Rostekhnologii : guerre informationnelle et enjeu de pouvoir au sein du Kremlin

Rostekhnologii, holding créé en 2007 sous décret du président de la Fédération de Russie regroupe les sociétés russes des secteurs de l’automobile, de l’armement et des hautes technologies. Le but de ce holding est de permettre aux entreprises russes de combler leur retard dans le domaine technologique. Néanmoins, le dessous des cartes fait apparaitre deux contradictions majeures : premièrement, le nombre d’innovations proposées par ce holding reste faible. Deuxièmement, Rostekhnologii a été créé dans le but de renforcer le contrôle du Kremlin sur des secteurs industriels jugés stratégique par le gouvernement russe, mais aussi de satisfaire la soif de pouvoir d’un homme : Serguei Tchemezov.
Monsieur Tchemezov, actuel Président du Conseil d’Administration de Rostekhnologii, est un ancien membre du KGB, proche du premier ministre Vladimir Poutine qu’il a d’ailleurs très bien connu en République Démocratique Allemande (RDA). Monsieur Tchemezov fait partie du clan des « Siloviki » (les hommes de force) sur lequel s’était appuyé Vladimir Poutine du temps de sa présidence. L’actuel président de la Fédération de Russie, Dimitri Medvedev avait violemment sermonné Monsieur Tchemezov en l’accusant d’être responsable du faible nombre d’innovations technologiques réalisées par Rostekhnologii. Il avait également critiqué ces holdings d’Etat mal gérées, inefficaces et surtout inadaptées au contexte de mondialisation.
Cette intervention du président russe entre pleinement dans le contexte de la guerre informationnelle, et ce à deux niveaux. Premièrement, à l’échelle de la Fédération de Russie. Elle montre une certaine opposition entre les clans, Siloviki d’un côté, libéraux (dont fait partie Dimitri Medvedev) de l’autre. Les prochaines élections russes étant en 2012, il y a fort à parier que même si Monsieur Medvedev ne s’opposera pas à Vladimir Poutine, il fera tout ce qui est en son pouvoir pour maintenir et renforcer sa position et celle de son clan sur l’échiquier politique russe. Deuxièmement, au niveau international, la nouvelle avait été reçue avec surprise et circonspection par les médias occidentaux. Néanmoins, n’est ce pas une manœuvre visant à faire croire aux démocraties occidentales, que la Russie s’apprête à abandonner la rhétorique nationaliste à laquelle Vladimir Poutine nous avait habituée. Il est vrai qu’après la vacance du pouvoir caractéristique de la période Eltsine, la Fédération de Russie avait besoin d’un président capable de briser les oligarques, mettre un terme au trouble agitant la Transcaucasie et redonner sa puissance à l’Etat. Aujourd’hui, il semblerait que ce pays est besoin d’un économiste capable de remettre sur pied l’industrie russe. Dans le secret du palais, il se pourrait bien que ce ne soit qu’une simple pièce de théâtre, dont les comédiens jouent leur rôle à la perfection comme cela a souvent été le cas en Russie.