« Eduwise » et « One Laptop per Child » (OLC), tels sont les noms des projets d’ordinateurs destinés aux pays émergents, développés respectivement par Intel et soutenus par AMD. Le premier aurait un prix avoisinant les 400 Dollars US, tandis que le second serait vendu entre 130 et 140 Dollars US. L’annonce d’Intel fait suite à celle de AMD (1), alors que la course à la performance et aux parts de marchés (secteurs des particuliers et des super calculateurs) prend chaque jour un peu plus d’ampleur entre les deux leaders mondiaux des microprocesseurs, tous deux américains. Les parties matérielles de ces ordinateurs seront donc assurées par divers constructeurs tels que Motorola et Samsung. Mais un ordinateur ne peut fonctionner sans système d’exploitation. On voit donc se profiler l’ombre de Microsoft et Gnu/Linux. En effet, l’OLC sera équipé par une solution « Red Hat » tandis que l’ « Eduwise » le sera très probablement de la solution « Windows » proposée par Microsoft. Ce dernier a annoncé par la voix de son CEO, Steve Ballmer, qu’il apportait « un soutien sans faille au projet (2) ». Par ailleurs, le Massachusets Institut of Technology, qui collabore au projet soutenu par AMD, affirme « [avoir reçu] une demande du gouvernement chinois pour que soit plutôt utilisé un système à code ouvert, ce qui est aussi notre préférence (3) ».
Les enjeux sont donc multiples. Ils concernent d’une part les systèmes d’exploitation, solutions ouvertes et fermées, vis-à-vis de l’indépendance technologique, de la sécurité des systèmes d’information et de l’information en tant que telle, auxquels s’ajoutent des enjeux économiques et d’influence. Il s’agit pour les pays qui sont ciblés par l’achat de l’OLC (Chine, Russie, Mexique, Inde, Egypte, Brésil, Thaïlande, Nigeria, Argentine etc.) de passer commandes d’un grand nombre d’unités. En effet, « seules les commandes d’au moins 1 million d’unités pour un seul pays ne seront acceptés (4) ». Les ministères de l’éducation devant répartir les unités achetées de « manière équitable (5) ». Intel n’a pas encore précisé les modalités financières de son offre, mais peut-être est-ce du au fait qu’il souhaite par ce biais pourvoir à la réduction de la « fracture numérique », mais pas avec « des technologies d’hier (6) » en formant près de « 10 millions de professeurs à l’utilisation d’ordinateur (7) ». Professeurs qui formeront à leur tour leurs élèves. On comprend mieux dès lors l’intérêt affiché par Microsoft pour le projet de Intel car les utilisateurs habitués à un système d’exploitation ont tendance à ne pas en changer. Aujourd’hui, un système d’exploitation de type « Gnu/Linux » tend à accroître sa présence au sein des ordinateurs domestiques dans les pays développés. Par ailleurs, Microsoft ne communique pas sur l’éventuel prix des licences qui accompagneront les ordinateurs « Eduwise », aucun accord n’existant à l’heure actuelle entre Intel et Microsoft. Mais ce dernier possède les arguments et les atouts pour y parvenir. Au vu de la taille du marché chinois, Intel pourrait être tenté d’équiper aussi son ordinateur de Gnu/Linux proposant ainsi à une offre diversifiée. Or, récemment Lenovo a, en date du 19 avril 2006, passé un accord avec Microsoft pour équiper ses ordinateurs avec Windows afin de lutter contre le piratage. Cet argument permettra-t-il à Microsoft d’encourager la Chine à opter pour l’ « Eduwise » équipé de son système d’exploitation, ou la Chine jouera-t-elle sur les antagonismes entre les deux solutions proposées pour exprimer sa volonté d’indépendance vis-à-vis de Microsoft ?
Si cet accord venait à devenir réalité, on peut alors penser que le géant de Redmond appliquerait la même politique, en terme de tarif de licence, que celle qui est la sienne avec les ordinateurs vendu avec Windows pré installé. Il n’est pas à exclure que Intel, via sa puissance financière, « [fournisse] des équipements nécessaires à l’établissement des infrastructures réseau (8) » à moindre coût, notamment en terme de Wifi. Afin de rendre son offre plus attractive dans le but de s’établir dans ces pays émergents ou favoriser de futurs contrats. Intel pourrait pérenniser cette situation en proposant une couverture de l’ensemble du territoire et en terme d’évolutions technologiques. Ces dernières auront un prix, et les coûts financiers pour migrer d’une technologie à une autre sont d’autant plus conséquentes pour des pays émergents, ceci faisant écho à une indépendance technologique réduite.
Microsoft ne peut se contenter de jouer un rôle secondaire face aux opportunités offertes par les pays émergents. C’est pourquoi il propose lui aussi son offre basée sur un autre modèle économique. Il s’agit pour les citoyens de ces pays, désireux d’accéder à l’informatique, d’acheter un ordinateur à prix réduit, cofinancé par une institution. Puis, d’en devenir propriétaire après un certain nombre d’heure d’utilisation permis par l’achat de cartes prépayées (9). Ceci renforcé par le fait que Intel souhaite « accélérer la diffusion des technologies pour tous dans le monde (10) ».
Ce n’est pas sans raison si des sociétés comme Google soutiennent de tels projets. En effet, l’information devenue matière première dans les contextes de guerres informationnelle et économique actuelles démontre son importance et les enjeux qu’elle draine via les vecteurs de communication.
Les Etats-Unis pratiquent une politique d’intelligence économique qui implique une grande imbrication des acteurs publics et privés. Cela permettrait ainsi aux Etats-Unis de faire valoir un peu plus un certain poids économique auprès de ces pays émergents en vue de futures négociations de contrats portant sur d’autres secteurs d’activités comme l’énergie. Une guerre de l’information passe par les médias dont Internet, ce que les Américains savent très bien mettre en oeuvre pour certains contrats et opérations. Or, tout ceci n’est qu’une conséquence d’un tel développement envers des pays émergents et non la cause.
Les ordinateurs à bas prix dépendent de l’industrie américaine des microprocesseurs qui sont à l’origine d’une telle initiative. Ceci peut peut-être expliquer pourquoi les Chinois sont intéressés par de tels ordinateurs alors que la branche des ordinateurs particuliers de IBM a été cédée au groupe chinois Lenovo (11). Il est important de souligner que la Chine possède une distribution dite « libre » (12) et ayant compris les enjeux que sont l’indépendance technologique et informationnelle ait émis le souhait d’un système à code ouvert.
On peut s’interroger sur le fait qu’aucune entreprise française créatrice de microprocesseur n’ait été initiée. La dernière fois qu’une telle idée a été évoquée, ce fut en 1982. Le Minitel lancé la même année connu un certain succès positionnant ainsi la France en pointe des technologies fonctionnant en réseau. Le Web n’apparu, quant à lui, qu’en 1989.
Vincent Munier
http://www.hubdulibre.org
Advanced Micro Devices
2 Source : http://www.clubic.com/actualite-34455-intel-devoile-eduwise-son-pc-a-400-dollars.html
3 Le MIT participe activement au développement de la solution « Unix » nommée « Free BSD »
4 Source : http://www.pcinpact.com/actu/news/Un_PC_a_100_dollars_pour_les_pays_en_voie_de_devel.htm
5 Ibid
6 Source : http://www.presence-pc.com/actualite/eduwise-16667/
7 Ibid
8 Source : http://www.clubic.com/actualite-34455-intel-devoile-eduwise-son-pc-a-400-dollars.html
9 Source : http://www.pcinpact.com/actu/news/28907-PC-et-pays-emergents-Microsoft-croit-au-prep.htm
10 Source : http://www.pcinpact.com/actu/news/28499-Intel-devoile-son-PC-portable-a-400-dollars.htm
11 En Mars 2005 suite à l’accord du gouvernement américain.
12 TurboLinux
Les enjeux sont donc multiples. Ils concernent d’une part les systèmes d’exploitation, solutions ouvertes et fermées, vis-à-vis de l’indépendance technologique, de la sécurité des systèmes d’information et de l’information en tant que telle, auxquels s’ajoutent des enjeux économiques et d’influence. Il s’agit pour les pays qui sont ciblés par l’achat de l’OLC (Chine, Russie, Mexique, Inde, Egypte, Brésil, Thaïlande, Nigeria, Argentine etc.) de passer commandes d’un grand nombre d’unités. En effet, « seules les commandes d’au moins 1 million d’unités pour un seul pays ne seront acceptés (4) ». Les ministères de l’éducation devant répartir les unités achetées de « manière équitable (5) ». Intel n’a pas encore précisé les modalités financières de son offre, mais peut-être est-ce du au fait qu’il souhaite par ce biais pourvoir à la réduction de la « fracture numérique », mais pas avec « des technologies d’hier (6) » en formant près de « 10 millions de professeurs à l’utilisation d’ordinateur (7) ». Professeurs qui formeront à leur tour leurs élèves. On comprend mieux dès lors l’intérêt affiché par Microsoft pour le projet de Intel car les utilisateurs habitués à un système d’exploitation ont tendance à ne pas en changer. Aujourd’hui, un système d’exploitation de type « Gnu/Linux » tend à accroître sa présence au sein des ordinateurs domestiques dans les pays développés. Par ailleurs, Microsoft ne communique pas sur l’éventuel prix des licences qui accompagneront les ordinateurs « Eduwise », aucun accord n’existant à l’heure actuelle entre Intel et Microsoft. Mais ce dernier possède les arguments et les atouts pour y parvenir. Au vu de la taille du marché chinois, Intel pourrait être tenté d’équiper aussi son ordinateur de Gnu/Linux proposant ainsi à une offre diversifiée. Or, récemment Lenovo a, en date du 19 avril 2006, passé un accord avec Microsoft pour équiper ses ordinateurs avec Windows afin de lutter contre le piratage. Cet argument permettra-t-il à Microsoft d’encourager la Chine à opter pour l’ « Eduwise » équipé de son système d’exploitation, ou la Chine jouera-t-elle sur les antagonismes entre les deux solutions proposées pour exprimer sa volonté d’indépendance vis-à-vis de Microsoft ?
Si cet accord venait à devenir réalité, on peut alors penser que le géant de Redmond appliquerait la même politique, en terme de tarif de licence, que celle qui est la sienne avec les ordinateurs vendu avec Windows pré installé. Il n’est pas à exclure que Intel, via sa puissance financière, « [fournisse] des équipements nécessaires à l’établissement des infrastructures réseau (8) » à moindre coût, notamment en terme de Wifi. Afin de rendre son offre plus attractive dans le but de s’établir dans ces pays émergents ou favoriser de futurs contrats. Intel pourrait pérenniser cette situation en proposant une couverture de l’ensemble du territoire et en terme d’évolutions technologiques. Ces dernières auront un prix, et les coûts financiers pour migrer d’une technologie à une autre sont d’autant plus conséquentes pour des pays émergents, ceci faisant écho à une indépendance technologique réduite.
Microsoft ne peut se contenter de jouer un rôle secondaire face aux opportunités offertes par les pays émergents. C’est pourquoi il propose lui aussi son offre basée sur un autre modèle économique. Il s’agit pour les citoyens de ces pays, désireux d’accéder à l’informatique, d’acheter un ordinateur à prix réduit, cofinancé par une institution. Puis, d’en devenir propriétaire après un certain nombre d’heure d’utilisation permis par l’achat de cartes prépayées (9). Ceci renforcé par le fait que Intel souhaite « accélérer la diffusion des technologies pour tous dans le monde (10) ».
Ce n’est pas sans raison si des sociétés comme Google soutiennent de tels projets. En effet, l’information devenue matière première dans les contextes de guerres informationnelle et économique actuelles démontre son importance et les enjeux qu’elle draine via les vecteurs de communication.
Les Etats-Unis pratiquent une politique d’intelligence économique qui implique une grande imbrication des acteurs publics et privés. Cela permettrait ainsi aux Etats-Unis de faire valoir un peu plus un certain poids économique auprès de ces pays émergents en vue de futures négociations de contrats portant sur d’autres secteurs d’activités comme l’énergie. Une guerre de l’information passe par les médias dont Internet, ce que les Américains savent très bien mettre en oeuvre pour certains contrats et opérations. Or, tout ceci n’est qu’une conséquence d’un tel développement envers des pays émergents et non la cause.
Les ordinateurs à bas prix dépendent de l’industrie américaine des microprocesseurs qui sont à l’origine d’une telle initiative. Ceci peut peut-être expliquer pourquoi les Chinois sont intéressés par de tels ordinateurs alors que la branche des ordinateurs particuliers de IBM a été cédée au groupe chinois Lenovo (11). Il est important de souligner que la Chine possède une distribution dite « libre » (12) et ayant compris les enjeux que sont l’indépendance technologique et informationnelle ait émis le souhait d’un système à code ouvert.
On peut s’interroger sur le fait qu’aucune entreprise française créatrice de microprocesseur n’ait été initiée. La dernière fois qu’une telle idée a été évoquée, ce fut en 1982. Le Minitel lancé la même année connu un certain succès positionnant ainsi la France en pointe des technologies fonctionnant en réseau. Le Web n’apparu, quant à lui, qu’en 1989.
Vincent Munier
http://www.hubdulibre.org
Advanced Micro Devices
2 Source : http://www.clubic.com/actualite-34455-intel-devoile-eduwise-son-pc-a-400-dollars.html
3 Le MIT participe activement au développement de la solution « Unix » nommée « Free BSD »
4 Source : http://www.pcinpact.com/actu/news/Un_PC_a_100_dollars_pour_les_pays_en_voie_de_devel.htm
5 Ibid
6 Source : http://www.presence-pc.com/actualite/eduwise-16667/
7 Ibid
8 Source : http://www.clubic.com/actualite-34455-intel-devoile-eduwise-son-pc-a-400-dollars.html
9 Source : http://www.pcinpact.com/actu/news/28907-PC-et-pays-emergents-Microsoft-croit-au-prep.htm
10 Source : http://www.pcinpact.com/actu/news/28499-Intel-devoile-son-PC-portable-a-400-dollars.htm
11 En Mars 2005 suite à l’accord du gouvernement américain.
12 TurboLinux