La problématique du pillage des terroirs doit s’envisager de manière globale et s’inscrire dans des logiques de conflits d’intérêts entre grandes puissances. De nouveaux facteurs d’affrontement au niveau agroalimentaire sont nés comme le durcissement de la compétition entre produits alimentaires, les délocalisations de productions, les tentatives de standardisation des modes de vie et des goûts, qui font qu’au-delà de la protection de la propriété intellectuelle, les pays cherchent à présent à protéger leurs productions locales, leurs marchés, et adopter des stratégies offensives de conquête à l’international.
Des courants de pensée nouveaux ont émergé comme « l’éducation au goût », « l’économie solidaire », « solidarité versus capitalisme » et ne peuvent que soutenir les Etats dans la protection de leurs terroirs. Malheureusement, tous ces courants ne peuvent fonctionner qu’en modèle fermé. Comment un état peut il alors positionner le curseur de la «fermeture ou de l’ouverture au monde » permettant de laisser les producteurs conquérir l’international tout en protégeant l’économie locale ?
L’Europe a choisi de se doter des AOP (Appellation d’Origine Protégée) et des IGP (Indication Géographique Protégée), appellations qui confèrent des droits de protection aux produits labellisés qui sont en théorie reconnus dans 150 pays, conformément à un accord sur les aspects de droit de propriété intellectuelle conclu dans le cadre de l’OMC. En France, c’est l'INAO qui est chargé de la mise en oeuvre de la politique française relative aux produits sous appellation. Etablissement public administratif sous tutelle de Ministère de l’agriculture et de la pêche dont l’organisation est structurée et institutionnelle, son intervention juridique et son efficacité ne peuvent qu’être limitées sur un échiquier économique mondial incluant à présent un nombre beaucoup plus élevé de pays montants comme la Chine.
Ce sont donc tous les acteurs de la filière des produits du terroir (petits producteurs, industriels, élus locaux et représentants nationaux) qui doivent aujourd’hui se mobiliser, pour mettre en avant, tout en les protégeant, les qualités des produits du terroir et leur rôle primordial dans le développement économique, social, culturel et environnemental.
Ces actions peuvent prendre diverses formes :
- Des négociations internationales menées dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce ou d’accord bilatéraux,
- Des Actions d’influences des ONG,
- Une refonte de la communication et du marketing autour des produits visant à influencer les modes de consommation dans l’intérêt des produits « vrais » issus de tradition,
- Des expatriations et délocalisations qui permettent de mieux s’implanter à l’international tout en protégeant les savoir-faire,
- Des actions collectives pour aller à la conquête de nouveaux marchés en dehors des zones traditionnelles d’échange,
- Autre forme enfin : le protectionnisme. Cela ne peut se faire sans une volonté des Etats d’ avoir une vision à long terme et de définir des priorités d’action qui permettront d’arbitrer les rapports de force entre les producteurs et les industriels, les industriels entre eux et les pays faisant partie d’une même union.
Reste à savoir quels seront les Etats capables de s’engager dans cette démarche et d’y réussir.
Le pillage des terroirs : ses différentes formes, pistes de réflexion pour les enrayer