L’Europe s’est ouverte trop vite
L’ouverture des anciens pays de l’Est a suscité une nouvelle dimension des rapports de force économiques à cause de leur passage à l’économie de marché. La modification du cadre juridique de ces nouveaux Etats a été exploitée dans un premier temps par des prédateurs de tout type pour s’emparer de certains leviers économiques et prendre la direction occulte des entreprises créées après l’effondrement du système socialiste :
- Entreprises occidentales.
- Groupes mafieux.
- Potentats locaux issus du système communiste.
L’un des premiers cas d’école identifiés par un poste d’expansion économique s’est déroulé en Pologne au début des années 1990. L’informatisation du Ministère des Finances donna lieu à une série d’incidents orchestrés par un concurrent agressif pour déstabiliser la société Bull en charge de la réalisation de ce contrat (détérioration de véhicules d’employés, actes d’intimidation sur des proches, campagne de rumeurs dans les médias). En 1998, le journal Le Monde fait état de la déstabilisation de la société Belvédère par une mise en ligne de sites Internet hostiles en Pologne et en France à l’initiative d’un concurrent américain. L’affaire Belvédère a permis de mieux cerner la combinaison de techniques d’attaques contre une PME (effet de saturation par le déclenchement de procès sur l’utilisation d’une marque dans un pays, encerclement par le dépôt de brevets dans des pays où la marque Belvédère n’était pas déposée, attaques informationnelles par le biais de sites Internet, lobbying dans le pays producteur de vodka, enlisement dans les procédures juridiques).
Les pratiques de déstabilisation par l’information ont fait école dans cette région du monde. A Au cours de l’été 2007, la filiale roumaine du Groupe Danone a subi une attaque informationnelle de la part des médias roumains à cause de plusieurs lots de yaourts aux fruits susceptibles de contenir de la dioxine. La chaîne de télévision la plus populaire de Roumanie, Realitatea TV diffusait toute la journée des débats sur le sujet sans présenter aucune preuve. Les quotidiens locaux ont repris l’information en insistant sur les risques mortels encourus par les populations en cas de consommation de tels yaourts. Danone a aussi été attaquée sur le fait qu’elle distribuait dans les écoles roumaines un yaourt à chaque élève. Le journal « Ziua » n’a pas hésité à titrer « Danone tue nos enfants ».
Pour contrer cette campagne de dénigrement et rassurer ses distributeurs et ses clients, la filiale roumaine de Danone a fait effectuer des analyses par un laboratoire spécialisé hongrois de Budapest. Elle a ensuite procédé à une communication publique des résultats qui démontraient que la firme française ne vendait pas de produits dangereux. Danone est l'une des marques de produits laitiers les plus populaires de Roumanie. Cette attaque n’a pas été sans conséquences puisqu’elle a entraîné une baisse des ventes de 20% et a affecté l’image du groupe dans le pays.
Les failles des nouvelles économies de marché
Les nouvelles économies de marché apparues après la chute du Mur de Berlin ont beaucoup de difficultés à pacifier les relations économiques entre les nouveaux acteurs du marché. La Russie a été le cadre d’affrontements de différentes natures entre les nouveaux oligarques et le Vladimir Poutine. Les anciennes démocraties populaires comme La Bulgarie, la Hongrie ou la Roumanie sont très exposées aux jeux de pouvoir des anciens apparatchiks et aux phénomènes de corruption. Les sentiments nationalistes sont parfois attisés par des autorités locales pour contrer des intérêts économiques étrangers installés sur leur sol. En 2010, la municipalité de Pecs en Hongrie a exproprié une filiale du groupe Suez Environnement en recourant à des méthodes très offensives (envoi d’une équipe de nervis pour prendre possession des bureaux, voiture de la consule honoraire de France couverte de graffiti, éviction brutale des investisseurs étrangers des deux radios privées les plus rentables du pays).
Un certain nombre d’économies d’Europe de l’Est présentent des vulnérabilités juridiques qu’elles ont du mal à combler. C’est le cas de l’Ukraine qui a les plus grandes difficultés à faire appliquer la loi auprès de ses concitoyens. Le président de la République doit recourir à l’envoi des forces spéciales afin de faire expulser des hauts fonctionnaires qui ont été révoqués et qui ne veulent pas quitter leur lie de travail. La pratique des raids sur des entreprises acquises par des occidentaux oblige les investisseurs étrangers à « militariser » la protection des sites pour ne pas être expropriés sauvagement par des forces criminelles.
Ces pratiques illégales sont d’autant plus difficiles à contrer que les cultures locales de l’information sont profondément marquées par l’héritage communiste. Les chefs d’entreprise hésitent encore à utiliser l’informatique et le téléphone portable pour communiquer de l’information d’affaires. La peur d’être surveillé enferme beaucoup de décideurs dans une vision conflictuelle de l’économie de marché. Cette notion d’économie dangereuse s’applique à d’autres continents. Certains pays d’Amérique latine, d’Asie et d’Afrique sont des zones de non droit marquées par les agissements d’économie criminelle et par des actes systématiques de distorsion de concurrence.
L’implantation sauvage des communautés du voyage d’origine room est un élément d’inquiétude supplémentaire sur les risques de déviance de toute nature qui caractérisent une partie de cette population. Les inquiétudes de certains médias français, des partis de gauche et des associations qui défendent ces communautés ne gomment pas la réalité des faits. L’implantation sauvage des camps, les pratiques criminelles d’un certain nombre des membres de cette communauté et les actes de révolte contre l’autorité de l’Etat lors des derniers évènements de Saint Aignan (l’attaque de la gendarmerie, l’incendie de bâtiments publiques, les agressions sauvages contre des petits commerces locaux) sont autant d’éléments d’alerte qui ne doivent pas être sous-estimés et passés à la traditionnelle moulinette politicienne de la gauche ou des rentes de situation des associations autoproclamées humanistes pures et dures.
Les dérapages des économies criminelles marginales en France
Les évènements de Grenoble sont aussi un cas exemplaire d’ancrage d’économie dangereuse à vocation criminelle. Les menaces de mort proférées contre des membres de la Brigade anti criminalité locale (BAC), les mutations de membres de cette BAC et l’exfiltration de certains membres du personnel sont des actes de bon sens mais traduisent une reculade en termes de rapport de force. Qui aurait imaginé une telle reculade dans les années 70 si des gauchistes avaient ouvert le feu sur des membres des forces de l’ordre. Quoiqu’on pense du bilan de Sarkozy, les mesures qui sont prises ne ce moment sont inévitables et doivent êtres appliquées, aussi bien dans la suppression de la nationalité des individus qui s’en prennent aux forces de l’ordre, qu’à la guerre du fisc contre les trafiquants de drogue que dans la suppression temporaire des allocations familiales pour les parents qui n’ont pas le courage de donner une éducation à leurs enfants.
Mais il y a un mais…
Un Etat est légitime si le pouvoir politique qui l’incarne est sans failles. L’affaire Clearstream qui a Sali gravement l’image de la France a abouti à un cul de sac. Le principal incriminé est sorti indemne de cette affaire et s’en targue. L’affaire Bettencourt est un autre cas d’école des relations suicidaires en termes de symbole de la démocratie entre le monde économique et le monde politique ; Ces points faibles servent d’arguments récurrents aux forces politiciennes et aux médias qui fonctionnent sur la matrice gagnante de « je suis partout ». Si on ne nettoie pas les écuries d’Augias, la France va rentrer dans une logique suicidaire. Une alternance politique ne réglera rien. Rappelons-nous le bilan catastrophique de Vaillant, Ministre de l’Intérieur du gouvernement Jospin, adepte de l’inertie et du « circulez, il n’y a rien à voir ». Mais si le gouvernement actuel s’enferme lui-même dans sa propre inertie de langage, nous allons à la catastrophe.
L’équipe d’Infoguerre