Nouveau rapport du NIC : Action d’influence des Etats-Unis ?

NIC: « Global trend 2025 : A transformed world »

National Intelligence Council (NIC), qui rassemble un grand nombre d’experts mondiaux (principalement anglo-saxons) en matière de renseignement économique et stratégique, tente d’analyser dans quel état sera le monde dans 17 ans. Quelle gageure lorsqu’on connaît les difficultés à prévoir les trois prochaines années !

Sun Tse dans son Art de la guerre note : « Qu’une connaissance anticipée ne peut être obtenue par l’intermédiaire des fantômes et des esprits, ni être déduite des évènements, ni être le fruit de calculs. Elle ne peut être obtenue que de ceux qui savent ». (1) Le « savoir » est une arme qui a toujours été très bien utilisée par les anglo-saxons. Alors pourquoi éditer une somme de connaissances telles que ce rapport, sans avoir en tête autre chose qu’une simple envie de partager des informations stratégiques ?

Qu’est ce que le NIC ?

Booz Allen Hamilton et auparavant Directeur de la National Security Agency (NSA).

« Le futur n’est plus ce qu’il était » (4)

Tout ce que décrit le rapport, mis à part quelques détails, n’a pas échappé aux analystes du monde entier. La critique ne porte donc pas sur le fond qui est éminemment pertinent, mais sur la forme et surtout ses objectifs. Le rapport analyse et présente ce qui se veut une vision du futur (prévisions pour 2025). Son seul défaut, et il est majeur, est qu’il dépeint le monde actuel, car l’humain ne peut faire autrement que de projeter dans le futur ce qui se déroule dans le présent.

Alexandre Adler note dans son Rapport de la CIA, comment sera le monde en 2020 que le NIC est un organisme consultatif composé pour l’essentiel de « diplomates, d’officiers du renseignement issus de la CIA […] et de militaires, qui a pour but de faciliter les synthèses et de promouvoir les recherches fondamentales en matière de renseignement ». Il spécifie aussi que ces analystes ont pour but d’alimenter les prospectives de la CIA ainsi que celle du sommet de l’exécutif tel que la Présidence.

Évidemment, on nous prévient dès l’introduction : ceci est un rapport sur des tendances très générales, où l’on essaye de découvrir les facteurs dessinant les contours d’évènements et en aucun cas de prédire l’avenir. Mais à quoi sert-il alors ?

La majorité des groupes de réflexions ayant aidé à la rédaction de ce rapport sont des think tanks américains dont certains sont des groupes connus (5) pour leurs objectifs clairement affichés : la promotion et la définition de la place des Etats-Unis dans le monde.

Nassim N. Taleb illustre ces propos à la perfection, « ce qui importe ce n’est pas le nombre de fois où vous avez raison, mais l’ampleur de vos erreurs cumulées ». (7)

action d’influence. Si l’on regarde de plus près une définition de l’influence communément admise - amener efficacement les autres à se ranger à son avis ou à agir dans un sens souhaité -ce rapport s’inscrit dans cette démarche.

programme de propagande et d’influence à travers la culture en France et en Europe .

Les Etats-Unis ont donc la capacité, l’expérience et surtout la volonté politique de mener à bien une telle entreprise. Ils ont aussi compris que la seule façon de rester « aux commandes », est de se placer parmi ceux qui écrivent LA vérité. En outre, ils nous envoient un message fort : le pays capable de comprendre et d’anticiper le futur, de le mettre à disposition de tous et de rassembler autant de têtes pensantes, ne peut pas se tromper.

Ils seront donc toujours lus et écoutés même si c’est pour être critiqué par la suite. In fine, cette action nous influencera d’une façon ou d’une autre. Le fait qu’ils aient l’initiative nous impose de réagir en expliquant notre propre vision du monde.

SAM





  1. « L’art de la guerre », Sun Tse, Edition le Courrier du Livre, 2007.

  2. Les rapports global trends 2010, 2015 et celui de 2020.

  3. Le DNI est le principal conseiller en matière de renseignement auprès du Président des Etats-Unis. L’Office of the Director of National Intelligence (ODNI) créé depuis peu, permet à M. McConnell de diriger l’IC avec efficacité. D’après le rapport officiel déterminant la fonction de l’ODNI : « le NIC est une composante clé du ODNI […] depuis 1979, le NIC a servi d’unique passerelle entre le Renseignement et le politique ».

  4. P. 186, « Le cygne noir : la puissance de l’imprévisible », Nassim Nicolas Taleb, Paris, Belles Lettres 2008.

  5. Rand Corporation, etc.

  6. Rapport écrit en 1997.

  7. P. 204, « Le cygne noir : la puissance de l’imprévisible », Nassim Nicolas Taleb.