Connus et reconnus pour l’excellente émission de vulgate géopolitique, Le dessous des cartes, diffusée sur ARTE depuis 1990, Jean-Christophe Victor, Virginie Raisson et Franck Tétart sont les coauteurs de l’atlas du même nom (1). Dans un nouveau format, l’atlas se propose, autour de 50 thèmes et 350 cartes, de « comprendre le monde dans lequel nous vivons et anticiper celui où nous vivrons ». Pour se faire, il se divise en deux parties. La première, Itinéraires géopolitiques, traite des grandes problématiques sur cinq régions clés du monde : l’Europe de l’Est et la Russie ; Le continent américain ; Le proche et le moyen Orient ; L’Asie et plus spécifiquement les quatre puissances (Pakistan, Chine, Inde, et Japon) ; l’Afrique. La deuxième partie de l’atlas, Le monde qui vient, entraîne le lecteur dans les problématiques liées à la guerre (prolifération nucléaire, tchétchénie, Côte d’Ivoire, Colombie, etc.) ou au développement durable (réchauffement climatique, gestion de l’eau et des mers, les famines, etc.)
Les coauteurs partent d’un constat simple. Nous vivons dans une époque « bouffie d’images » (expression du géographe suisse Claude Raffestin) et celles-ci engendrent la peur et l’émotion donc la perte de tout sens critique et de la capacité de raisonnement. Par conséquent, l’ambition de l’atlas est de « tenter de donner du sens aux évènements, de chercher l’intelligence des faits et de classer l’immense savoir dont chacun dispose ».
Pour cela, cet atlas s’appuie sur quatre logiques élémentaires pour qui veut appréhender le monde dans sa complexité :
a) Faire des liens, dans le temps et dans l’espace car les évènements ne surviennent pas par hasard. Par conséquent, leur importance ne se mesure réellement qu’à l’aune de ce qui les précède mais aussi de ce qui les suivra et du lieu où ils se déroulent. D’où, l’urgence… d’attendre les évènements futurs et de raison garder sur les faits présents. Sinon, cela conduit à une incohérence et à une incompréhension dans l’analyse des faits s’ils sont découplés de leur contexte de long terme.
b) Entrer dans la logique de l’autre car les perceptions que nous avons des évènements, les représentations qu’on en donne dépendent toujours de l’endroit où l’on se trouve et du moment où l’on se place. L’histoire et la géographie, sciences inexactes, ne peuvent donc suffire à l’analyse, celle-ci exigeant que l’on se mette à la place de l’autre, historiquement, géographiquement et politiquement pour saisir son raisonnement et sa logique. L’objectif est d’éviter les visions occidentalo-centristes des évènements afin d’en comprendre la totalité des tenants et des aboutissants.
c) Décider plutôt qu’observer, c’est-à-dire quitter la posture de l’expert pour adopter celle du décideur, celui-ci devant arbitrer entre des intérêts et des logiques divergentes, voire inconciliables.
d) Comprendre plutôt que savoir, comme pour résumer la démarche méthodologique des coauteurs.
Ainsi, nul doute que cet atlas est à conseiller à ceux qui souhaitent sortir des clichés géopolitiques réchauffés. Les coauteurs ne se sont pas trompés en intitulant leur seconde partie Le monde qui vient. Ce titre fait directement référence au Monde d’hier de Stefan Zweig, dans lequel, peu de temps avant de se suicider, l’auteur décrit l’incroyable confort matériel et moral dans lequel les élites politiques et intellectuelles européennes vivaient peu avant le début de la Première Guerre mondiale. A cette époque (comme aujourd’hui !), la force des certitudes et la confiance dans le progrès scientifique ou dans le sens de l’Histoire avaient rendu les Européens aveugles et les avaient persuadés que la paix était éternelle. A méditer…
AR
(1) Jean-Christophe Victor est le directeur du Laboratoire d’études politiques et cartographiques (LEPAC). Virginie Raisson et Franck Tétart, chercheurs au LEPAC, sont respectivement analyste en géopolitique et en relations internationales et docteur en géopolitique.
VICTOR Jean-Christophe, RAISSON Virginie et TETART Franck (2006), Le dessous des cartes, Editions Tallandier/ARTE éditions, avril.
Les coauteurs partent d’un constat simple. Nous vivons dans une époque « bouffie d’images » (expression du géographe suisse Claude Raffestin) et celles-ci engendrent la peur et l’émotion donc la perte de tout sens critique et de la capacité de raisonnement. Par conséquent, l’ambition de l’atlas est de « tenter de donner du sens aux évènements, de chercher l’intelligence des faits et de classer l’immense savoir dont chacun dispose ».
Pour cela, cet atlas s’appuie sur quatre logiques élémentaires pour qui veut appréhender le monde dans sa complexité :
a) Faire des liens, dans le temps et dans l’espace car les évènements ne surviennent pas par hasard. Par conséquent, leur importance ne se mesure réellement qu’à l’aune de ce qui les précède mais aussi de ce qui les suivra et du lieu où ils se déroulent. D’où, l’urgence… d’attendre les évènements futurs et de raison garder sur les faits présents. Sinon, cela conduit à une incohérence et à une incompréhension dans l’analyse des faits s’ils sont découplés de leur contexte de long terme.
b) Entrer dans la logique de l’autre car les perceptions que nous avons des évènements, les représentations qu’on en donne dépendent toujours de l’endroit où l’on se trouve et du moment où l’on se place. L’histoire et la géographie, sciences inexactes, ne peuvent donc suffire à l’analyse, celle-ci exigeant que l’on se mette à la place de l’autre, historiquement, géographiquement et politiquement pour saisir son raisonnement et sa logique. L’objectif est d’éviter les visions occidentalo-centristes des évènements afin d’en comprendre la totalité des tenants et des aboutissants.
c) Décider plutôt qu’observer, c’est-à-dire quitter la posture de l’expert pour adopter celle du décideur, celui-ci devant arbitrer entre des intérêts et des logiques divergentes, voire inconciliables.
d) Comprendre plutôt que savoir, comme pour résumer la démarche méthodologique des coauteurs.
Ainsi, nul doute que cet atlas est à conseiller à ceux qui souhaitent sortir des clichés géopolitiques réchauffés. Les coauteurs ne se sont pas trompés en intitulant leur seconde partie Le monde qui vient. Ce titre fait directement référence au Monde d’hier de Stefan Zweig, dans lequel, peu de temps avant de se suicider, l’auteur décrit l’incroyable confort matériel et moral dans lequel les élites politiques et intellectuelles européennes vivaient peu avant le début de la Première Guerre mondiale. A cette époque (comme aujourd’hui !), la force des certitudes et la confiance dans le progrès scientifique ou dans le sens de l’Histoire avaient rendu les Européens aveugles et les avaient persuadés que la paix était éternelle. A méditer…
AR
(1) Jean-Christophe Victor est le directeur du Laboratoire d’études politiques et cartographiques (LEPAC). Virginie Raisson et Franck Tétart, chercheurs au LEPAC, sont respectivement analyste en géopolitique et en relations internationales et docteur en géopolitique.
VICTOR Jean-Christophe, RAISSON Virginie et TETART Franck (2006), Le dessous des cartes, Editions Tallandier/ARTE éditions, avril.