L’éthylotest au cœur d’une controverse informationnelle

Le 14 juillet 2002 marque un véritable tournant  pour la sécurité routière : l’intervention du président de la république afin de l’inclure comme l’un de ses trois chantiers majeurs. Il est alors mis en place un programme d’actions  permettant une véritable rupture dans la lutte contre les accidents mortels.
Pour lutter contre la vitesse, la mise en place de radars automatiques. Pour lutter contre le non port de la ceinture, l’aggravation des sanctions. Enfin pour lutter contre le fléau de l’alcool, le renforcement des contrôles routiers. Selon les chiffres de la Sécurité Routière, 34% des accidents mortels sont dus à l’alcool et devient donc la première cause à éliminer. Pour cela, de nombreux contrôles sont effectués, plusieurs campagnes publicitaires sont diffusées et élargissement de la diffusion et de la vente d’éthylotests.
Le but est que le conducteur buvant de l’alcool souffle dans un éthylotest de son plein gré avant de conduire, afin de connaitre son taux d’alcoolémie et de prendre la décision ou non de conduire. Bien sûr, les forces de l’ordre contrôlent régulièrement ainsi que lors d’accidents corporelles et les chiffrent peuvent en attester : 1157 personnes sont décédées en 2002 contre 878 en 2008.
Jusque là, l’initiative est louable et efficace. Cela dit, lorsque le collectif 60 millions de consommateurs (magazine de l’Institut National de la Consommation) publie pour la troisième fois en cinq ans que sept des neuf éthylotests testés ne sont pas fiables et sont pourtant certifiés NF, que la répression des fraudes a été saisie à plusieurs reprises et qu’aucune mesure n’a été prise par l’Etat, la polémique peut avoir lieu : à quoi joue l’Etat français ? Les résultats affichés par les éthylotests ne sont fiables et diffèrent en fonction de la température ambiante. Outre l’aspect pécuniaire lors d’un contrôle positif malgré l’éthylotest négatif, les conséquences peuvent devenir dramatiques en cas d’accident mortel. Prenons l’exemple d’un automobiliste qui boit deux verres de vin, souffle dans un éthylotest, apparaît comme négatif, prend le volant puis renverse mortellement un piéton. La responsabilité du conducteur devient engagée et sanctionnée malgré le non fonctionnement de l’éthylotest qui, s’il avait été fiable, l’aurait dissuadé de prendre le volant.
Si les éthylotests vendus sur le marché sont défectueux, pourquoi ne pas penser que ceux utilisés par les forces de l’ordre ne le sont pas aussi ? Avant d’effectuer une prise de sang, il faut d’abord souffler dans un premier ballon qui, s’il apparait positif, enclenche une vérification. Ainsi, bon nombre de conducteurs sont apparus négatifs alors qu’ils ne l’étaient pas et représentent des dangers potentiels pour les autres usagers. Un comble lorsque l’on sait que l’Etat a choisi la lutte contre l’alcoolémie au volant comme principal fer de lance de sa politique de sécurité routière.
Suite à la parution de cette étude (datée du 28 décembre), pas moins de sept sites internet à forte caisse de résonance (l’express, auto-moto ou encore e-sante…) relaient cette information sur la toile en moins d’une semaine, d’autres médias sont utilisés comme les journaux ainsi que des reportages vidéos diffusés pendant les heures à forte affluence. Il est clair qu’en plus des industriels, ce sont bien les institutions françaises qui sont visées. A ce jour, le pouvoir français n’a toujours pas manifesté signe de vie.
A-travers ces attaques informationnelles légitimes, il est espéré que l’Etat réagisse en retirant les éthylotests défectueux, en sanctionnant les fabricants et qu’il devienne enfin en phase avec ses priorités ambitieuses si fièrement annoncée depuis plusieurs années.

Jérôme Spiel