Le premier groupe agroalimentaire mondial a récemment subi une guerre de l’information qu’une mémoire opérationnelle sur la question lui aurait permis d’éviter. Après les scandales des années 70, c’est un organisme sud-africain, Afriforum, qui a initié un nouveau boycott des produits du géant Suisse, en qualifiant le lait des fermes associées à la famille du président zimbabwéen de «lait du sang». Afriforum, qui lutte contre la dictature de Mugabe a ainsi révélé que Nestlé s’approvisionnait en matière première auprès de fermes appartenant à la femme de Robert Mugabe, Grace. Ces fermes fournissaient jusqu'ici 20,000 litres de lait par semaine à Nestlé, soit 10 à 15% des besoins des usines zimbabwéennes de Nestlé. Le Zimbabwe connait aujourd’hui une crise sans précédent et le régime essuie les condamnations internationales à répétition. Dans un rapport publié en août dernier, l'organisme Human Rights Watch recommandait ainsi de « Retarder l’aide au développement pour le Zimbabwe en l’absence de progrès clairs dans la mise en œuvre de réformes clés en matière de droits humains et de Maintenir les sanctions ciblées portant sur des interdictions de voyager et des gels d’avoirs contre la ZANU-PF et ses dirigeants jusqu’à ce que la ZANU-PF respecte des critères spécifiques en matière de droits humains et de bonne gouvernance et jusqu’à ce qu’il devienne clair que de tels changements sont irréversibles ». Grace Mugabe figure sur la liste des personnes visées par les sanctions de l'Union européenne et des Etats-Unis. Celles-ci interdisent toute transaction financière. La Suisse, où est situé le siège social de Nestlé, les applique également. Mais, selon les dirigeants de la firme soutenus par les autorités helvétiques, les sanctions ne s'appliquent pas aux filiales à l'étranger. Cette précision n'a pas calmé les esprits. L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch a même réclamé une enquête internationale. L’annonce du groupe ; le 1er octobre, face à la pression des activistes, de mettre un terme à son approvisionnement auprès des huit exploitations, dont celle de Grace Mugabe. a provoqué une hystérie médiatique internationale en Afrique du Sud, au Royaume Uni et aux Etats-Unis, qui font campagne récurrente pour le boycott des produits Nestlé. Présent au Zimbabwe depuis près de 50 ans, le groupe helvétique emploie environ 200 personnes et produit de la poudre de lait et des céréales principalement pour le marché local. Il est pour le moins étonnant, qu’un groupe aussi puissant et historiquement implanté sur un marché aussi complexe que le Zimbabwe n’ait pas cherché à combler cette faille plus tôt. C’est d’autant plus étonnant que Nestlé a déjà payé très cher ses erreurs commises dans les années 70 avec le lait en poudre distribué en Afrique. Le scandale sur la mort de nouveaux nés africains, causée par le mélange de lait en poudre et d’eau impropre à la consommation, avait fortement affecté pendant plusieurs années l’image de Nestlé.