Madagascar : un réservoir de biodiversité, un point stratégique pour les géants de la cosmétique
Sur l’île rouge, plusieurs espèces de plantes n’ont pas encore été répertoriées et leurs vertus ne sont pas tous connues. Le laxisme juridique du pays et le manque de moyens des autorités locales ont fait de Madagascar, un point stratégique pour les grands laboratoires.
Un marché porteur
Depuis quelques années, le marché de la cosmétique ne cesse de s’accroitre. Si on prend l’exemple de la France, c’est le 4ème secteur exportateur après l’aéronautique, l’automobile et les boissons (source : FEBEA, Fédération des entreprises de la beauté). Motivées par cet accroissement de la demande, les grands groupes internationaux investissent de plus en plus dans la recherche de nouveaux composants pouvant révolutionner le monde de la cosmétique.
Madagascar : l’île aux trésors
P. Commerson, naturaliste français du 18ème siècle, avait dit sur Madagascar : « C’est là que la nature semble s’être retirée dans un sanctuaire particulier pour y travailler sur d’autres modèles que ceux auxquels elle s’est asservie ailleurs. Les formes les plus insolites et les plus merveilleuses s’y rencontrent à chaque pas. » En effet, la flore malgache est très diversifiée, on dénombre plus de 12 000 espèces dont 80% est endémique (source : ministère du l’environnement et du tourisme malgache). Faute de moyens des locaux, les vertus de toutes les plantes ne sont pas connues. Seuls les guérisseurs traditionnels fondant leur médecine sur l’utilisation de plantes médicinales, connaissent la vertu de certaines espèces. L’île rouge représente un point stratégique pour les grands groupes en quête de nouveaux composants. On peut prendre l’exemple de l’entreprise française Yves Rocher qui a pu y découvrir l’Aphloîa aux propriétés protectrices ou de l’utilisation du gingembre bleue dans Beauté Initial Eye de Chanel. Notons que ce dernier finance un centre de recherche situé en pleine forêt malgache. Ils emploient et forment des « guérisseurs » locaux pour effectuer les recherches en forêt et en laboratoire.
Des pratiques déloyales
Faute de moyens, le gouvernement malgache accorde aux firmes étrangères le droit d’effectuer les recherches sur les espèces inconnues. Chaque nouveau composant trouvé est directement breveté par le laboratoire étranger et par conséquent, leur appartient. Aussi, on assiste à l’apparition de nouvelles pratiques visant à découvrir le secret des guérisseurs traditionnels. Ces « pirates biologiques » sont chargés d’intégrer les populations rurales afin d’observer leurs méthodes de traitements par les plantes médicinales et de « voler » leur savoir pour ensuite le breveter. De plus, de grands laboratoires allaient acquérir de grandes parcelles de terrain à Madagascar grâce à des accords secrets avec certains anciens notables locaux. Mais les troubles politiques de 2009 ont entravé ces projets. Notons que légalement, cette transaction n’est pas possible. Ces différents cas démontrent jusqu’à quel point les spécialistes de la beauté sont prêts à aller pour révolutionner le monde de la cosmétique.
Un enjeu important
Aujourd’hui la France est le leader mondial du secteur de la cosmétique mais elle n’est que la 4ème plus forte demande de produits cosmétiques derrière les Etats-Unis, le Japon et le Brésil qui risque de progresser ces prochaines années. Sachant que ce marché connait une croissance moyenne de 5% par an, on pourrait imaginer l’opportunité, l’enjeu stratégique que représente Madagascar pour les géants de la cosmétique tels que l’Oréal, Procter& Gamble, Unilever ou la firme japonaise Shiseido.
HPR