Rien ne va plus entre les deux voisins Nord Américains. Malgré des relations très fortes en apparence, Ottawa et Washington ne parviennent plus à s’entendre et à trouver un accord sur la gestion de l’eau des grands lacs. Les Etats-Unis pour faire plier le gouvernement Canadien pourrait s’appuyer sur l’ALENA et faire de la problématique de l’eau une question de sécurité nationale.
Depuis plusieurs années, les Etats du sud-ouest américain connaissent des périodes de sécheresse de plus en plus longue et de plus en plus difficiles à surmonter. Alors qu’il leur est inenvisageable de modifier leurs mode de consommation, les Etats du sud-ouest tels que le Texas, le Nevada, L’Arizona ou encore la Californie, cherchent par tous les moyens possibles à assurer leur approvisionnement en eau potable de façon durable. Pour ce faire, les États-Unis souhaiteraient acheminer l’eau des grands lacs par la mise en place de canaux directement dans le sud-ouest comme c’est déjà le cas pour le sud-est des Etats-Unis, par l’intermédiaire de la Chicago River puis du Mississipi. Si cette eau est une ressource commune aux deux pays, seule la cour suprême des États-Unis peut statuer sur le volume d’eau prélevée chaque année. Le Canada qui, à lui seul, concentre plus de 20% de la ressource mondiale en eau potable ne l’entend pas de cette oreille et tente par tout les moyens d’éviter la construction de nouveaux canaux qui videraient les lacs en quelques années mais aussi leur feraient perdre tout contrôle sur cette ressource naturelle dont la valeur est amenée à augmenter au cours des prochaines années.
Après l’or noir d’Alberta, les États-Unis s’attaquent à l’or bleu des Grands lacs. Les États-Unis s’appuient sur les accords de libre échange nord américains qui régissent les échanges commerciaux entre le Mexique, les États-Unis ainsi que le Canada pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il privatise le secteur de l’énergie et plus particulièrement celui de la gestion et de l’exploitation de l’eau et donc des lacs. Cette technique avait déjà été utilisée par les Américains avec succès pour mettre la main sur les ressources en gaz et en pétrole canadiennes. Mais dans ce dossier, les États-Unis se frottent à une difficulté majeure, une difficulté que l’on pourrait considérer comme structurelle : l’ALENA bien qu’autorisant les exportations d’eau potable, limite cette exportation a l’eau comme bien commercial transporté dans des containers de moins de vingt litres ((bidons, bouteille et autres produits dérivés). Ces contraintes techniques et économiques rendent l’exportation non rentable pour une exploitation industrielle. Il existe cependant une brèche dans laquelle les Etats-Unis se sont engouffré sans succès jusqu'à présent mais qui reste la voie d’accès privilégié à la ressource canadienne. Dans la réglementation de l’ALENA, l’eau comme ressource naturelle ne dispose d’aucun statut autorisant sa commercialisation, mais à l’inverse, rien n’indique qu’elle ne peut être considérée comme un bien commercial. Ce point est intéressant car il explique davantage pourquoi les Etats-Unis accordent autant d’importance à la mise en place d’une zone de libre échange à l’échelle des Amériques (ZLEA). Dans cette convention, les Etats-Unis attirent les pays en promettant une levée des barrières douanières sur tout type de produits tels que l’agroalimentaire, mais cette convention placera également toutes les ressources naturelle comme bien commercial. Il leur serait alors possible d’acheter et de vendre tout type de ressources dont l’eau, sans régulation, et dont le prix serait régi par les lois du marché (lois de l’offre et de la demande).
La dernière stratégie que le gouvernement américain pourrait envisager, est une interprétation extrême du traité de l’ALENA en déclarant la problématique de l’approvisionnement en eau potable comme question de sécurité nationale. Les autres Etats-membres dont le Canada devront tout mettre en œuvre afin d’aider leurs partenaires, et dans ce cas, fournir de l’eau aux Etats-Unis. Cette dernière solution est probable en cas d’échec des négociations. Plus récemment une conférence a eu lieu à Ottawa sur la problématique de l’eau entre les membres du Center of strategic and international studies de Washington, les membres de la Conference board du Canada qui représente les entreprises canadiennes, ainsi qu’une délégation d’industriels mexicains. L’ouverture du marché de l’eau au Canada a été fortement évoquée par les Etats-Unis et leurs représentants ont rappelé à leurs interlocuteurs qu’ils feront tout pour que cela arrive.
A l’inverse, Le Canada a l’intention de mener une stratégie que nous pourrons qualifier d’encerclement, en signant des accords de limitation de l’usage de l’eau avec les Etats riverains membres de la bannière étoilée qui vivent eux aussi de l’activité économique fournis par les grands lacs. En signant de tels accords à l’échelle locale, ils forcent l’Etat fédéral américain à reconsidérer sa position. Et au cas où les Etats-Unis voulaient passer en force, ils se retrouveraient alors bloqués par des lois locales votées par les Etats du nord. Ces derniers ont été sensibilisés par le Canada pour qu’ils comprennent aujourd’hui la nécessité de protéger les ressources en eau. En parallèle, le Canada s’est livré à un véritable jeu de lobbying auprès de son voisin américain mais aussi au sein de l’organisation de l’ALENA afin de faire donner à l’eau un statut particulier.
Le dossier de la gestion de l’eau dans la zone de l’Amérique du Nord est complexe tant par l’opposition entre la stratégie des acteurs (Etats- Unis, Canada) que par l’imbroglio juridique entre les lois locales et fédérales de deux côtés de la frontière. Par exemple au Canada, les lacs relèvent de la compétence du gouvernement local mais les cours d’eau du gouvernement fédéral, il est donc très difficile de trouver des accords communs pour sortir de cette crise. Le Canada n’exclut pas de commercialiser son eau qui, selon l’institut économique de Montréal, pourrait rapporter plus de 6 milliards de dollars par an. Le Canada a bien conscience qu’il lui sera difficile de résister longtemps face à la pression des Etats-Unis mais il va tout faire pour garder le contrôle de la ressource afin qu’elle reste renouvelable.
Sébastien Baldauf
Depuis plusieurs années, les Etats du sud-ouest américain connaissent des périodes de sécheresse de plus en plus longue et de plus en plus difficiles à surmonter. Alors qu’il leur est inenvisageable de modifier leurs mode de consommation, les Etats du sud-ouest tels que le Texas, le Nevada, L’Arizona ou encore la Californie, cherchent par tous les moyens possibles à assurer leur approvisionnement en eau potable de façon durable. Pour ce faire, les États-Unis souhaiteraient acheminer l’eau des grands lacs par la mise en place de canaux directement dans le sud-ouest comme c’est déjà le cas pour le sud-est des Etats-Unis, par l’intermédiaire de la Chicago River puis du Mississipi. Si cette eau est une ressource commune aux deux pays, seule la cour suprême des États-Unis peut statuer sur le volume d’eau prélevée chaque année. Le Canada qui, à lui seul, concentre plus de 20% de la ressource mondiale en eau potable ne l’entend pas de cette oreille et tente par tout les moyens d’éviter la construction de nouveaux canaux qui videraient les lacs en quelques années mais aussi leur feraient perdre tout contrôle sur cette ressource naturelle dont la valeur est amenée à augmenter au cours des prochaines années.
Après l’or noir d’Alberta, les États-Unis s’attaquent à l’or bleu des Grands lacs. Les États-Unis s’appuient sur les accords de libre échange nord américains qui régissent les échanges commerciaux entre le Mexique, les États-Unis ainsi que le Canada pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il privatise le secteur de l’énergie et plus particulièrement celui de la gestion et de l’exploitation de l’eau et donc des lacs. Cette technique avait déjà été utilisée par les Américains avec succès pour mettre la main sur les ressources en gaz et en pétrole canadiennes. Mais dans ce dossier, les États-Unis se frottent à une difficulté majeure, une difficulté que l’on pourrait considérer comme structurelle : l’ALENA bien qu’autorisant les exportations d’eau potable, limite cette exportation a l’eau comme bien commercial transporté dans des containers de moins de vingt litres ((bidons, bouteille et autres produits dérivés). Ces contraintes techniques et économiques rendent l’exportation non rentable pour une exploitation industrielle. Il existe cependant une brèche dans laquelle les Etats-Unis se sont engouffré sans succès jusqu'à présent mais qui reste la voie d’accès privilégié à la ressource canadienne. Dans la réglementation de l’ALENA, l’eau comme ressource naturelle ne dispose d’aucun statut autorisant sa commercialisation, mais à l’inverse, rien n’indique qu’elle ne peut être considérée comme un bien commercial. Ce point est intéressant car il explique davantage pourquoi les Etats-Unis accordent autant d’importance à la mise en place d’une zone de libre échange à l’échelle des Amériques (ZLEA). Dans cette convention, les Etats-Unis attirent les pays en promettant une levée des barrières douanières sur tout type de produits tels que l’agroalimentaire, mais cette convention placera également toutes les ressources naturelle comme bien commercial. Il leur serait alors possible d’acheter et de vendre tout type de ressources dont l’eau, sans régulation, et dont le prix serait régi par les lois du marché (lois de l’offre et de la demande).
La dernière stratégie que le gouvernement américain pourrait envisager, est une interprétation extrême du traité de l’ALENA en déclarant la problématique de l’approvisionnement en eau potable comme question de sécurité nationale. Les autres Etats-membres dont le Canada devront tout mettre en œuvre afin d’aider leurs partenaires, et dans ce cas, fournir de l’eau aux Etats-Unis. Cette dernière solution est probable en cas d’échec des négociations. Plus récemment une conférence a eu lieu à Ottawa sur la problématique de l’eau entre les membres du Center of strategic and international studies de Washington, les membres de la Conference board du Canada qui représente les entreprises canadiennes, ainsi qu’une délégation d’industriels mexicains. L’ouverture du marché de l’eau au Canada a été fortement évoquée par les Etats-Unis et leurs représentants ont rappelé à leurs interlocuteurs qu’ils feront tout pour que cela arrive.
A l’inverse, Le Canada a l’intention de mener une stratégie que nous pourrons qualifier d’encerclement, en signant des accords de limitation de l’usage de l’eau avec les Etats riverains membres de la bannière étoilée qui vivent eux aussi de l’activité économique fournis par les grands lacs. En signant de tels accords à l’échelle locale, ils forcent l’Etat fédéral américain à reconsidérer sa position. Et au cas où les Etats-Unis voulaient passer en force, ils se retrouveraient alors bloqués par des lois locales votées par les Etats du nord. Ces derniers ont été sensibilisés par le Canada pour qu’ils comprennent aujourd’hui la nécessité de protéger les ressources en eau. En parallèle, le Canada s’est livré à un véritable jeu de lobbying auprès de son voisin américain mais aussi au sein de l’organisation de l’ALENA afin de faire donner à l’eau un statut particulier.
Le dossier de la gestion de l’eau dans la zone de l’Amérique du Nord est complexe tant par l’opposition entre la stratégie des acteurs (Etats- Unis, Canada) que par l’imbroglio juridique entre les lois locales et fédérales de deux côtés de la frontière. Par exemple au Canada, les lacs relèvent de la compétence du gouvernement local mais les cours d’eau du gouvernement fédéral, il est donc très difficile de trouver des accords communs pour sortir de cette crise. Le Canada n’exclut pas de commercialiser son eau qui, selon l’institut économique de Montréal, pourrait rapporter plus de 6 milliards de dollars par an. Le Canada a bien conscience qu’il lui sera difficile de résister longtemps face à la pression des Etats-Unis mais il va tout faire pour garder le contrôle de la ressource afin qu’elle reste renouvelable.
Sébastien Baldauf