pays scandinaves.
d’aucune usine de traitement. D’après certains analystes, les signes tous récents sont une marque supplémentaire du décalage entre la stratégie d’accroissement puissance de la Russie et ce qu’elle réalise dans les faits.
exportations de bois. Le problème de la Russie réside dans le fait qu’elle n’a en réalité pas de marché captif ni de rente de situation. Comme le fait remarquer un bureau d’experts russes du secteur forestier, les importateurs traditionnels que sont la Chine, la Finlande et le Japon (qui représentent à eux trois 80% des exportations russes), se sont tournés vers d’autres fournisseurs à cause des turpitudes russes sur le sujet.
Le bilan de la guerre du bois en mer Baltique et de ses enjeux de puissance peut donc sembler paradoxal ou plutôt, il est révélateur du fait que les facteurs de la puissance dépendent réellement de l’approche de ses ressources. Nous pourrions nous attendre à ce que la Russie, qui dispose de forêts immenses à exploiter, puisse se servir de sa ressource naturelle comme arme économique vis-à-vis des pays scandinaves et par extension de l’UE. Or le caractère défaillant de son industrie, accentué par les luttes internes entre oligarques du bois ainsi qu’une incapacité chronique à contrôler le trafic illégal du bois, empêche la Russie d’avoir un vrai potentiel de négociation, de pression. La Russie est dépendante de ces voisins : en 1997, 40% de ses exportations ont transité par des ports régionaux. A défaut, elle fait montre d’un pouvoir de nuisance. Mais nuire, ce n’est pas être puissant. Les suédois et les finlandais l’ont bien compris dans leurs manœuvres de manipulation de l’UE : mieux vaut installer insidieusement ses positions à travers une stratégie de communication habile que d’effrayer ses partenaires potentiels. Le secteur forestier est un enjeu stratégique pour la Russie, mais reste un atout largement inexploité. La Finlande et la Suède, pour leur industrie papetière ou encore pour des multinationales comme Ikéa, dépendent fortement des importations de bois. Elles ne peuvent donc pas adopter une stricte posture d’accroissement de puissance mais elles peuvent aisément, grâce à l’intégration verticale et la haute compétitivité de leurs entreprises publiques ou privées à investisseurs institutionnelles, jouer la carte de la préservation de leur puissance.
L’actualité donne une profondeur supplémentaire à ces considérations stratégiques : le problème du transport des produits de la filière bois a été mis en lumière par l’épisode du cargo Artic Sea (cf. Lepoint.fr, Huit suspects arrêtés dans l’affaire de l’Artic Sea, 18 août 2009). Il est acquis que la cargaison ne comportait pas que du bois et nous ne devons pas nous étonner que la marine de guerre russe soit partie à la poursuite de ce bateau. L’affaire met en valeur le rôle de la Baltique comme plaque tournante et montre l’importance du bois dans les exportations finlandaises. Un autre fait d’actualité est la présidence suédoise de l’UE et les discussions qui ont eu lieu à Stockholm sur l’avenir de la Baltique les 5 et 6 octobre. La région baltique est agitée par de multiples débats au sein desquels la filière bois représente un enjeu-clé. Il faut donc surveiller les prochains mouvements de la Russie dans ce domaine et guetter les opportunités stratégiques avant que la crise ne soit finie et que la Russie puisse reprendre son accroissement de puissance.
Matthieu Abgrall
Bibliographie
J. Lamberg, The Evolution of Competitive Strategies in Global Forestry Industries, Springer, Helsinki, 2007.
N. Blanc-Noël, La Baltique une nouvelle région en Europe ?, Paris, 2002.
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