Déficit de communication pour l'agence France museums

Alors que la ministre de la culture Christine Albanel s'apprête à fouler le sol des Emirat Arabes Unis pour finaliser l'accord d'implantation du Louvre à Abu Dhabi à l'horizon 2012, on peut s'interroger sur l'image négative que les autorités françaises ont laissé s'installer dans les médias. L'embarras qui saisit les porteurs français du projet semble à la mesure de l'écho médiatique majoritairement vouée aux thèses des pourfendeurs du projet, qui ne voient en cet accord qu'une odieuse marchandisation de l'Art.
Comme si art, puissance, et argent n'avait jamais été profondément liées ! Est-il besoin de rappeler que l'immense majorité des œuvres occidentales - et singulièrement le Louvre lui même - est naturellement le fruit d'un mécénat n'ayant rien de gratuit sur le plan politique, symbolique et financier. Et d'oublier que la diplomatie culturelle qui a négocié avec Renaud Donnedieu de Vabres cet accord est aussi celle qui a porté en 2005 la convention sur la diversité culturelle de l'Unesco sur les fonds baptismaux. La posture parisianiste feint d'ignorer l'enjeu central de la présence de la France aux Emirats affublant les autorités émiraties des plus épais clichés d'une condescendance frisant le néocolonialisme, voire l'islamophobie. Les gardiens de la "culture française" s'indignent ainsi que l'accord s'inscrive dans un immense projet touristique, alors que le Louvre à Paris n'a naturellement pas le moindre rapport avec l'économie du tourisme ! Ils ne saisissent pas non plus que les Emirats en investissant sur l'économie de la connaissance et de la culture - la Sorbonne vient de s'implanter aussi sur place- anticipent la fin de l'économie du pétrole. Enfin, ils ne perçoivent pas non plus que s'adresser à l'occident pour construire, avec le Louvre et le Guggenheim un musée universel, est aussi un signal politique adressé par les EAU aux puissances théocratiques de la région et aux fondamentalistes.
La peur est mauvaise conseillère et la jeune Agence France-museums devrait rapidement - et ce n'est pas une question de manque de moyens - corriger sa stratégie de communication pour ne pas subir les foudres du microcosme parisien, voire la désinformation pure quand il a été question dans la presse de vente d'œuvres. L'agence doit maintenant imposer son agenda en communiquant massivement :




  • - sur l'implantation de Beaubourg à Shanghai par exemple,
    - en jouant le jeu de la transparence dans la répartition des fonds perçus et faire œuvre de pédagogie concernant les raisons impérieuses de l'implantation du Louvre dans le Golfe et tout simplement sa raison d'être sur le plan de la diplomatie culturelle.



Pierre Gueydier