La naissance d’un grand dans l’industrie navale militaire

Il faut saluer l’arrivée du nouveau géant mondial  de la construction navale militaire, Navantia. Quelques années auparavant, alors que l’entreprise s’appelait « Empresa Nacional Bazan », personne n’aurait pu croire à une croissance semblable. A cette époque, l’entreprise avait du mal à entretenir les bâtiments qu’on lui confiait, et qui avaient été achetés d’occasion aux Etats-Unis (frégates type knoxx ou encore le porte-aéronefs « Principe de Asturias »), ou s’exerçait à la construction navale sur des corvettes pour la Marine espagnole. Mais grâce à d’ambitieux projets en R&D&i, et à quelques changements dans la structure organique et dans la vision commerciale, cette entreprise nationale a réussi à avoir un savoir faire sans égal au monde en un temps record. La preuve en est dans la signature du plus gros contrat de construction navale militaire de l’histoire, pour un montant total de 6500 millions d’euros. Ceci, évidemment, fait des envieux, mais c’est ainsi selon la loi du commerce.
Tout a commencé lors de la mise à l’eau des frégates type F-100 Alvaro De Bazan. Ces frégates ont été un réel succès et se sont vite fait remarquer par d’autres pays comme la Norvège ou l’Australie. Ces frégates sont à caractère multifonctions et sont la concurrence directe des FREMM construites par la DCNS pour la France.
Le succès des frégates type F-100 réside dans le système de combat et de transmissions intégré AEGIS de conception Nord Américaine ainsi que dans l’armement très bien adapté à la multifonctionnalité (propulsion, sonar de coque, tourelle à l’avant…). Le système AEGIS est sous-traité par les USA et c’est celui qu’arment les Frégates de l’US Navy, les Type « Arleigh Bourke ». Ceci doit se comprendre dans le cadre du traité AFCOM (Advanced Frigate Consortium) intégré par Navantia, Lockheed Martin Corporation et le chantier naval Nord Américain Bath Iron Works dont le but est de faire la promotion internationale du système anti-aérien et de communication intégré AEGIS.
Une fois que les performances de des frégates ont étés connues, des contrats ont été signés, des accords ont étés passés et de nouveaux projets innovants ont été mis en place, comme celui du bâtiment amphibien multitâche « Juan Carlos I » qui est déjà en construction pour la « Armada Española ». C’est cette philosophie d’entreprise qui a permis tous les succès suivants. En effet, au lieu se cantonner à un seul produit phare, Navantia a poursuivi sa quête du Graal. C’est ainsi que la Marine Royale Australienne a préféré le produit espagnol. En effet, l’Australie devait acheter trois frégates « Arleigh Bourke » aux USA puis deux bâtiments multifonctions type « Mistral » à la France. L’Espagne, quand à elle,  a proposé un contrat groupé pour les cinq unités, le tout à un prix compétitif, plus la possibilité de délocalisation des chantiers navals en Australie (Base navale de Cairn) permettant la rétro ingénierie et la création de postes de travail sur place. Cette démarche est devenue le plus gros contrat naval militaire de l’histoire et, de surcroît, en « chipant » deux contrats qui étaient considérés comme acquis par la France et les Etats-Unis.
Dans sa lancée, Navantia a passé un contrat avec la Marine vénézuélienne pour la construction de huit patrouilleurs océaniques puis pour trois patrouilleurs côtiers, le tout de conception propre. Le premier, le GC-21 « Guacaimacuto », à pris la mer il y a peu au Ferrol, en Galice, et le troisième, le GC-23 « Naiguatà », ses premières planches ont été découpées il y a peu.
Fidèle à sa stratégie, le quatrième patrouilleur Vénézuélien se construira dans les chantiers navals de Dianca à Puerto Cabello, au Venezuela, permettant les bienfaits que l’on connaît. En même temps, elle a signé un accord avec la DCNS visant la construction du sous-marin  « Scorpène ». Ce consortium fournira les 8 sous-marins à la Malaisie, le deuxième a été mis à l’eau à Carthagène récemment, et sera à l’origine du transfert de technologie vers l’Inde pour la construction de 6 autres sous-marins conventionnels.
Et puisque Navantia maîtrise désormais la technologie des sous-marins conventionnels, elle a crée seule et en exclusivité le S-80. Ce sous-marin est similaire au « Scorpéne » et intègre le système de combat américain au lieu de celui des Français, ce qui a crée beaucoup de frictions entre les deux entreprises.
A cet instant même, le président de Navantia négocie un important contrat avec la Colombie pour la modernisation de leur flotte de frégates, avec l’Australie l’achat d’une quatrième  frégate et des chalands de débarquement, avec la Turquie l’achat de six sous-marins conventionnels et avec l’Afrique du sud et la Malaisie un contrat pour la construction de bâtiments amphibiens multifonctions.
Le contrat signé à Adélaïde entre l’Australie de John Howard et Navantia pour une quatrième frégate sera ratifié lors des prochaines élections d’automne puisqu’une unité de plus serait économiquement bénéfique à l’implantation des chantiers navals publiques ASC malgré le coût total de la frégate.
Toute cette croissance pose des problèmes ne serait ce qu’au niveau logistique. Le programme des frégates anti-aériennes (AWD) implique à lui seul 800.000 heures de travail pour les chantiers du Ferrol, 42.200 heures pour l’unité des moteurs de Carthagène et 43.300 heures pour l’unité des Systèmes FABA de San Fernando (Cadix) et un coût de 285 millions d’euros
Selon le directeur de chantier Angel Recaman, la répartition des charges de travail ne sont pas encore établies mais elles activeront les anciens chantiers d’Astano et Bazan. Mais les plus gros problèmes se posent avec la DCNS. L’entreprise française prétend laisser Navantia en dehors du consortium naval européen. Ce consortium est, somme toute, similaire à l’EADS aéronautique, et Navantia y participe depuis le début.
Ce serait bien difficile d’exclure un membre d’origine sans l’accord du reste des membres. La création de ce consortium était paralysée depuis deux ans et va être réactivé à la demande de l’entreprise française. La DCNS encoure, de ce fait, d’être discréditée puisqu’elle prétend faire rentrer à la place de l’entreprise espagnole l’allemande Thyssen-Krupp. L’ancienne Direction du Chantier naval est très irritée depuis la création du S-80. Mais c’est surtout depuis que le sous-marin espagnol porte le système d’armes Nord Américain plutôt que le français que les relations se sont dégradées. Ce choix là laisse la DCNS en dehors du coup à chaque fois. C’est pourquoi elle menace de rompre le contrat avec Navantia alors qu’ils se sont tous deux engagés avec l’Inde dans le contrat des sous-marins conventionnels jusqu’en 2016. Pendant ce temps, les Espagnols touchent des parts pour chaque « Scorpène » délivré et vendent le S-80 comme étant le concurrent direct en solo.
Pour éviter cela il aurait suffit à la DCNS de prendre des mesures de protection lors de la signature du contrat ou de mettre en place des systèmes de veille et de contrôle technologique.  Il y a fort à parier que les relations finiront par se rétablir vu le lapse de temps de relation forcée qu’il reste aux deux entreprises .De leur côté, les porte-parole de chacune des entreprises affirment ne pas connaître les soucis qui existent entre elles. Pour les deux états ce serait dommage de laisser ce genre de querelles s’envenimer car il s’agit ici de deux chevaux de course gagnants dans le domaine de la construction navale militaire.

BIBLIOGRAPHIE
Sydney Herald Mourning.
Revue d'armement “Jane's' “
Link http://www.europapress.es/00066/20071008144115/gobierno-australiano-hara-efectiva-opcion-compra-cuarta-fragata-f100-navantia-prensa-local.html
www.asmar.cl
www.corlobe.tk –le portail des sous-marins-
www.base.mforos.com –Base Naval-
www.laverdad.es
blog.elgrancapitan.org
www.navantia.es
www.armada.mil.ve
www.sima.com.pe