Protestations_dans_les_pays_arabes_de_2010-2011, dernière consultation le 04 Mars 2011