L’ambivalence de la Suisse sur les comptes bancaires numérotés

La Suisse voit renaître depuis quelques semaines un attrait grandissant pour l’un de ses produits bancaires phares : le compte numéroté. En effet, suite aux dispositions prises par l’Union Européenne pour « lutter » contre l’évasion fiscale (En France, des copies des données volées par Hervé Falciani, un ancien employé de la banque HSBC à Genève, avaient permis au fisc français d'alimenter une liste de quelques 3 000 fraudeurs présumés), les clients étrangers des banques suisses ont retrouvé une appétence nouvelle à recourir au fameux compte à numéro, synonyme d’anonymat.
Si l'Association des banquiers privés suisses ou l'Association suisse des banquiers se défendent en avançant que pour ouvrir un tel compte « il est nécessaire de présenter les mêmes preuves d’identification que pour un compte bancaire normal », il n’en va pas de même pour d’autres personnes ou organisations qui n’hésitent pas à attaquer la confédération Helvétique sur les dérives possibles que l’existence de ses comptes peut engendrer.
En effet, le député suisse spécialiste des banques Jean Ziegler n’hésita pas à dénoncer qu’à Genève d’immenses fortunes de nature discutable prospéraient sur des comptes numérotés. C’est le cas par exemple de celles alimentées par la diaspora algérienne en France durant toute la guerre d’Algérie. Ces fortunes permettaient d’acheter des armes, de financer l’infrastructure sociale, politique et diplomatique du FLN  mais ces structures d’accueil complexes de capitaux clandestins en place servent maintenant, notamment depuis le coup d’Etat de janvier 1992, les intérêts de généraux et de directeurs de sociétés d’Etat de la pétrochimie algériens corrompus.
Si on prend en compte les attaques menées par les Etats-Unis contre la banque UBS qui s’est engagée le 19 août 2009 à livrer 4 450 comptes de clients à leur fisc, on peut admettre que la Suisse ne dispose pas d’un instrument efficace à 100%. Cependant, la coopération de cette dernière ne se fera que dans l'hypothèse de soupçons avérés de fraude fiscale de contribuables étrangers qui utiliseraient la Suisse comme terre d'accueil, ce qui laisse à la Suisse, au final, une marge de manœuvre ambigüe et colossale.

Sources :

-    « Les comptes numérotés suisses de plus en plus populaires » du 12 février 2010,
-    « Les Nababs du Lac Léman » du 06 juin 2008,
-    « UBS va livrer le nom de 4.450 détenteurs de comptes au fisc américain » du 19 août 2009,
-    « Paris a signé avec Berne un accord de double imposition » du 28 août 2009.